Quel monde voulons-nous pour demain, transhumaniste ?

Les États généraux de la bioéthique sont ouverts avec cette question : « Quel monde voulons-nous pour demain ? » Le Comité consultatif national d’éthique (CCNE) qui les préside est un organisme « indépendant » composé d’un président nommé par le chef de l’État, lequel nomme également 5 des 39 autres membres, 19 étant choisis par les ministres et les présidents d’assemblée et de grands corps d’État, les 15 derniers par leurs pairs dans le secteur de la recherche. Une large majorité est donc redevable au pouvoir en place, et nombre d’entre eux sont déjà acquis à la cause des lobbys. La consultation en cours n’est donc qu’un vaste trompe-l’œil et ce CCNE n’a rien d’éthique : fortement politisé, il n’obéit à aucune charte éthique claire. Sa constitution laisse déjà présager des conclusions de ses travaux.

On consacre le fait qu’il y aurait un « sens de l’histoire », qui ne peut qu’accompagner la libéralisation progressive des règles freinant le marché de la reproduction et de l’artificialisation de l’homme. Comme l’écrivait récemment le mathématicien Cédric Villani, chargé par le gouvernement d’une mission sur l’intelligence artificielle (IA) : « Il faut tout d’abord une initiation aux bases et à l’esprit de l’algorithmique et de la robotique dès le plus jeune âge. Si on ne rassure pas la population, on ne pourra pas avancer. Cela passe par la mise en place de comités d’éthique, qui pourront édicter des règles de bonne conduite. » On aura remarqué que la quasi-totalité des thèmes abordés ont trait au transhumanisme, cet ultime avatar du capitalisme et sa sortie de secours avant l’inéluctable effondrement : derrière le marché juteux de la reproduction artificielle de l’humain (procréation médicalement assistée, diagnostic préimplantatoire, contrats de location d’utérus, recherche embryonnaire, génétique et génomique), il sera aussi question d’intelligence artificielle, de robotique, de big data et de contrôle des comportements par les neurosciences. Le site officiel des États généraux nous suggère que l’IA implantée dans des robots permettra de pallier le manque de médecins dans les déserts médicaux, voire de prendre en charge les aînés dont plus personne ne souhaite s’occuper, comme c’est déjà le cas au Japon. Avant sans doute l’hybridation avec le cerveau humain sur laquelle travaillent les transhumanistes, pour compenser le déclin des capacités intellectuelles mesuré ces dernières années, déclin dont les pollutions chimiques, l’abrutissement par le monde virtuel et les prothèses technologiques sont, entre autres, la cause. La technocratie, cette classe toute-puissante qui concentre désormais le pouvoir, le savoir et l’avoir, a intégré la leçon des sociologues de l’acceptabilité : « Faire participer, c’est faire accepter. » On y fera accepter le bébé à la carte, la FIV à trois parents, le clonage thérapeutique, l’utérus artificiel et ce qui en découlera : la formation d’un embryon à partir des chromosomes de deux femmes ou deux hommes, voire l’autoreproduction, à la demande des sujets postmodernes autoconstruits : « Parce que j’y ai droit, parce que c’est mon choix » ! Et l’on voit apparaître les concepts de « stérilité sociétale » ou d’« infertilité sociale » pour légitimer le « droit à l’enfant » et en appeler à la technologie afin de s’affranchir d’une nature humaine dénoncée comme arbitraire et inégalitaire. Les avancées de la prédiction génomique – déjà effective sur le bétail et les plantes grâce au big data – permettra d’étendre le diagnostic préimplantatoire à un ensemble de critères (taille, couleur des yeux, des cheveux, performances diverses…) qui n’ont plus rien à voir avec des maladies. On prépare des générations d’humains qui, pour la première fois, ne seront plus le fruit du hasard, mais celui d’une sélection d’embryons optimisée en salle blanche. Bienvenue à Gattaca…

On se rappellera que l’eugénisme, avant que le nazisme n’en ternisse l’image, était un projet partagé par presque tous les progressistes au début du XXe siècle (la social-démocratie suédoise, par exemple, en fut une pionnière, ne l’abandonnant que dans les années 1970). Peut-on fonder une société humaine décente sur la transgression perpétuelle par la technique des limites biologiques et sociales afin de satisfaire des désirs particuliers ? Nous, simples humains qui souhaitons le rester, dénonçons la mascarade de ce débat qui consacre l’artificialisation du vivant. Nous refusons la marchandisation et la robotisation des corps et voulons naître, vivre, aimer, nous reproduire et mourir décemment, sans être incarcérés dans des dispositifs d’assistance mécanique. On ne nous trouvera ni dans les défilés des techno-progressistes des lobbys LGBT, ni avec les catho réactionnaires de Civitas et consorts. Nous refusons l’accroissement indéfini de notre dépendance à des innovations qui nous privent de notre plus élémentaire liberté. Nous voulons stopper la dévastation du monde plutôt qu’adapter notre corps à un milieu saccagé.

