Missive au courrier des lecteurs (Lemonde, 17 mars 2005) : Bientôt un baril hors de prix
Pendant des années, les « spécialistes » du pétrole nous ont répété que le pétrole devait rester en dessous de 30 dollars le baril. Il est vrai que l’entente tacite entre occidentaux et Emirats avaient fixé une fourchette de fluctuation entre 22 et 28 dollars (le Monde du 9 mars) dans l’intérêt bien compris des consommateurs et des producteurs. Il est vrai qu’on nous explique encore aujourd’hui que le marché est bien approvisionné et qu’un renchérissement des cours pénaliserait les pays en voie de développement.
Les « spécialistes » et même l’Agence internationale de l’énergie nous endorment ainsi de paroles illusoires depuis trop longtemps alors que les réserves de pétrole ne peuvent durer beaucoup plus de quarante années (2050, c’est demain) et que les pays émergents ont de plus en plus soif de pétrole. Or la rareté croissante, c’est obligatoirement la montée des prix. Mais le marché ne vit qu’à court terme et ses serviteurs zélés (et bien payés) nous ont empêché de mettre en place, dès hier et avant-hier, une augmentation progressive et constate du baril de façon concertée et équitable. Ils nous ont donc précipités dans une société structurée par des déplacements individuels toujours plus longs, ce qui rend extrêmement difficile tout changement d’orientation : plus nous attendons, plus les réveils seront terribles.
Ces faux analystes, qu’ils soient consultants, directeur exécutif de l’AIE ou président de l’OPEP sont des dangers publics : on ne peut plus rêver, il faut se réveiller.