objection de conscience et religion

Il en est de la conscience des choses comme pour tout le reste : les humains peuvent penser une chose ou son contraire, en toute bonne conscience. Ainsi l’objecteur de conscience est défini très officiellement comme « celui qui refuse d’accomplir son service militaire ». Cette démarche est bonne, si tout le monde était objecteur de conscience, il n’y aurait plus d’armées, il n’y aurait plus de guerre. Mais LeMonde du 22 juillet utilise cette expression d’objecteur de conscience pour qualifier tous ceux qui en Espagne n’appliquent pas la loi sur l’interruption volontaire de grossesse. L’archevêque de Burgos appelle ses ouailles à la désobéissance civile. Des régions autonomes ont décidé de ne pas appliquer la loi. L’objection de conscience est l’argument généralement mis en avant dans toute l’Espagne pour justifier le faible nombre d’IVG dans les hôpitaux publics. Etc.
Autant la lutte contre la militarisation de la société se comprend, autant une telle attitude des autorités religieuses et publiques ne se conçoit pas. Faire des enfants non désirés constitue un drame familial. Ne pas réguler les naissances c’est faire de la guerre un infanticide différé. Le « droit à la vie », le « Tu ne tueras point » ne sont que slogans religieux qui n’ont pas empêché les Eglises d’appeler aux guerres de religion. Le refus du service armé, ainsi que du serment à l’empereur avait constitué la position officielle de l’Eglise jusqu’en 314, date du Synode d’Arles. Depuis le ralliement à l’empereur Constantin, les Eglises sont unanimes à reconnaître, en cas de conflit entre un citoyen et l’Etat, une présomption de droit en faveur de ce dernier. Le temps a passé, des centaines d’années de guerres et de souffrances. Seuls quelques mouvements isolés comme les Anabaptistes ont préservé une réelle objection de conscience. Si l’Eglise réformée de France affirma en 1948 la légitimité de l’objection de conscience et réclama un statut pour les objecteurs, il fallut attendre le concile Vatican II pour voir l’Eglise catholique se pencher sur ce problème. Et encore, la recommandation adoptée déclarait simplement qu’il semblait « équitable que les lois pourvoient humainement au cas des objecteurs de conscience ».
En résumé, l’Eglise catholique se pose un cas de conscience en matière d’avortement et lutte contre une loi espagnole démocratiquement promulguée, mais ne s’est jamais posé de cas de conscience en faveur de ceux qui veulent une société pacifique et désarmée. L’obscurantisme religieux est le plus terrible car il repose sur un acte de foi, non sur un raisonnement élaboré en toute conscience.

6 réflexions sur “objection de conscience et religion”

  1. Je rêve d’une Biosphère où l’objection de croissance permettrait à chacun de nous d’être amoureux de la Nature. « A condition de bien lire, même un journal croissanciste comme LeMonde peut alimenter mon rêve. »
    La REALITE peut alimenter notre rêve, Martin.
    Les anciens terrains mlitaires en sont la preuve indubitable …/…conçus initialement pour les entraînements, les jeux de guerre,ils sont devenus au fur et à mesure des réserves incontestables au niveau de la faune, avi faune et flore. En marchant sur ces friches, ces savarts champenois, en laissant aller notre regard nous ne rêvons plus, nous sommes directement confrontés à la vie, à la couleur…les papillons flirtent avec les plantes mellifères, les lézards se dorent au soleil pendant que les hommes rêvent à supprimer ces espaces pour les transformer en ZAC, en terrains fonciers…/…
    C’est la NATURE qui alimente notre rêve et ce sont les hommes qui nous poussent à militer pour préserver ces zones singulières.
    Je vous invite à faire un petit tour sur notre blog : http://moinault.unblog.fr/ via le site de notre pétition :http://139.lapetition.be/.

  2. @ Jérome
    Il faut savoir que la conscription en France est suspendue et non abolie. Il en est donc de même pour le statut d’objecteur. Nous savons aussi qu’une mobilisation générale armée ne crée pas obligatoirement la victoire ; LeMonde du 20 juillet, « Carnets de déroute », montre que l’existence d’une armée ne protège pas obligatoirement contre la défaite et ses conséquences néfastes.
    Nous espérons par ce complément d’analyse échapper ainsi à notre simplisme ordinaire.

    @ Jean-Claude Defaux
    La guerre contre le nazisme devait d’abord être une lutte du peuple allemand lui-même. On n’échappe pas à la guerre en construisant une armée, mais en éliminant les causes de guerre, à commencer par la passivité d’une population face à la militarisation de sa propre société.

