Quelle critique faire à Extinction Rebellion ?

La radicalité absolue d’Extinction Rebellion conduit-elle à l’impuissance ? C’est ce que pense Daniel Boy*, «émérite » chercheur au Cevipof. Voici ce qu’on peut lui répondre :

Daniel Boy : « Il est trop tôt pour quantifier sérieusement l’ampleur du mouvement. La posture de radicalité absolue, c’est-à-dire le refus assumé d’entrer dans une logique de négociation, et donc de compromis avec le politique, assure la bonne conscience du mouvement : pas de compromis, pas de compromission. Mais cette posture d’extraterritorialité conduit aussi le mouvement à l’absence de résultats concrets, et donc à l’impuissance. Peu coûteuse dans les débuts d’un mouvement, cette stratégie peut s’avérer lassante avec le temps, et pour les participants et pour la société qui les observe. Depuis le film d’Al Gore (Une vérité qui dérange), les Verts sont retournés à leurs querelles et le changement climatique a été éclipsé par la crise financière. Pour que l’histoire ne se répète pas, il faut un « effet cliquet », c’est-à-dire quelque chose qui empêche le retour en arrière. Sommes-nous sûrs que ce temps est venu ? »

– La tribune de Daniel Boy brille par sa naïveté et son inutilité. L’avalanche d’alertes scientifiques est pour beaucoup dans la montée en puissance de XR. Ce qui apparaissait hier comme les conjectures du GIEC est aujourd’hui vécu comme une menace certaine. L’humanité a entre 10 et 20 ans devant elle pour éviter le basculement climatique. Après il sera trop tard, même si les effets les plus redoutables ne se feront sentir qu’à la fin du siècle. Que propose Daniel Boy face à la réalité climatique ? Rien si ce n’est, implicitement, de faire confiance à Emmanuel Macron.

– Comme notre civilisation militaro-industrielle porte en elle la menace d’un effondrement, nous sommes contraints à la rébellion face à des politiques qui témoignent d’une incapacité et/ou d’un manque de courage pour prendre les mesures indispensables. Il ne s’agit pas d’entrer dans une négociation politique, mais de maintenir la pression sur les politiciens : la nature ne négocie pas. Fini le court-termisme du marché, l’heure est à la pensée du délai, et celui-ci est particulièrement court : l’émission de gaz à effet de serre aujourd’hui impactera le climat sur plusieurs siècles.

– La structuration de XR répond à la fois aux caractéristiques des nouveaux mouvements sociaux (spontanéisme et égalitarisme), mais aussi aux principes de la désobéissance civique : respecter la non-violence, agir à visage découvert et surtout défendre une cause d’intérêt général. Un tel mouvement, ancré à la fois dans les réseaux sociaux et ayant pour objectif le bien commun ne peut que durer. On ne peut enrayer un mouvement qui est déjà mondialisé et qui bénéficie de la diffusion virale que procure Internet. Et ce mouvement pour le climat ne peut qu’être soutenu par l’opinion publique. Les gouvernements témoignent déjà de leur impuissance face à un tel mouvement, même s’il est encore minoritaire en nombre d’activistes.

– Greta Thunberg a été comme le battement de l’aile du papillon qui provoque une tornade de l’autre côté de la planète. Seule, vraiment toute seule au début à faire la grève scolaire pour le climat, elle a impulsé un mouvement mondial. Extinction Rebellion n’est qu’une des actions, et elles seront nombreuses, parfois même violentes, de la génération climat. Le mouvement est lancé, il ne s’arrêtera plus. Il durera tant que nos émissions de gaz à effet de serre ne s’arrêteront pas.

*Le Monde du 11 octobre 2019, « La radicalité absolue d’Extinction Rebellion conduit le mouvement à l’impuissance »

6 réflexions sur “Quelle critique faire à Extinction Rebellion ?”

  1. A la suite des manifestations, la police a émis un ordre d’interdiction à l’encontre d’Extinction Rebellion et de son « soulèvement d’automne », qui causerait des « perturbations graves » dans la ville. La ministre de l’intérieur, Priti Patel, a appelé à soutenir la police: « Les officiers de tout le pays ont fait un boulot formidable pour maintenir l’ordre lors des manifestations d’Extinction Rebellion ». Les forces de l’ordre ont procédé à près de 1 642 arrestations à Londres depuis le début de la mobilisation la semaine dernière, selon les chiffres actualisés mercredi.

