Jouer l’autruche en baissant les prix de l’essence à court terme ne peut que conduire à une catastrophe. Les factures ne sont soutenables que tant que les prix sont limités. Mais lorsque les prix augmentent, le piège se referme. Les promesses de réduction de fiscalité, d’une part, ou de blocage des prix de l’essence, d’autre part, font florès. Funestes erreurs qui ne feraient qu’empirer le mal.
collectif 1: « La baisse des prix conduit inexorablement à une hausse structurelle de la demande, et donc à une aggravation de la situation, tant environnementale que sociale. Certes, si les Français dépensent 44 milliards d’euros de carburants, c’est qu’ils en ont besoin. Mais ce besoin est le résultat d’un aménagement du territoire et d’une organisation sociale, qui eux-mêmes sont le résultat d’une mobilité toujours plus rapide et moins chère. Une heure de smic permet d’acheter quatre fois plus d’essence en 2020 qu’en 1960. Le mouvement global a encouragé la mobilité : des voitures démocratisées, un réseau routier gratuit développé, etc. En conséquence, les distances parcourues ont augmenté d’un facteur 10 en deux siècles, causant étalement urbain, périurbanisation, éparpillement… Investir dans l’efficacité et la sobriété est une vraie réponse… »
Le débat entre écologistes
Michel SOURROUILLE : Chaque fois que vous prenez votre voiture pour le week-end, la France doit vendre un revolver à un pays pétrolier du Tiers-Monde. Sait-on que si tous les habitants du globe consommaient autant de pétrole que les Américains, les réserves prouvées ne tiendraient guère plus d’un an ? Pour faire 10 000 km, on consacre 150 heures à sa voiture (gain de l’argent nécessaire à l’achat et à l’entretien, conduite, embouteillage, hôpital). Cela revient à faire 6 kilomètres à l’heure, la vitesse d’un piéton. Le type de société que je propose est une société à basse consommation d’énergie. Cela veut dire que nous luttons par exemple contre la voiture individuelle. Nous demandons l’arrêt de la construction des autoroutes, l’arrêt de la fabrication des automobiles dépassant 4 CV… (René Dumont, son programme lors de la présidentielle en 1974)
Franchab : Le dogme « moins c’est cher, mieux c’est » conduit a minima à du gaspillage, quel que soit le produit considéré : carburant, électricité, données mobiles pour nos portables… Je passe une partie de l’année en pleine campagne. Mes voisins vont au village faire leurs courses. Certains se garent devant la boulangerie, puis reprennent leur voiture pour aller chez le boucher (à 200m), puis la reprennent pour aller à la pharmacie (150m),… Chacun va faire ses propres courses, bien sûr. Quitte à retrouver un voisin à la pharmacie.
MING : Relativiser le poids de la France dans l’émission globale des gaz à effet de serre ou prôner les libertés individuelles pour justifier de ne rien faire me scandalise. La sobriété n’a pas qu’un but écologique mais également de bien être. Hier, à vélo, sur la côte varoise il y avait longtemps que je n’avais pas subi autant de nuisances automobiles : bruit, échappements, taille énorme de bcp de véhicules… c’était invivable.
Corentin : Le problème est que si on touche à la voiture, on a une révolution sur les bras, sur laquelle surfe sans vergogne le populisme (d’extrême-droite en particulier).
NFGS : D’une façon générale, je me demande bien comment résoudre la contradiction de la priorité au pouvoir d’achat et à la sauvegarde de la planète…
Ysé2 : La planète va se charger de résoudre la contradiction !
En savoir plus grâce à notre blog biosphere
Prix de l’essence, des socialistes sans boussole
extraits : En définitive, le problème du socialisme, c’est le terme social. Le social passe pour le gouvernement avant les réalités écologiques, ce qui ne peut qu’amener à de fausses promesses et des désillusions. Pour retrouver une boussole, les socialistes devraient affirmer que l’économie n’est qu’une sous-partie du social, et le social une variable déterminée par les contraintes écologiques, à commencer par l’état des ressources naturelles. A quand la taxe carbone que les socialistes hors du pouvoir avaient dénommé contribution énergie ?
Le prix de l’essence n’augmente pas, dommage !
extraits : Baisser le prix de l’essence va à l’encontre des fondamentaux : une ressource qui se raréfie (le pétrole) devrait augmenter sans cesse et de plus en plus vite au moment où on s’approche des limites de l’épuisement. En 2005, l’institution financière Ixis CIB notait que si le prix du pétrole avait augmenté depuis 1974 au rythme optimal d’une ressource épuisable, il vaudrait déjà 122 dollars en 2005 (alors qu’il ne cotait que 66,6 dollars). Le même organisme évoquait la possibilité d’un cours du baril à 360 dollars en 2015. Le pétrole le moins cher et le plus propre est celui qu’on ne brûle pas. Un gouvernement responsable devrait planifier une augmentation de 10 % du prix de l’essence chaque année (doublement tous les 7 ans) pour que les consommateurs de carburant anticipent le choc pétrolier qui peut arriver d’un moment à l’autre et commencent à adapter leur modes de déplacements.
