Planification publique et carte carbone

Il ne suffit pas de définir un objectif de neutralité carbone à atteindre en 2050, encore faut-il s’en donner les moyens. Réapparition du « haut-commissaire au plan » en France, Plan Biden aux Etats-Unis, Green New Deal en Europe… lidée de « planification » de l’économie par la puissance publique fait son chemin après des décennies de règne de la « loi du marché ». Du point de vue des écologistes, planifier semble nécessaire pour définir une politique globale visant à la décarbonation de l’économie. En effet la réduction drastique des émissions de gaz à effet de serre ne peut pas s’en tenir à la libre volonté des agents économiques.

Un opuscule* fait le tour du problème. Il pointe l’ampleur de la tâche à accomplir pour que les mentalités acceptent les changements majeurs nécessaires, à savoir une vraie rupture écologique. Il en va ainsi de la reconversion des cohortes de travailleurs des industries de l’énergie, de l’automobile ou de l’aéronautique, en passant par l’abandon par les économistes des canons libéraux. Le mythe selon lequel tout pourrait se régler par le « signal prix », l’État restant neutre face aux choix technologiques, nous mène à l’impasse et les générations futures au désastre. Personne actuellement ne connaît la stratégie nationale bas carbone (SNBC) édictée en 2015 et censée diriger depuis toutes les politiques publiques. Il nous faut un marqueur fort, la mise en place planifiée d’une carte carbone nous semble la voie la plus prometteuse.

Voici notre référence la plus ancienne sur la question : « Les chercheurs londoniens de la Royal Society for Encouragement of arts, manufactures & commerce (RSA) étudient la mise en place de cartes-carbones. On verserait à chaque citoyen un quota annuel d’émission de gaz à effet de serre sur un compte individuel, une unité représentant 1 kilo de CO2 (sachant que chaque Britannique en produit déjà annuellement 9,3 tonnes). Tout citoyen disposerait du même droit à polluer, les plus vertueux pourraient revendre leurs unités-carbone non utilisées. La mise en œuvre est envisageable puisque la technologie existe et que le coût serait inférieur à d’autres projets moins urgents comme la nouvelle carte d’identité. Cette mise en œuvre est d’autant plus nécessaire que le changement climatique constitue une vraie menace. Ce projet d’encadrement des pratiques personnelles est fondé puisque plus de 50 % des émissions de gaz carbonique en Europe proviennent de la consommation individuelle d’énergie, essentiellement le transport automobile et aérien, l’électricité et le chauffage domestique. Cela veut dire aussi que ce projet ne devrait pas être réservé aux Anglais, d’autres citoyens comme les Américains sont de gros pollueurs. A la mi-juillet, le secrétaire britannique à l’environnement a qualifié cette perspective de « passionnante expérience de pensée ». La Biosphère estime que ces cartes carbone devraient devenir une réalité internationale non d’ici 2020, mais l’année prochaine ! (écrit le 18.09.2006 par Michel Sourrouille) »

Pour en savoir plus, lire notre synthèse, Carte carbone, bientôt généralisée à tous

* « La planification, une idée d’avenir », « L’Economie politique », n° 89, janvier 2021, 12 euros.

5 réflexions sur “Planification publique et carte carbone”

  1. La vitesse et la précipitation , le déni de réalité, une info qui chasse l’autre, les me(r)dias qui nous amusent et nous abusent etc. Et puis nos activités diverses et variées, qui vont des plus essentielles (vitales) aux plus futiles. Voilà en effet à quoi peut se résumer notre train-train quotidien. On peut toujours le déplorer mais en attendant c’est comme ça. Ce n’est pas parce qu’on sait que tout a une fin et qu’un jour on doit mourir, que le monde va et devrait s’arrêter de tourner. En attendant il nous faut vivre.
    Carte carbone ou pas, un jour prochain c’est sûr, il n’y aura plus de pétrole. Ce qui ne changera pas grand chose au quotidien du paysan soudanais. Pour nous évidemment ce sera une toute autre paire de manches.

  2. – « La planification, une idée d’avenir » (article Le Monde)
    N’importe quoi ! Il y a un an Macron «ressuscitait» le Commissariat général du Plan. Et il en confiait la direction à Bayrou («haut-commissaire au plan» Rantanplan).
    Comme si la Planification avait un jour disparue. Alors que cette institution existe depuis 1946 et qu’elle n’a jamais disparue, elle n’a seulement fait que changer de nom et d’emballage. En quoi ça change que ce soit un plan ou une stratégie ? D’autant plus quand on n’a pas de projet. Hors-mis la Croissance bien sûr. Et ON nous raconté que ce «nouvel» outil servira à planifier une politique économique, à identifier les gisements de croissance futurs, à définir une perspective, à fixer un cap (sic) et patati et patata. N’importe quoi ! De toute façon il y a un an personne n’a écouté, Covid oblige. Et aujourd’hui c’est pareil. Personne n’en a rien à foot du plan et de la planification.

    1. Notons en passant que des plans nous n’en avons jamais eu autant. Sans compter les rantanplans, et les plans plans ou inclinés pour se promener, marcher ou skier, et des plans d’eau pour ramer, barboter, patauger etc. nous n’avons certainement jamais eu autant de plans gouvernementaux. Pour tout et n’importe quoi !
      Plan d’action pour les zones humides, Plan de gestion de la rareté de l’eau, Plan de prévention et de lutte contre l’illettrisme, Plan de lutte contre l’illectronisme (illettrisme numérique nouveau fléau), Plan national de santé publique, Plan cancer, Plan Vigipirate, Plan immigration, Plan de cohésion sociale, etc. etc. sans oublier le Plan d’actions Covid-19.
      La Planification c’est comme la Qualité, et tant d’autres choses, c’est quand on en fait le moins qu’on en parle le plus.

  3. Le modèle se réfère aux britanniques, mais au Royaume-Uni le climat est globalement homogène du nord au sud, peu de déclinaisons de climat, donc c’est déjà plus facile de mettre tous les individus sur le même pied d’égalité. Mais en France avec plusieurs micro-climats disparates du nord au sud de l’hexagone, comment constituer les barèmes ? En effet, si par exemple pour le chauffage je donne exactement le même quota à tous les individus, ça va quand même hurler sous les chaumières, car sur le pourtour méditerranéen les individus seront systématiquement vertueux pour le chauffage et il leurs restera automatiquement du crédit, tandis qu’au nord de la France et dans les Alpes Auvergne ainsi qu’à l’Est où l’on se grelotte sévère par un froid durable et humide, il est clair que tout le monde n’aura pas assez de crédit et se coltiner de violentes grippes.

    1. Comme on peut le voir, cette idée de carte carbone ne mène à rien. Si ce n’est au grand n’importe quoi. Toutefois «Les chercheurs londoniens de la Royal Society for Encouragement of arts, manufactures & commerce (RSA) étudient la mise en place de cartes-carbones.» Autrement dit ça les occupe, en attendant.
      Ton problème de chauffage selon les micro-climats peut facilement se résoudre. Justement grâce à cette fumeuse Carte carbone. Ceux qui grelottent en hiver pourront déjà revendre aux chercheurs londoniens une partie de leurs toutes aussi fumeuses «unités-carbone». Ainsi ils pourront s’acheter un gros pull et un caleçon, et ainsi ils deviendront «vertueux». Et si en plus ils ne prennent jamais l’avion, alors ils pourront en revendre encore plus pour pouvoir s’acheter du gasoil ou du super, et ainsi ils pourront rouler plus. Comme tu vois c’est super.

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