Alain Coulombel, membre du Bureau Exécutif d’EELV, a sorti un livre, « De nouveaux défis pour l’écologie politique »*. Voici l’essentiel de ce qui concerne directement le positionnement du mouvement écologiste :
– La vision d’une écologie positive (qui s’opposerait à l’écologie punitive) est une vision stérile qui nous détourne de l’urgence en nous laissant croire que des mesures d’accompagnement indolores suffiraient à retarder, voire à repousser, « le temps de la fin ». Or les tensions, les basculements, les conflits de toute intensité qui se manifestent dans le monde entier nous rappellent à nos obligations de terrien et aux dangers que recèle la situation (p.165).
– Ni la vieille gauche, ni la gauche insoumise, ni la gauche de la gauche, ni l’écologie populaire, ni la droite nationale, ni la droite forte… ne sont des concepts susceptibles d’éclairer notre propre présent. Tout au plus marquent-ils notre indigence face à une situation qui nous échappe… Ni la droite, ni la gauche (sous toutes ses formes) ne sont en mesure de proposer de nouveaux agencements ou de nouveaux territoires de sens. Résister à l’irrésistible, c’est-à-dire à la domination et à la destruction sous toutes ses formes, exige une radicalité que les partis politiques (et les force militantes qui les composent) seraient bien en peine de définir (p.189 et 190).
– Les écologistes héritent d’un paysage idéologique marqué par la prégnance du discours managérial où l’esprit d’entreprise a remplacé l’Esprit tout court. Défaire chaque maillon de cette langue réifiante est un prérequis. Sans quoi toute re-composition se trouvera bien incapable de court-circuiter le présent et d’engendrer le nouveau… Quel contenu, quel prolongement – politique ou non – donner à cette radicalité dont nous nous pensons encore dépositaire ? (p.191).
– Pareille à des trous noirs, les formations politiques n’émettent plus aucun rayonnement, plus aucune idée neuve, comme désarmées idéologiquement par l’outrecuidant « principe de réalité ». Toutes sans exception (p.197)… Le parti socialiste est devenu un astre mort, sans projet et sans idées… Un temps, l’écologie politique représentée par les Verts a donné le sentiment d’une formation tournée vers la recherche d’une pratiquante différente de la politique, associée à un corpus théorique soulevant de nouveaux enjeux. Mais en se tournant exclusivement vers la social-démocratie et la conquête des institutions, les Verts (EELV) ont perdu une grande partie de leur crédit, voire de leur utilité… Ceci étant, nous ne sommes pas les mains vides. Des résistances s’inventent ailleurs et partout. De nouveaux agencement se cherchent en dehors des partis politiques (p.199 et 200).
– Qu’il s’agisse d’évoquer le communalisme, les communautés locales autorégulées, les biorégions ou les communautés biotiques, les écologistes proposent des solutions qui passent bien souvent par la redécouverte d’une essence communautaire de l’être (p.204).
– Le succès des forces productives dans la dévastation de la Terre et le déchaînement massif de la technique forme une trame sur laquelle prospère, à la fois, le nihilisme et le besoin de redonner un sens à l’existence (p.212)… La sève spirituelle est utile, ce que l’écologie profonde ou l’écologie intégrale sait depuis longtemps sans avoir prise suffisamment sur l’écologie partidaire (p.213)… Quelques expressions rendent compte de ces déplacements qui reconfigurent notre univers de sens : sobriété heureuse, simplicité volontaire, éthique de la fragilité ou recherche du bien-vivre, résonnent comme une réponse au désarroi provoqué par la dégradation du monde naturel et social (p.215).
– Nous formulons l’idée, qu’après plusieurs décennies de camisole libérale, un nouvel espace politique doit s’ouvrir malgré les forces contraires et les lignes stérilisantes, à l’intérieur comme à l’extérieur de nos organisations (p.247).
– L’emprise du discours managérial sur nos vies devrait nous inciter à rechercher d’autres territoires de sens. Or l’écologie politique, en acceptant les règles du jeu, ne s’est-elle pas finalement enlisée dans le bourbier institutionnel, la lutte des places remplaçant l’écosophie mentale ? (p.249)
* Éditions Utopia, 250 pages pour 10 euros (mars 2019)
Quand pour les post-féministes, les biotechnologies doivent permettre, via la congélation des ovules ou la fécondation in vitro, de réduire les injustices entre les hommes et les femmes concernant la fertilité ou la grossesse, ne sommes-nous pas en train de transformer, au nom de l’égalité des droits, le combat pour l’émancipation politique en ode au transhumanisme. Car si le but final de la révolution féministe doit être, non seulement l’élimination du privilège masculin, mais l’abolition de la distinction entre les sexes elle-même, comment ne pas s’interroger sur cette volonté d’écarter, au nom de l’indépendance ou de la liberté, la contrainte d’un corps et de ses limites ?
A travers les biotechnologies, le post-genderisme évoque les traits d’une société libérée du genre et du patriarcat. Les technologies post-genres mettront fin à l’auto-identification biologique et sexuelle statique, permettant aux individus de décider eux-mêmes les traits biologiques ou physiologiques de genre qu’ils souhaitent garder ou rejeter.
Tout cela est confus, bien souvent délirant, comme la fascination de nos contemporains pour l’auto-engendrement. S’il est dans la nature de l’homme de se dénaturer, rien ne saurait pourtant remplacer l’air qu’il respire ou l’au qu’il boit, les conditions matérielles et psychiques de la vie sur terre.
Alain Coulombel, toujours dans son livre « De nouveaux défis pour l’écologie politique »