Une enquête de Laure Noualhat sur le site Reporterre (extraits)
Avec un taux de progression de 1,12 % par an, la barque humaine s’alourdit de 86 à 90 millions d’individus chaque année. Croître moins vite, c’est croître quand même. Alors qu’elle passait la barre des 7 milliards en 2011, l’espèce humaine comptera bientôt 8 milliards de congénères. Le taux de fécondité était de 5 enfants par femme en 1950, 3,2 en 1990 et va atteindre le fameux 2,1, taux auquel le remplacement des générations est assuré. Cela ne se traduira pas par un arrêt de la croissance, la population mondiale comptera encore un grand nombre d’adultes en âge d’avoir des enfants. Il y aura 2 milliards de vies humaines supplémentaires d’ici 2050 avec un pic autour des 11 milliards en 2100. Gardons en tête que les évaluations onusiennes reposent sur des hypothèses. Entre la fourchette haute et la basse publiées en 2019, il n’y a qu’un « demi-enfant ». Un demi-enfant de moins, ce sont 6,3 milliards d’humains en 2100, un demi-enfant de plus, 15,8. Ce n’est pas la même chose. Et la natalité des pays les moins développés progresse six fois plus vite que celle des pays développés.
Nous voilà face à un dilemme, notre population doit réduire son impact, la Terre n’est pas une table à rallonge. Nos émissions de CO2 ne cessent de croître, déstabilisant un système complexe de régulation air-océans-sols. Les ressources en énergies fossiles, en eau, en nourriture sont « finies ». Même des changements profonds ne permettront pas de nourrir 10, voire 11 milliards d’individus sans détruire plus d’écosystèmes.D’autant plus que 10 millions d’autres espèces ont aussi droit à des habitats et à des ressources pour survivre, vivre et se reproduire. Nous excédons les possibilités terrestres, nous atteignons « le jour du dépassement ». Pour l’université de Lund en Suède, éviter de faire un enfant supplémentaire serait le geste le plus écolo qui soit. Il permettrait d’éviter 58,6 tonnes de CO2 par an. Mieux que de supprimer la voiture (2,4 tonnes évitées seulement) ou d’arrêter la viande (0,8 tonne). L’université de l’Oregon a calculé le bilan carbone d’un bébé américain : 1 644 tonnes de CO2 émis en moyenne au cours de sa vie ; faire un enfant en Occident a une conséquence écologique quasi infinie. Alors qu’il ne faudrait pas dépasser 2 tonnes annuelles, intégrer le bilan carbone de personnes non encore nées pourrait faire des nœuds au cerveau.
Chacune de nos actions peut se traduire en bilan carbone. Or dans certaines parties du monde, l’heure n’est pas à la sobriété, encore moins à la perpétuation de la pauvreté. En Chine, la classe moyenne va atteindre près de 600 millions de consommateurs en 2030. Cela veut dire manger plus de viande, acheter plus de voitures, voyager plus souvent. De son côté, a-t-il vocation à rester pauvre ?
La croissance de la population mondiale est importante, mais n’est pas la cause la plus urgente. Les dommages résultent de la population, richesse et technologies: l’équation I=PAT. Une équation incomplète. Elle ne prend pas en compte deux aspects relatifs aux types de dommages causés par la population : 1) le géographique, s’ils sont locaux, régionaux ou globaux et 2) la dimension ou ampleur, s’ils sont réversibles, réparables ou irréversibles, irréparables. Les dommages provoqués par la population pauvre sont plutôt 1) locaux et 2) réversibles et réparables. Contrairement à la dégradation globale et irréversible des 10 % les plus riches. Impossible de comparer les dommages d’un « gringo » mangeur de hamburger à New York à celle d’un paysan du Bangladesh. Sans prend en compte ces deux variables, l’équation ne sert à rien. Presque 3 milliards de personnes sont des paysans pratiquant l’autoconsommation, l’autarcie.
Bonjour Tomas. Nous sommes d’accord, il y a urgence écologique. Donc ce n’est pas la peine de soulever de faux problème. L’équation IPAT est généraliste, elle montre de façon globale qu’il faut à la fois agir sur la démographie, l’activité économique et la technologie. C’est déjà une grande avancé si toutes les personnes savaient cela. Au delà on peut complexifier l’approche à l’infini, la temporalité, la territorialisation, l’irréversibilité, etc. En fait tu veux démontrer la responsabilité des riches et l’empreinte écologique minimale des pauvres.
Mais alors rentrons dans le détail, comment mettre en place « sobriété partagée », faut-il définir un revenu maximum autorisé, les paysans qui viennent échouer dans les bidonvilles parce qu’ils ont échoué dans leur autarcie ne sont-ils pas de trop, etc. etc.
– « Nous sommes d’accord, il y a urgence écologique. Donc ce n’est pas la peine de soulever de faux problèmes. » (Biosphère)
Des faux problèmes ??? Mais justement tout le PROBLÈME est là !
Sans parler d’IPAT… COMMENT agir à la fois sur la démographie, l’activité économique et la technologie ?
Mais alors rentrons dans le détail… comment mettre en place « sobriété partagée »… faut-il définir un revenu maximum autorisé, etc. etc.
En attendant, nous ne faisons que tourner en rond.
Oui, c’est ça, démontrer la responsabilité des riches. Et que nous ne sommes pas tous égaux devant les dommages écologiques. Si les données d’Oxfam sont correctes, c’est-à-dire, les 10 % les plus riches de la population mondiale sont responsables de 52 % des émissions de CO2 cumulées, tandis que les 50 % les plus pauvres sont responsables de 7 % des émissions de CO2 cumulées, dans ce cas, même si le taux de natalité des 50 % les plus pauvres décline rapidement à zéro, les émissions de GES maintiendront sa trajectoire ascendance. C’est vrai, 9 milliards d’humains, c’est trop. Peut-être sommes nous devant une équation sans solution. Ce n’est pas un faux problème, mais plutôt un gros pépin insurmontable.
– « Peut-être sommes nous devant une équation sans solution. Ce n’est pas un faux problème, mais plutôt un gros pépin insurmontable.» (TOMAS TT)
Oui, c’est ça. Ce n’est même pas peut-être, c’est bien une équation sans solution. Partant de là, il n’y a que deux solutions. Disons plutôt deux attitudes. Soit on se dit que c’est un problème… un gros problème, un gros pépin insurmontable… Soit on se dit que s’il n’y a pas de solution, c’est qu’il n’y a pas de problème.