Module sur le pic pétrolier… à diffuser
Voici une séance de formation à l’enjeu pétrolier qui pourrait faire le buzz grâce à vos relais, chers lecteurs.
A) Commencer par un sondage dans l’assistance avec 3 choix personnels possible :
1. baisser ou stabiliser le prix du carburant (c’était la méthode F.Hollande en 2012)
2. accepter une hausse (minime) de prix
3. programmer dans le temps une forte hausse avec intervention de l’Etat
Le résultat montre que la presque totalité du groupe sondé va choisir l’option 1. Il faut donc une démonstration argumentée sur le baril d’or noir.
B) le prix du pétrole
B1) Présenter les différentes manières de fixer le prix de l’essence :
– prix du marché pétrolier, mécanisme de l’offre et de la demande (vision à court terme) : prix actuellement bas.
– prix correspondant au coût de l’extraction (moyen terme) : entraîne une hausse progressive.
– prix correspondant à la rareté croissante (long terme) : une forte hausse est inéluctable.
B2) Faire un graphique montrant que le prix grimpe de manière exponentielle quand on arrive à la barre verticale symbolisant la fin du pétrole conventionnel (en 2050 environ). Indiquer ce qu’est un choc pétrolier (1973, 1979, 2008), c’est à dire une variation conjoncturelle du prix à fort impact sur le PIB (choc pétrolier).
C) les quantités de pétrole
C1) Faire un graphique montrant le pic du pétrole conventionnel en 2006 (la quantité). Cette date indique le moment où la difficulté de pomper davantage de pétrole entraîne une baisse des quantités extraites.
C2) Présenter les différentes actions sur les quantités. Actuellement le pic pétrolier ne se fait pas encore sentir car :
– on utilise le pétrole non conventionnel (sables bitumineux, pétrole de schiste, off-shore profond)
– on fait appel aux agrocarburants, à la liquéfaction du charbon, au méthane ou à l’hydrogène
– on utilise des sources d’énergie alternatives comme les voitures électriques (nucléaire, éolien, photovoltaïque, etc.)
– on espère un saut technologique (4ème génération du nucléaire, ASTRID, ITER, agrocarburants de 3ème génération, etc.)
D) relations entre prix et quantités
D1) Une hausse de prix entraîne une hausse des quantités, ce qui fait que le pic pétrolier n’est pas un sommet, mais un plateau ondulant. La fin du pétrole est donc repoussée d’année en année (depuis cinquante ans, on annonce chaque année qu’il n’y aura plus de pétrole dans 50 ans).
D2) Mais ce système a une fin inéluctable, la merde du diable est une ressource non renouvelable. Persévérer dans l’extraction entraîne des inconvénient technologiques croissants : compétition entre agrocarburants et ressources alimentaires, fortes pollutions des ressources fossiles non conventionnelles, échec de certaines technologies (surgénérateur)… Sans compter le réchauffement climatique entraîné par la combustion du pétrole.
Conclusion
Théoriquement, plus rapidement on préparerait la sortie des énergies fossiles, plus la transition énergétique serait facile. Un mouvement politique responsable aurait indiqué qu’une augmentation du carburant de 10 % chaque année (doublement de prix en 7 ans) était nécessaire. Il fallait préparer les citoyens à la civilisation de l’après-pétrole. Mais nous n’avons pas compris les leçons des chocs pétroliers des années 1970, nous n’avons rien fait pour économiser le pétrole, le choc pétrolier ultime qui se profile sera d’autant plus brutal. Nous serons confrontés à des guerres et violences pour l’accès aux ressources. Certaines analyses du complexe militaro-industriel l’envisagent déjà.
Comme Il est maintenant trop tard politiquement pour mettre en place une taxe carbone conséquente, nous allons inéluctablement vers un rationnement par l’instauration d’une carte carbone pour chaque personne. Pour une acceptation sociale de la pénurie à venir, une incitation psychosociologique devrait être mis en place, appel à l’effort des citoyens, à la sobriété énergétique dans tous les domaines. Cet exercice que nous venons de faire (avec vous) peut contribuer à la prise de conscience.