    Amnesty International a dénoncé « une restriction illégale à la liberté d’expression ». « Si la lutte contre l’effondrement du climat et de l’écologie, et pour l’humanité, est contraire aux règles, alors les règles doivent être brisées », a réagi dans un tweet la Suédoise Greta Thunberg.

  2. Les XR seraient – ils des zozos pastèques (rouges à l’ intérieur et verts à l’ extérieur) , des Philipulus de l’ apocalypse climatique , des protecteurs du migrant et adorateurs de l’ afromuzz , des robots verts à Soros , des amnésiques de la démographie galopante et de l’ invasion migratoire ?
    N’ oubliez pas les énormes surpollutions et déforestations dont souffre cette belle Terre .

    1. Tout et n’importe quoi peut être aussi l’occasion de réciter son catéchisme, de ressasser sa misérable litanie.

  3. Tout et n’importe quoi peut être critiqué. Critiquer c’est examiner de façon critique. Autrement dit c’est analyser, c’est juger, c’est penser. Pas certain donc, «que La tribune de Daniel Boy brille par sa naïveté et son inutilité.»

    Daniel Boy reproche à ce mouvement «la posture de radicalité absolue, c’est-à-dire le refus assumé d’entrer dans une logique de négociation, et donc de compromis avec le politique». On peu comprendre que cette posture le gène, surtout si lui est un partisan du consensus (mou ou pas, peu importe), des grands blablas (qui n’avancent à rien) etc.
    Mais on peut tout aussi bien lui reprocher à lui aussi sa posture, cette idée qu’il a et qu’il défend, qu’il n’a peut-être même pas envie d’analyser… du «dialogue social», etc. Et vice versa. En attendant… on tourne en rond.

    XR (le commentateur précédent) nous dit que «c’est la force du nombre qui fera le succès, et le nombre viendra si […]» Oui bien sûr, mais ce n’est là qu’une lapalissade, et puis on sait bien tout ce qu’on peut faire avec des si. On peut toujours regretter de ne pas être assez nombreux, ça non plus ça ne fait pas avancer grand chose. La faute à qui, si aujourd’hui nos amis et voisins british ont autre chose en tête que le «sauvetage» de la planète, si c’est le Brexit ou je ne sais quoi d’autre qui les préoccupe le plus ? Et c’est partout pareil, c’est pour tout le monde pareil.
    – « Gail Bradbrook, cofondatrice du mouvement, a frappé à coups de marteau la baie vitrée de la façade du ministère des Transports, avant d’être arrêtée.»
    Là aussi, qu’en penser ? D’un côté ce mouvement se dit non violent et de l’autre en agissant ainsi (à coups de marteau) il fait de suite penser aux Black Blocs. Faut reconnaître déjà que ça n’aide pas à se faire une idée bien précise de tout ça, surtout en ces temps de grande confusion.

    De toutes façons nous verrons bien ce que donnera ce mouvement Extinction Rebellion. Comme nous verrons ce que donnera celui des Gilets Jaunes (pas encore éteint), ce qu’il est sorti de Nuit Debout etc.

  4. Lundi 14 octobre, des militants d’Extinction Rebellion bloquaient la circulation à l’heure de pointe dans le centre financier de Londres, dénonçant les milliards investis dans des énergies fossiles qui nuisent à l’environnement.
    Extinction Rebellion a lancé mardi 15 octobre de nouvelles actions chocs à Londres, défiant l’interdiction de manifester décrétée par la police de la capitale britannique contre le mouvement écologiste. Gail Bradbrook, cofondatrice du mouvement, a frappé à coups de marteau la baie vitrée de la façade du ministère des Transports, avant d’être arrêtée. Au total, 92 personnes sont poursuivies pour différents délits, dont obstruction de la voie publique.

  5. Devant l’Assemblé nationale, les forces de l’ordre ont saisi un par un les militants XR assis sur la chaussée les uns derrière les autres pour rendre l’intervention plus difficile, les portant ou les traînant jusque derrière le cordon de police.
    “On n’était pas assez nombreux”, a regretté un militant. Eh oui, c’est la force du nombre qui fera le succès, et le nombre viendra si le mouvement persévère et persuade nos concitoyens d’agir pour le climat…

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