le sens de la dignité

Eluana Englora, plongée dans un coma végétatif irréversible, était maintenue en vie au moyen d’une sonde depuis 1992. Les médecins l’ont débranché le 9 février 2009 (LeMonde du 12 février). Le président italien Berlusconi décrète qu’« Eluana n’est pas morte de mort naturelle, elle a été assassinée ». L’Eglise assène qu’Eluana a été tuée. Mais il n’y a pas de maintien en vie d’ordre naturel quand on est complètement assisté par des machines. Et il y a déjà mort avérée quand un cerveau présente un électroencéphalogramme plat et durable. En fait l’éditorial du Monde pose la seule question qui importe : « Si la vie a un sens, quel était celui de la vie d’Eluana ? »

Nos sociétés pourraient tolérer le suicide assisté comme le suicide volontaire car la vie et la mort n’ont de sens que celui que nous voulons bien leur donner. Et la vie a d’abord un sens à condition qu’une personne puisse vivre une existence autonome. L’écrasante beauté d’une communion dans le suicide de deux amoureux octogénaires, je pense à André Gorz,  ne peut que nous renvoyer à Paul Lafargue qui écrivait, avant de se suicider en 1911 avec sa femme Laura Marx : « Sain de corps et d’esprit, je me tue avant que l’impitoyable vieillesse qui m’enlève un à un les plaisirs et les joies de l’existence et qui me dépouille de mes forces physiques et intellectuelles ne paralyse mon énergie, ne brise ma volonté et ne fasse de moi une charge à moi et aux autres. » Je pense à Roger et Claire Quillot qui ont voulu partir en disant : « Voilà. Nous avons fait notre temps »

Claire disait aussi,  « C’est inadmissible de dépenser des milliards pour des vieillards qui ne peuvent pas survivre, expliquait-elle. Si on le décide, pourquoi ne pourrait-on pas mourir en paix ?». Eluana serait fière de voir que des individus ont le courage de s’exprimer à sa place. Mais parfois politique et religion travaillent encore la main dans la main pour affirmer la prépondérance de la « loi » de dieu sur la décision humaine.