Protectionnisme contre l’absurde Mercosur

Rappelons qu’un libre-échange basé sur le va-et-vient de produits quasi-similaires est une absurdité. Un jour lointain, Fritz Schumacher vit un camion à l’effigie d’une marque de biscuits écossais entrer dans Londres ; peu après il apprit qu’une entreprise fabriquant des biscuits à Londres acheminait sa production jusqu’en Écosse. Cette découverte le troubla profondément. En tant qu’économiste, il ne parvenait pas à comprendre pourquoi des être compétents se voyaient contraints de conduire un camion d’un bout à l’autre des îles britanniques dans le seul but de transporter des biscuits. N’était-ce pas absurde ? Le coût humain et environnemental d’une tel manœuvre n’avait donc alerter personne ? Schumacher eut beau tourner et retourner le problème dans sa tête, il faut incapable d’y déceler la moindre logique. Et il n’y a pas que les biscuits qui sont ainsi transportés sans raison d’une région ou d’un pays à un autre.

Notre monde en 2024 n’est toujours pas avare d’absurdités en tous genres, et le libre-échange est toujours mis en avant par nos élites libérales.

Virginie Malingre : La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, signe l’accord de libre-échange entre l’Union européenne (UE) et le Marché commun du Sud (Mercosur) – composé de l’Argentine, du Paraguay, du Brésil, de l’Uruguay et de la Bolivie. Emmanuel Macron juge que le texte est inacceptable tant qu’il n’intègre pas l’accord de Paris sur le climat, l’instauration de mesures miroirs, l’obligation faite aux pays du Mercosur de ne pas pratiquer de déforestation, celle d’une réciprocité dans l’accès aux marchés publics, la protection des filières agricoles… La France peut compter sur le soutien de Varsovie et de Vienne, mais cela ne lui assure pas la minorité de blocage nécessaire (au moins quatre pays représentant au moins 35 % de la population). Une fois l’accord conclu avec les dirigeants du Mercosur, la Commission devra le soumettre au vote des capitales et des eurodéputés. A ce stade, « le contenu final de l’accord négocié n’a encore été présenté à aucun Etat membre »….

Le point de vue des écologistes

Remplacez « CETA » par « Mercosur », et vous comprendrez pourquoi la transition écologique bat de l’aile !

 Le CETA (Comprehensive Economic and Trade Agreement), accord de libre-échange entre le Canada et l’Union européenne signé en 2016, tend à niveler les normes environnementales par le bas. Le CETA est un des exemples d’incohérence d’une Europe à l’avant-garde sur les changements climatiques, mais en train de s’accommoder de traités de libre-échange qui vont mettre à mal tous les acquis environnementaux que nous avons érigés dans nos frontières.  Nicolas Hulot avait interpellé Emmanuel Macron sur le CETA , son point de vue en 2017 était celui-ci : « Nous ferons de la mise en œuvre de l’accord de Paris sur le climat une des priorités de notre action internationale. »

notre article le plus ancien

6.11.2005 Soyez apôtre du protectionnisme !

Dans « Système national d’économie politique » paru en 1841, Frédéric List (naît dans le Wurtemberg actuel) pensait que les libéraux se trompaient en croyant qu’il existait des lois générales de l’économie en tout temps et en tout lieu. Pour lui, l’évolution économique de chaque pays dépend de son évolution politique et culturelle. Aussi, on ne pouvait présenter le libre-échange comme modèle incontestable à une Allemagne ravagée par les guerres napoléoniennes et politiquement éclatée. Par contre la protection des industries naissantes permettrait l’émergence d’industries hautement compétitives et ce n’est qu’à condition de rattraper le niveau de la Grande-Bretagne que l’Allemagne pourrait ouvrir les frontières car on échangerait alors à armes égales. Il s’agit là d’un « protectionnisme éducateur » et en conséquence, F.List n’est qu’un libre-échangiste différé : son idéal d’avenir reste l’industrialisation, c’est-à-dire tout ce qui détruit les ressources de la planète.

Pour enrayer ce flot de destructions, la Biosphère souhaite que les humains s’arrêtent de faire du libre-échange généralisé de biens matériels, de services financiers ou de travailleurs migrants, mais attacher au contraire les communautés à leur cadre territorial d’appartenance pour qu’elles en vivent de la façon la plus autonome possible. En agriculture, il s’agit de promouvoir la souveraineté alimentaire.