Ouverture du sujet : à qui appartient le pétrole qui est sous terre ? A l’émir de tel ou tel pays arabe ? A la multinationale qui exploite les gisements ? Au consommateur final qui paye son essence ? Ou bien aux générations futures ? La question était piégé, le pétrole appartient à la Terre. La lutte contre le réchauffement climatique impose de laisser sous terre les énergies fossiles qui sont source de gaz à effet de serre. Forer pour atteindre une ressource non renouvelable bien cachée dans ses entrailles constitue un viol de notre Terre-mère.
1liste des signataires : Christian de Perthuis, fondateur de la chaire Economie du climat ; Hélène Gassin, présidente de l’association NégaWatt ; Patrice Geoffron, membre du conseil scientifique de l’Alliance pour la décarbonation de la route ; Thomas Matagne, président et fondateur d’Ecov.
@ Michel Sourrouille : Le monde a changé depuis 1974… Vivre et travailler toute sa vie dans un rayon de 15mn autour de chez soi, ressemble beaucoup à une assignation à domicile. Non merci !
Certes le monde a changé depuis 1974… Toutefois, même dans ces années là notre rayon d’action dépassait largement les 15 minutes. J’en ai connu plus d’un qui le matin pour aller bosser faisaient 15 voire 30 km à vélo, par tous les temps. Et autant le soir pour rentrer à la maison. Moi j’avais la chance d’avoir le boulot à tout juste quelques minutes, et donc de n’en faire que 4 X 4. C’est ainsi que la petite famille pouvait partir en vacances.
En bagnole SVP ! Oh pas une grosse, ni très loin, mais quand même !
Certes des vacances en camping, mais quand même !
Aujourd’hui tout ça c’est impensable, inimaginable… IMPOSSIBLE dira-t-ON !
Aujourd’hui si ON ne prend pas l’Avion… Non merci ce ne sont pas des vacances !
Aujourd’hui ON a «besoin» de la Bagnole (parfois la Porc Cayenne) pour aller à la salle de sport à 1 ou 2 km, pour pédaler sur un vélo immobile.
Et ON pleure parce que l’essence est trop chère. Misère misère !
La Planche, certes le monde a changé depuis 1974, mais en pire. Les émissions de gaz à effet de serre ont entraîné le réchauffement climatique, les réserves de pétrole conventionnel s’épuisent, on exploite les sables bitumineux et pratique la fracturation hydraulique constituent nos dernières gouttes d’un pétrole très sale. On croît maintenant aux véhicules électriques, mais l’électricité il faut la fabriquer et en plus ça ne se conserve pas. Alors oui, nous serons un jour obligés de vivre dans un rayon de 15 mn (en vélo) autour de soi. On reviendra bien avant les années 1974, au temps de mon enfance où on ne connaissait pas les tracteurs, on ferrait les bœufs pour travailler dans les champs.
Pas d’inquiétude à avoir, on sait déjà limiter nos déplacements, la période de confinement a été un bon entraînement…
Bien sûr… quel écolo (ON en est TOUS) pourrait-il ne pas être d’accord avec tout ça ?
MAIS (il y a toujours un MAIS) pour autant, combien d’entre eux seront-ils POUR une forte hausse du prix de l’essence ? Mis à part, peut-être… les (mal)heureux possesseurs d’une Porc Cayenne.
Mais comme là encore il y a Cayenne ET Cayenne… je me dois de préciser. La conso de ce genre de caisse, équipée d’un moteur hybride… est donnée pour un peu plus de 3 litres/100km.
Si je compare aux 12 ou 14 litres/100 des versions «normales»… je rigole à l’idée de cette FORTE hausse du prix de l’essence. Mais de combien au juste ? Si c’est par 3 ou par 4 qu’ON doit multiplier… alors peut-être (même pas sûr), que les (mal)heureux possesseurs d’une Porc Cayenne à moteur «normal» se décideront à passer à l’Hybride. Pour éviter la Catastrophe. 🙂
– « D’une façon générale, je me demande bien comment résoudre la contradiction de la priorité au pouvoir d’achat et à la sauvegarde de la planète… » (NFGS)
Tant que nous continuerons à résonner (et non pas raisonner) dans le cadre du Système, nous nous heurterons inévitablement à ce genre de contradiction.
Et nous ne ferons que tourner en rond, comme des cons !
Je l’ai dit et redit X fois, et donc je le re-redis, c’est d’une Décolonisation des imaginaires dont nous avons cruellement besoin ! Maintenant s‘il y en a qui ne comprennent pas le sens de l’expression, c’est LEUR problème ! Mais qu’ils arrêtent alors d’en voir là où il n’y en a pas forcément.