Le pape François va-t-en-guerre pour le climat

L’encyclique papale sur l’environnement, Laudato Si (loué sois-tu), va bientôt être officialisée. Cette encyclique est importante, même pour les non-croyants : « Aujourd’hui, croyants et non-croyants sont d’accord sur le fait que la Terre est essentiellement un héritage commun, dont les fruits doivent bénéficier à tous. ». C’est d’ailleurs le premier texte de ce type exclusivement consacré par un pape à la crise écologique. Cette analyse du pape François a vocation à devenir un élément du magistère officiel de l’Eglise et aider à la prise en compte du réchauffement climatique. Selon le pape, réduire les émissions de gaz à effet de serre demande « de l’honnêteté et du courage, notamment de la part des pays les plus puissants et les plus polluants »… « Les négociations internationales ne peuvent pas progresser de manière significative à cause de la position de pays qui privilégient leurs intérêts nationaux plutôt que le bien commun »… « Ceux qui pâtiront des conséquences de ce que nous essayons de cacher se souviendront de ce manque de conscience et de responsabilité. »*

Le pape François en appelle à « toute la famille humaine », croyants ou non, catholiques ou autres, à joindre leurs efforts pour surmonter la crise et engager un changement radical « de style de vie, de production et de consommation »**. Il réfute l’idée que « l’économie actuelle et la technologie résoudront tous les problèmes environnementaux », tout comme celle qui voudrait que « les problèmes de la faim et de la misère dans le monde se résolvent simplement par la croissance du marché ». Mais, fidèle à la doctrine de l’Eglise, il assure que la croissance de la population mondiale n’est pas une cause des problèmes écologiques. Rappelons à tous les chrétiens et à bien d’autres que le nombre d’habitants sur notre petite planète est un multiplicateur de nuisances. On ne peut contredire l’équation de Kaya qui présente les causes du réchauffement climatique

CO2 = (CO2 : TEP) x (TEP : PIB) x (PIB : POP) x POP => CO2
(CO2 : TEP) : contenu carbone d’une unité d’énergie (qui peut s’exprimer en TEP, tonnes d’équivalent pétrole)
(TEP : PIB) : quantité d’énergie requise à la création d’une unité monétaire (qui peut correspondre au PIB)
(PIB : POP) : production par personne ou niveau de vie moyen
POP : nombre d’habitants.

Si on veut diviser par 3 les émissions de gaz à effet de serre, ce qui est un minimum au niveau mondial, il faudrait aussi que l’ensemble des autres éléments soit divisé par trois. Peu importe mathématiquement ce qui est réduit. Or la tendance moyenne d’augmentation démographique est de 30 % d’ici 2050. Il faudrait donc diviser les autres indicateurs par 4, ce qui veut dire par beaucoup plus que 4 pour les pays les plus émetteurs. On mesure les efforts d’économies d’énergie à demander à la population ou à la technique, gigantesque, sachant qu’on ne peut agir dans le court terme sur l’évolution démographique étant donné son inertie. Nous allons payer en termes climatiques le fait que l’Eglise catholique ait toujours œuvré contre le planning familial, la contraception « non naturelle » et l’avortement. Le pape François a encore du chemin à faire pour arriver à la vérité…écologique !

* Le Monde.fr | 16.06.2015, Environnement : le pape en appelle au « courage » et à l’action urgente
** LE MONDE du 17 juin 2015, Climat : le blâme du pape aux pays riches

6 réflexions sur “Le pape François va-t-en-guerre pour le climat”

  1. Position du pape sur la natalité
    « Au lieu de résoudre les problèmes des pauvres et de réfléchir à un monde meilleur, certains se limitent à proposer une baisse de la natalité. Il existe sur les pays pauvres des pressions internationales qui déterminent l’aide économique en fonction d’un certain type de politique de natalité. Mais la croissance démographique est pleinement compatible avec un développement solidaire. Le problème est une meilleure répartition des ressources et mettre fin au gaspillage. »