  3. @ Jérome
    Il faut savoir que la conscription en France est suspendue et non abolie. Il en est donc de même pour le statut d’objecteur. Nous savons aussi qu’une mobilisation générale armée ne crée pas obligatoirement la victoire ; LeMonde du 20 juillet, « Carnets de déroute », montre que l’existence d’une armée ne protège pas obligatoirement contre la défaite et ses conséquences néfastes.
    Nous espérons par ce complément d’analyse échapper ainsi à notre simplisme ordinaire.

    @ Jean-Claude Defaux
    La guerre contre le nazisme devait d’abord être une lutte du peuple allemand lui-même. On n’échappe pas à la guerre en construisant une armée, mais en éliminant les causes de guerre, à commencer par la passivité d’une population face à la militarisation de sa propre société.

  4. JEAN-CLAUDE DEFAUX

    ce qui me frappe souvent dans les contributions (texte originel ou commentaires) c’est qu’elles sont souvent sous-tendues par un pré-supposé idéologique (pardon, le mot est trop fort). quand acceptera-t-on de débattre posément, sincèrement. Je suis pour les lois qui autorisent l’interruption volontaire de grossesse mais toutes ces vies abolies, quelle tristesse, car ce sont toujours des drames personnels qui y conduisent. quant à la guerre, comment ne pas la mener contre le nazisme, par exemple?

  5. Que de simplisme !

    Sur le fond, le problème est de vouloir à tout prix comparer terme à terme deux situations distinctes, l’une que vous considérez comme bonne (refuser de faire la guerre, avec au passage un certaine naïveté : le problème des objecteurs de conscience se pose avec une armée de conscription, mais lorsque l’on a affaire comme aujourd’hui, en France, à une armée professionnelle, l’existence des objecteurs de conscience est réduite à néant — et en cas de guerre généralisée impliquant la mobilisation de la population, être objecteur de conscience peut aussi constituer une position idéaliste menant à la défaite d’un pays et d’éventuels maux supplémentaires pour la population vaincue et asservie), et la deuxième position que vous considérez comme intrinsèquement mauvaise, la lutte contre l’avortement, et que vous condamnez précisément à l’aune de l’objection de conscience.
    Mais on pourrait aussi vous rétorquer dans ce cas qu’accepter de voir 250000 vies supprimées chaque année est un mal bien plus grave que les guerres que nous n’avons plus sur notre continent.
    L’idéalisme et la protection de la vie à tout prix peuvent aussi bien conduire à refuser de tuer dans des guerres qui peuvent pourtant être une légitime défense, que de refuser de supprimer des vies innocentes dans des proportions qui seraient, dans toute autre circonstance (guerre, épidémie), jugées tout bonnement catastrophiques : imaginez une épidémie qui tue un enfant sur quatre à la naissance. La grippe A, à côté, c’est un simple rhume.

  6. Que de simplisme !

    Sur le fond, le problème est de vouloir à tout prix comparer terme à terme deux situations distinctes, l’une que vous considérez comme bonne (refuser de faire la guerre, avec au passage un certaine naïveté : le problème des objecteurs de conscience se pose avec une armée de conscription, mais lorsque l’on a affaire comme aujourd’hui, en France, à une armée professionnelle, l’existence des objecteurs de conscience est réduite à néant — et en cas de guerre généralisée impliquant la mobilisation de la population, être objecteur de conscience peut aussi constituer une position idéaliste menant à la défaite d’un pays et d’éventuels maux supplémentaires pour la population vaincue et asservie), et la deuxième position que vous considérez comme intrinsèquement mauvaise, la lutte contre l’avortement, et que vous condamnez précisément à l’aune de l’objection de conscience.
    Mais on pourrait aussi vous rétorquer dans ce cas qu’accepter de voir 250000 vies supprimées chaque année est un mal bien plus grave que les guerres que nous n’avons plus sur notre continent.
    L’idéalisme et la protection de la vie à tout prix peuvent aussi bien conduire à refuser de tuer dans des guerres qui peuvent pourtant être une légitime défense, que de refuser de supprimer des vies innocentes dans des proportions qui seraient, dans toute autre circonstance (guerre, épidémie), jugées tout bonnement catastrophiques : imaginez une épidémie qui tue un enfant sur quatre à la naissance. La grippe A, à côté, c’est un simple rhume.

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