L’écologie politique a besoin d’unE leader charismatique, honnête et sans ambition personnelle. Cécile Duflot aurait pu être celle-là. Secrétaire nationale des Verts puis d’Europe Écologie (EELV) pendant six ans, de 2006 à 2012, elle avait réussi à imposer une certaine cohérence dans un parti éclaté. Nous aurions voulu lui faire confiance, mais nous ne savons vraiment pas où elle situe le message écolo.
Cécile est connue des médias et donc de la population pour ses déclarations sur la dépénalisation du cannabis, le mariage pour tous, la défense des Roms, mais pas sur une déclaration spécifiquement écologique. Cécile est politiquement connue pour sa danse du scalp autour du Parti socialiste : un pas au-dedans, un pas au dehors, un pas au-dedans… Rappelons sa phrase quand elle était encore au gouvernement : « à la conférence Climat de 2015, nous ne serons pas comme à Copenhague dans la rue pour manifester mais près du cœur de « la ou ça se décide » avec le rôle particulier de Pascal Canfin. » Cécile est connue au niveau interne du parti par son discours répétitif a toujours plus d’unité… autour d’elle. Son discours avant le vote des motions d’orientation au congrès de Caen (novembre 2013) avait été surréaliste : « Se diviser, c’est ne pas parler à la société, se rassembler, c’est ce qu’il nous faut. » Elle estimait dans la foulée que « la tentation de confort de la minorité » était un renoncement à l’action ! Mais Cécile est surtout connue pour sa stratégie actuelle du gauche-gauche. En partant de son ministère du logement, Cécile avait déclaré : « Je me mets à la disposition de la gauche. » Son livre, De l’intérieur (Voyage au pays de la désillusion), n’est qu’un recueil d’anecdotes uniquement faites pour montrer que Cécile garde une opinion « de gauche ». La recension du MONDE se terminait ainsi : « Si ce livre a le mérite de la franchise, il a aussi ses limites. On le referme sans que des perspectives d’avenir aient été tracées. Un peu court pour celle qui entend désormais incarner l’alternative à gauche. » On retrouve Cécile au meeting de soutien à Syriza aux côtés des deux chefs de file du Front de gauche et de socialistes « frondeurs », elle répète qu’il ne faut pas d’austérité. Où est donc le message écolo ?
Nous ne pouvons pas savoir si Cécile Duflot peut porter le message des écologistes ; il faut se contenter de ses postures médiatiques que même LE MONDE* a du mal à déchiffrer : « Hors de question, donc, de se jeter dans les bras de Jean-Luc Mélenchon ou de qui que ce soit d’autre. « Il faut renifler et sentir ce qui se passe », assure-t-elle. L’affirmation de la disponibilité de Jean-Luc en vue de 2017 ne lui a pas plu. « Dire que je serais devenue la gauchiste anti-PS après avoir été celle qui se serait vendue pour un accord avec les mêmes, ça n’a pas de sens, juge-t-elle. La députée de Paris compte participer à un meeting commun avec Claude Bartolone et se rendre en Isère pour soutenir l’attelage EELV-Parti de gauche-société civile. Il est vrai que la question des alliances occupe en ce moment l’actualité du parti jusqu’à l’excès. » Cécile renifle, mais elle ne sent plus rien.
Daniel Cohn-bendit avait un jour évoqué à son sujet « l’insoutenable légèreté de l’arrivisme ». Sur mediapart une tribune des « Ecologistes atterrés » (signés par des membres d’EELV) résume la situation : « A ma droite derrière Jean-Vincent Placé, l’écologie qui s’accroche à un PS à la dérive… A ma gauche, l’énergie sautillante de l’écologie « frondeuse » de Cécile Duflot, tournée vers les frondeurs du PS… Ces deux postures n’ont rien de politique. Définir l’écologie politique par rapport au Parti socialiste, c’est s’enfermer collectivement dans la logique mutilante de la dictature majoritaire imposée par la Ve république… Alors comment sortir de ce circus politicus pour renouer avec la société réelle et tous les écologistes du quotidien, celles et ceux qui expliquent simplement que l’intérêt général est de défendre la nature, la faune, la flore et les êtres humains qui en font partie plutôt que des grands projets inutiles et imposés (aéroports, lignes ferroviaires, barrages, centrales nucléaires, etc.) ? »
Europe Ecologie Les Verts ne sait plus ce qu’il faudrait faire, et pourtant la planète brûle. Dominique Voynet souhaite refonder EELV sur une ligne d’autonomie** : « Après la prise de pouvoir de Cécile Duflot et Jean-Vincent Placé, nous assistons aujourd’hui en spectateurs impuissants à leurs déchirements, sommés de choisir entre deux lignes incompatibles qui sont assises essentiellement sur des choix personnels. Cécile a décidé de quitter le gouvernement quelques mois après un congrès qui avait confirmé l’alliance avec le Parti socialiste. La question des alliances a toujours pris beaucoup de place mais le débat se limite aujourd’hui à des spéculations tactiques. Le fait qu’un grand nombre de figures historiques de l’écologie politique aient quitté le parti a renforcé le poids relatif des élus et collaborateurs d’élus, qui sont l’essentiel des responsables d’EELV… Il y a aujourd’hui plus d’écologistes en dehors d’EELV que dans le parti… Ceux qui font l’écologie de terrain ne sont pas sûrs de trouver les bonnes solutions chez nous. Nous devons faire un Grenelle de l’écologie politique. » C’est pas gagné dans un parti qui court après les postes ou se noie dans des débats sans fin en oubliant ses fondamentaux.
* LE MONDE du 5 février 2015, Cécile Duflot : la stratégie des deux fers au feu
** LE MONDE du 14 février 2015, Dominique Voynet : « Il y a plus d’écologistes en dehors d’EELV que dans le parti »