  2. Ajoutons l’excellent commentaire d’Odon Vallet sur les désespérantes conceptions papale exprimées au sujet de la démographie dans sa récente encyclique

    « Le pape raisonne sur nos modes de consommation, et non sur le nombre d’êtres humains qui consomment. Le gros reproche qu’on peut faire à l’Eglise, et pas uniquement catholique, c’est de sous-estimer le problème démographique. Pour le Vatican, plus il y a de bébés, mieux c’est. Abraham voulait que ses descendants soient plus nombreux que les grains de sable. Toutes les religions se basent sur des textes écrits il y a 1500, 2000, 2500 ans, à une époque où les hommes étaient si peu nombreux que la moindre épidémie pouvait faire périr l’humanité. Dans ces circonstances il fallait faire des enfants pour assurer sa survie. Aujourd’hui, la situation s’est renversée, nous sommes sept fois plus nombreux qu’il y a 100 ans, 70 fois plus nombreux qu’à l’époque de Jésus ».

  3. ludvigvonprinn

    Bon maintenant , reste à déterminer le degré d’ influence idéologique réelle du pape sur les masses chrétiennes : je l’ imagine assez faible !
    Comme le dit Didier Barthes, comment peut-on sortir de la misère / pauvreté si la populations est en hausse constante ?
    That’s the question !

  4. Robert Walker, président de Population Institute
    I have never met Pope Francis, so I do not take it personally, but when I read the long awaited papal encyclical on climate change and the environment (« Laudato Si’, » or « Praise Be to You »), I confess to taking a little umbrage. While I heartily applaud his call to action on climate change, I was struck, and personally so, when he writes that, « Instead of resolving the problems of the poor and thinking of how the world can be different, some can only propose a reduction in the birth rate. »
    Hmmm. I am sure there are those who « can only propose a reduction in the birth rate, » but among serious proponents of family planning, I do not know of anyone who believes that the challenges of chronic hunger and severe poverty can be addressed by contraceptives alone. To the contrary, they believe, as I do, that improved access to contraception must be an integral part–albeit an essential one–of a larger effort to improve health and well-being in the developing world.
    Rather than acknowledging that expanded access to contraceptives might improve the lives of women and their families in the developing world, the Pope’s encyclical insists that « demographic growth is fully compatible with an integral and shared development. » Fully compatible? The church leaders in Rome might benefit from reading a report that my organization, the Population Institute, released this week. It is titled « Demographic Vulnerability: Where population growth poses the greatest challenges. » The report identifies and ranks the 20 nations that face the greatest demographic challenges with respect to hunger, poverty, water scarcity, environmental degradation, and political instability. Countries in the top ten include South Sudan, Somalia, Niger, Burundi, Eritrea, Chad, Democratic Republic of Congo, Afghanistan, Yemen, and Sudan.
    The report explains how projected population growth poses an enormous challenge to these countries. They are, without exception, struggling against great odds to alleviate hunger and eliminate severe poverty. Significant progress has been made in reducing global hunger, but most of the gains have occurred in countries with relatively low fertility. Where fertility rates remain high, the battle against hunger is far from won.
    In some areas of sub-Saharan Africa, the number of malnourished children is actually on the rise, as is population. The Population Reference Bureau projects that the population of Burundi, which sits atop IFPRI’s 2014 Global Hunger Index (GHI), will increase 154 percent by 2050. The population of South Sudan, which also ranks very high for hunger, is projected to rise by 236 percent. And these projections assume that fertility rates in these countries will continue their historic decline.
    Similarly, while we have made great progress in reducing severe poverty, particularly in emerging economies, progress has been slow in countries where population growth rates remain high. The population of Niger, which ranks first in the UN’s 2014 Multidimensional Poverty Index, is on course to increase by 274 percent during the next 35 years. The population of Mali, which ranked fourth for poverty, is expected to increase by 187 percent.
    Expanded access to contraceptives alone will not adequately respond to the challenges that these countries face. Hardly. Even with a relatively sharp increase in contraceptive use and a corresponding decline in fertility, the populations of these countries will, in all likelihood, continue to increase for several decades to come. As highlighted in the Population Institute’s report, expanded access to contraception must be accompanied by investments in the education of girls and the empowerment of women. Child marriage practices, which are still prevalent in many parts of the developing world, need to be curtailed, and the U.S. and other donor nations need to expand agricultural assistance. In water-stressed countries, investments in water conservation and infrastructure are urgently needed. In developing countries that are heavily deforested, like Haiti, support for reforestation is needed. In countries where governance is poor and corruption is widespread, civil society must be strengthened.
    The Pope’s encyclical stresses that something must be done to address economic inequality and that waste of food should be curtailed. Amen. But, please, Your Holiness, make it possible for every woman in the world to be able to decide for herself, free from coercion, how many children to have and when.
    Reproductive choice is not just a moral imperative, it’s a human imperative. Without expanded access to modern methods of contraception, maternal and infant mortality rates in the developing world will remain unacceptably high, and many women and their families will never escape from poverty.

