Philippe Bihouix vient de publier « L’âge des Low Tech ». Il présente son point de vue dans la dernière parution de « L’Ecologiste »*. Nous vous donnons quelques extraits :
« Si l’imagination fertile des êtres humains n’a pas de limites, les équations de la physique, elles, sont têtues. Plus on est high-tech, moins on fabrique des produits recyclables et plus on utilise des ressources rares dont on finira bien par manquer. Il est absurde de croire que les solutions technologiques pourront être déployées à la bonne échelle. Ainsi l’ensemble des résidus agricoles de la planète ne suffirait pas à couvrir notre seule consommation de plastiques… Il faut donc se tourner vers les basses technologies. D’abord réfléchir à nos besoins. Avant d’apprendre à se passer des automobiles, brider la puissance des moteurs, alléger le poids. Concevoir des objets plus simples, privilégier le mono-matériau, réduire le contenu électronique (la cafetière italienne contre la machine à expresso) et mettre en place un réseau de récupération, réparation, revente, partage des objets du quotidien, outils, jouets, appareils ménagers… Sur cette Terre, tout a un impact. Il n’y aura jamais de voiture « propre », quand bien même son énergie serait « zéro émissions ». C’est donc dans la tempérance qu’il faut chercher le salut… »
Mais LE MONDE croit encore à la croissance économique et à un avenir technologisé. Ainsi cet article ambigu sur « la nouvelle vague des agrocarburants** : « A Emmetsburg, au beau milieu d’immenses champs de maïs, débute ce qui pourrait bien être une nouvelle révolution industrielle. On ouvre l’une des toutes premières usines au monde de bioéthanol de nouvelle génération. Celle-ci fonctionnera à partir de tiges, de feuilles ou encore d’écorces, alors que les unités actuelles utilisent la partie comestible de la plante (maïs, blé, etc.) pour produire le carburant… Largement soutenus par les pouvoirs publics, les biocarburants de première génération ont déjà conquis une place imposante : aux Etats-Unis, 40 % du maïs cultivé est désormais transformé en éthanol. Avec la deuxième génération de biocarburants, plus question de concurrence avec les usages alimentaires des céréales. Ce double miracle, écologique et économique, reste toutefois à confirmer dans les faits. Car récupérer l’énergie contenue dans la paille de blé ou les tiges de maïs n’a rien d’évident. Leur densité en énergie étant beaucoup plus faible que celle des grains habituels, il est nécessaire pour aboutir au même résultat de traiter des quantités plus importantes avec des méthodes plus complexes…Le soutien politique durera-t-il ? »
Concluons avec Philippe Bihouix dans son livre : « Le rythme et les modalités des évolutions inéluctables font débat : effondrement, débâcle, adaptation… J’ai le sentiment que ce sera comme une lente submersion, peut-être à l’échelle d’une vie humaine. Ne négligeons pas la grande élasticité de notre consommation. En Occident, nous en avons beaucoup « sous le pied » avant de toucher les besoins fondamentaux. Les gens tailleront dans leurs loisirs, covoitureront pour aller au travail. Pas de retour violent au puits et à la bougie à craindre. Mieux vaut renoncer à sa voiture qu’aller cherche l’eau au puits. Mieux vaut enfiler un pull-over que se chauffer à la bougie… »
* L’écologiste n° 43, juillet-août-septembre 2014 (page 8)
** LE MONDE éco&entreprise du 3 septembre 2014, La nouvelle vague des biocarburants arrive