En savoir plus grâce à notre blog biosphere

Le yin du protectionnisme contre le yang du libre-échange

extraits : L’écologie penche pour le protectionnisme, la démondialisation, en définitive la relocalisation. Historiquement les vagues de protectionnisme et de libre-échange se sont succédé depuis l’abolition en 1838 des Corn Laws qui protégeaient l’agriculture britannique. Dans les années 1930, un protectionnisme extrême finit par l’effondrement du commerce mondial. Même Keynes allait jusqu’à plaider pour « l’autosuffisance nationale » en 1933 pour protéger l’emploi britannique. Après 1945, le libre-échange était revenu en force (…) Au niveau écologique, la descente énergétique qui s’amorce va de toute façon entraîner une contraction des échanges dans un monde interconnecté. Dur, dur ! Il nous faut donc préparer dès aujourd’hui les moyens d’une souveraineté alimentaire et la possibilité de sources d’énergies renouvelables. Cela passe surtout par la réduction des besoins, la relocalisation, l’instauration de communautés de résilience, etc. La démondialisation est notre avenir….

Pour en savoir encore plus

2 septembre 2014, Démondialisation, pour un retour au protectionnisme

8 septembre 2011, la démondialisation selon Aquilino Morelle

1er juillet 2011, la démondialisation contre Pascal Lamy

30 juin 2011, la démondialisation contre Zaki Laïdi (suite)

29 juin 2011, la démondialisation contre le gauche-droite de Zaki Laïdi

3 mai 2011, Montebourg, de la démondialisation à la décroissance

17 juin 2011, tout est écolo, y compris le protectionnisme

29 décembre 2010, Démondialisation féroce

7 réflexions sur “Protectionnisme contre l’absurde Mercosur”

  1. Marine Le Pen en parlait déjà dès sa première campagne de l’élection présidentielle en 2017 ! Marine voulait déjà appliquer du protectionnisme pour éviter d’importer des produits qu’on est capable de produire sur notre sol ! D’autant que c’est plus écologique de produire sur place que d’importer, puisqu’on gaspille du carburant pour effectuer les trajets si on importe. Quel intérêt d’importer des tomates d’Espagne ou du Maroc quand on en produit en France ? Puis d’exporter des tomates françaises en Espagne et au Maroc ? Cette histoire de libre concurrence est devenue trop idéologique au point de devenir absurde puisqu’on promène les marchandises par navire et camions d’un bout à l’autre du monde. Bref, on gaspille du pétrole tout ça au nom du libéralisme !

    1. Bonjour,
      Je voudrais en savoir plus, par quelles mesures veut-elle mettre en application ce protectionnisme ? Et comment veut-elle sortir du libéralisme?

      1. parti d'en rire

        Oh Sobrienal, mais vous n’y pensez pas ! Essaierez-vous de lui dire que sa chère et tendre MLP est écolo et anti-libérale autant que le pape est athée ?

        1. Oh la non pas du tout, loin de moi cette idée, juste lorsque j’entend ce type de réflexions, j’aimerai que celui qui les émette les argumente avec un minimum de faits, afin qu’il se rende compte que tout ce que dit l’extrême droite est sans fondement et que les vraies réponses à ces questions se trouvent dans le programme de l’autre coté de l’échiquier politique. C’est dommage, on voudrait à peu près la même chose, il suffirait de voter correctement pour les avoir.

      2. « Par malheur, à force de juger, on finit presque fatalement par perdre jusqu’au goût d’expliquer » (Marc Bloch)

  2. – « Notre monde en 2024 n’est toujours pas avare d’absurdités en tous genres, et le libre-échange est toujours mis en avant par nos élites libérales. »

    Ben oui. Et c’est comme ça ! Business as usual ! Et une fois qu’ON le sait, et qu’ON l’a dit…
    eh ben ON est toujours aussi con(s) qu’avant.
    Même pas la peine d’aller plus loin, et d’en dire plus. Misère misère !

    1. Esprit critique

      En fait si. Même si l’histoire des luttes nous montre que depuis des lustres elles n’ont jamais permis de changer radicalement le Système, même si comme je dis celui-ci est super bien ficelé, que d’un percheron ON ne fera jamais un cheval de course, le grand n’importe quoi, la grande Confusion, l’énorme Fatigue … même s’il est trop tard, comme le dit Aurélien Dupouey-Delezay dans La Décroissance de ce mois-ci…
      malgré cette catastrophique réalité je pense que ceux qui gardent un minimum de lucidité se doivent de faire en sorte que l’absurde ne devienne pas la norme. Que les aberrations (égarements de l’esprit) et la bêtise ne deviennent pas l’intelligence, et la raison. Le mensonge la vérité, la guerre la paix, un cercle un carré etc.
      Et pour cela il suffit seulement de le dire et le redire, le rappeler et le rerappeler !
      Et de nommer un chat un chat, etc. etc.

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