  5. C’est déjà tout de même un grand progrès par rapport au doctrinaire et réactionnaire polonais.

  6. Nous sommes évidemment partagés entre l’attitude du pape qui s’intéresse à l’écologie (la nature après tout dans ce système de référence, est une créature de Dieu, aussi et il serait bon qu’elle soit respectée) et son traditionalisme effrayant sur la question démographique (malgré l’épisode « lapins » d’il y a quelques mois).
    Voici comment le journal Le Point résume la position que le pape devrait exprimer sur la natalité lorsque cette fameuse encyclique sera publiée
    « Au lieu de résoudre les problèmes des pauvres et de réfléchir à un monde meilleur, certains se limitent à proposer une baisse de la natalité. Il existe sur les pays pauvres des pressions internationales qui déterminent l’aide économique en fonction d’un certain type de politique de natalité. Mais la croissance démographique est pleinement compatible avec un développement solidaire. Le problème est une meilleure répartition des ressources et mettre fin au gaspillage. »

    On a envie de demander au pape s’il s’agit là de réflexion véritable ou d’une soumission à la bienpensance du moment. Qu’il défende les pauvres c’est bien son rôle et c’est très bien, mais cela suppose aussi de ne pas défendre la pauvreté, or en niant ce facteur démographique c’est bien ce qu’il fait. Comment donnerons-nous plus aux pauvres quand ils seront plus nombreux sur un monde plus dégradé ?
    Jésus lui même, s’il a multiplié les pains n’a pas multiplié les mètres carrés et nous avons inévitablement envie de demander au pape François où il mettra toutes les autres créatures de Dieu dans un monde de bientôt 11 milliards d’habitants (dans moins de 100 ans !) .
    Jamais je n’ai rencontré une personne, même ou surtout écologiste, proposant la moindre réponse à cette question. Ce partage qu’évoque le pape doit d’abord s’appliquer aux hommes vis à vis du reste du monde vivant. Nous devons partager la planète pour permettre aux arbres, aux animaux de vivre et de durer, de maintenir l’extraordinaire diversité de notre monde.
    Les antinatalistes ne sont pas des anti humanistes, ce sont ceux qui au contraire respectent le monde et permettront à nos enfants de disposer d’une terre vivable et même, à leur tour, d’avoir des enfants, ce qu’un monde surpeuplé interdira de facto à tous, encyclique papale ou pas.
     » Mais la croissance démographique est pleinement compatible avec un développement solidaire »
    François, malgré tout le respect que l’on vous doit, cette phrase est un non sens dont l’acceptation pourrait conduire le monde à la ruine, pauvres en tête.

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