nature et sexualités : le débat sur le genre humain

Il y a les lois de la nature et il y a les lois humaines. Malheureusement les deux ne font pas souvent bon ménage à l’heure actuelle. Prenons la sexualité. Rien de plus simple pour la biologie, un homme, une femme, la reproduction. Mais le nouveau programme scolaire de sciences de la vie et de la Terre (SVT)* fait appel à la sociologie. Applicable à la rentrée de septembre 2011 dans les classes de première des séries L et ES, ce sera « l’occasion d’affirmer que si l’identité sexuelle et les rôles sexuels dans la société avec leurs stéréotypes appartiennent à la sphère publique, l’orientation sexuelle fait partie, elle, de la sphère privée ». Pas de quoi fouetter un chat ! Pourtant 80 députés de la majorité ont demandé mardi 30 août à Luc Chatel le retrait de nouveaux manuels scolaires élaborés dans la foulée des programmes**. Les parlementaires ciblent particulièrement un passage d’un manuel (Hachette) selon lequel « le sexe biologique nous identifie mâle ou femelle mais ce n’est pas pour autant que nous pouvons nous qualifier de masculin ou de féminin » , l’identité sexuelle étant « construite tout au long de notre vie, dans une interaction constante entre le biologique et le contexte socioculturel ». Les parlementaires ont tort, ils ne sont que d’affreux réac ignorant l’évolution de nos connaissances sur les interactions biologiques et sociales.

Les professeurs de sciences économiques et sociales (SES) enseignent les interactions dès la seconde. On apprend qu’on ne naît pas femme, on le devient (Simone de Beauvoir). On apprend que l’amour maternel n’est pas un instinct (Elisabeth Badinter). On apprend que dans le mariage, qui se ressemble s’assemble… Dans le nouveau programme***, il s’agit plus généralement d’expliquer comment nous devenons des acteurs sociaux et comment expliquer les différences de pratiques culturelles. Un extrait du livre de Simone de Beauvoir, Le deuxième sexe (1949), peut même être lu avec profit par les parlementaires de droite  : « Aucun destin biologique, psychique, économique, ne définit la figure que revêt au sein de la société la femlle humaine ; c’est l’ensemble de la civilisation qui élabore ce produit intermédiaire entre le mâle et le castrat qu’on qualifie de féminin. Seule la médiation d’autrui peut constituer un individu comme un Autre » (Hatier 2010 p.143)

Nos jeunes savent déjà qu’il y a des hétérosexuels, des homosexuels, des bisexuels, des transsexuels et même des travestis. Ils n’en font pas un drame. Les propos de Bernard Accoyer, le président UMP de l’Assemblée nationale, ne peuvent que les perturber : « Il faut rester sur les vérités scientifiques et se garder lorsqu’on est dans des livres de sciences de dériver sur des questions de société ». Oui, monsieur Accoyer, la sociologie est aussi une science, comme l’éthologie et l’ethnologie. Pour que nos enfants s’y retrouvent dans la vie, il ne faut plus séparer les sciences de la nature et les sciences de l’homme car tout est interdépendance. Les sciences de la Vie et de la Terre et les sciences économiques et sociales doivent marcher la main dans la main, comme un couple durable qui sait comment harmoniser le masculin et le féminin…

* texte publié au Journal officiel le 28 août 2010

** Le MONDE du 1er septembre 2011, Contre la « théorie du genre » au lycée, l’UMP se mobilise

*** BO du 29 avril 2010

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