Les Chimpanzés du futur gascons

chimpanzesgascons@riseup.net

NB : Kevin Warwick, cyborg transhumaniste : « Ceux qui décideront de rester humains et refuseront de s’améliorer auront un sérieux handicap. Ils constitueront une sous-espèce et formeront les chimpanzés du futur. »

Lire l‘intégralité du texte : http://www.piecesetmaindoeuvre.com/spip.php?page=resume&id_article=1023

4 réflexions sur “Quel monde voulons-nous pour demain, transhumaniste ?”

  1. Il y a quelque chose du « Meilleur des mondes » dans cette insistance à vouloir nous faire prendre un rêve au goût métallique pour le There Is No Alternative du dernier représentant du genre homo.

  2. La seule question qui vaille est bien celle-là : quel monde voulons-nous pour demain ?
    Or force est de constater que ce « nous » est infichu d’y répondre. Bien sûr, si c’est pour dire qu’on veut tout et son contraire, l’argent (et en même temps) l’argent du beurre, et plus par dessus le marché, en effet ça c’est facile. Mais ce n’est pas sérieux.
    Les jeunes seraient théoriquement les plus aptes à répondre à cette question, hélas que nous disent-ils, que veulent-ils, le savent-ils … ? Déjà ils veulent tout ce qu’ont leurs parents, mais en mieux, et toujours plus bien sûr. Et c’est normal puisqu’on leur a toujours rabâché que plus =mieux , que Rolex = réussite , « parce que je le veau bien » et autres foutaises du genre.

    Quant à l’éthique, qui renvoie à la morale, autrement dit aux notions de bien et de mal, comme beaucoup d’autres choses fondamentales elle ne veut plus rien dire. Les lettres, la philo c’est ringard, l’époque est au S. Et puis la novlangue est passée par là, elle a démoli les mots les plus importants, il ne faut donc pas s’étonner que nous marchions sur la tête. Ainsi les syndicats sont devenus des partenaires (sociaux), les luttes sont devenues des parties de rigolade, les citoyens des cons.ommateurs, la liberté se résume à pouvoir choisir entre 50 marques de lessives, à avoir accès à tout ce que le sacro-saint Marché propose, et dieu sait qu’il s’évertue à ce que nous ne manquions de rien, bien au contraire. Après il reste juste à régler le fameux problème de l’Emploi, autrement dit du tout aussi sacro-saint Pouvoir d’Achat et nous serons dans le meilleur des mondes, telle est aujourd’hui la pensée qui fait con.sensus , chez les jeunes et les moins jeunes.

    Aujourd’hui chacun se doit d’avoir sa « charte éthique », même les plus gros saccageurs, ça fait bien, ça embellit l’image. En fait tout est dans l’image, le paraître, l’emballage, le contenu, on s’en fout ! Les comités d’éthiques se contentent d’exister, comme tous ces machins (petits et grands) qui ne font que brasser du vent. Des coquilles vides. Comme nos boites crâniennes.

  3. L’effondrement de nos sociétés enverra promener tous ces rêves transhumanistes qui supposent au contraire que tout aille, bien que la science dispose de ressources toujours plus grandes et que les industries de pointe ne soient en rien entravées. En ce sens le transhumanislme ne constitue pas une menace bien sérieuse.
    Par contre que des hommes puissent voir avec sympathie cette terrible fuite en avant est effrayant et désespérant pour notre espèce.
    Qu’ils ne se rendent pas compte du prix à payer pour cette séparation d’avec la nature et de la terrible fragilité que cela engendrera (quand les pièces de rechanges manqueront nos modernes transhumains n’auront pas l’air fins a faire les marchés à la recherche de contrefaçons).
    Gallilée, Newton, Einstein mais aussi Michel-Ange, Mozart, Hugo n’avaient pas une once d’intelligence artificielle, même pas Excel, même pas Word, pourtant nos partisans de cette béquille technologique ne semblent pas savoir faire beaucoup mieux que ces grands ancêtres.
    Contrairement à ce que semble souhaiter Cédric Villani nous n’avons pas besoin d’intelligence artificielle, nous avons besoin de bon sens, et la fuite en avant technologique en est l’exact contraire.

  4. L’effondrement de nos sociétés enverra promener tous ces rêves transhumanistes qui supposent au contraire que tout aille, bien que la science dispose de ressources toujours plus grandes et que les industries de pointe ne soient en rien entravées. En ce sens le transhumanislme ne constitue pas une menace bien sérieuse.
    Par contre que des hommes puissent voir avec sympathie cette terrible fuite en avant est effrayant et désespérant pour notre espèce.
    Qu’ils ne se rendent pas compte du prix à payer pour cette séparation d’avec la nature et de la terrible fragilité que cela engendrera (quand les pièces de rechanges manqueront nos modernes transhumains n’auront pas l’air fins a faire les marchés à la recherche de contrefaçons).
    Gallilée, Newton, Einstein mais aussi Michel-Ange, Mozart, Hugo n’avaient pas une once d’intelligence artificielle, même pas Excel, même pas Word, pourtant nos partisans de cette béquille technologique ne semblent pas savoir faire beaucoup mieux que ces grands ancêtres.
    Contrairement à ce que semble souhaiter Cédric Villani nous n’avons pas besoin d’intelligence artificielle, nous avons besoin de bon sens, et la fuite en avant technologique en est l’exact contraire.

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