Robert Badinter, condamné à la peine de mort

Robert Badinter est mort dans la nuit du 8 au 9 février à l’âge de 95 ans.

nécrologie : Trente ans avocat, presque cinq ans garde des sceaux, neuf ans président du Conseil constitutionnel, seize ans sénateur. François Mitterrand, premier secrétaire du Parti socialiste, est poursuivi en diffamation par le neveu du général de Gaulle. Mitterrand risque une privation des droits civiques d’un à trois ans. Son avocat Badinter joue la montre et déploie pendant des heures des trésors d’arguties juridiques, il parvient à faire repousser le procès. L’audience tombait le 19 février 1973, c’est-à-dire on ne peut plus mal, avant le premier tour des législatives du 4 mars ! Mitterrand, finalement condamné après les élections, félicite le jeune homme d’avoir « enrayé le mécanisme » judiciaire…

Un petit matin de novembre 1972, Bontems est conduit à la guillotine. Robert Badinter est là, dans la cour glaciale de la Santé. Il n’oubliera jamais « le claquement sec de la lame sur le butoir ». Cet échec en a fait l’homme d’une croisade, celle de l’abolition de la peine capitale. Il a défendu et sauvé la tête de six condamnés. « Ce seront mes témoins lorsque je comparaîtrai devant le Seigneur. » Son souvenir le plus éclatant remonte à l’année 1977, au lendemain du verdict de Troyes, où il avait sauvé la tête de Patrick Henry, coupable d’avoir enlevé et tué un petit garçon de 7 ans.

Robert Badinter restera d’abord comme l’homme qui a aboli la peine de mort. Automne 1981, Robert Badinter lance à la tribune du Palais-Bourbon, devant des travées clairsemées : « J’ai l’honneur, au nom du gouvernement de la République, de demander à l’Assemblée nationale l’abolition de la peine de mort en France. » Le 10 octobre 1981 parut au Journal officiel la loi nᵒ 81-908, dont l’article 1er déclarait sobrement : « La peine de mort est abolie. »

Quelques commentaires qui relativisent Badinter

– En 1981, tous les sondages d’opinions montrait un peuple français majoritairement en faveur de la peine de mort…

– Tuer n’est jamais un bon choix. Mais justement parce que tuer est le pire des crimes, il est judicieux que le code pénal prévoit, en regard de ce crime capital, une peine capitale.

– Il y a encore de nos jours des gens qui sont assassinés sans aucune forme de procès..

– Je vais probablement me faire m@ssacrer, mais je reste favorable à la peine de mort :
1. les responsables de gén@cide ne sont pas pardonn@bles (ex : mil@sevic, Serbie);
2. ceux de m@ssacres à grande échelle non plus (ex: anders behring br@ivik, Norvège);
3. 5% des péd@philes sont récidivistes en sortant de prison. Ce n’est pas admissible. ceux qui ont des enfants comprendront.

– Les choses étant ce qu’elles sont, les humains étant ce qu’ils sont, il est couramment admis, sous toutes les latitudes, à quelques variantes près, de faire en sorte que les criminels encourent un châtiment proportionné à leurs actes, en d’autres termes qu’il y ait une échelle des crimes et, en face, une échelle des peines. La prison à vie n’est-elle pas aussi une sorte de peine de mort ? Et puis l’abolition ne fut-elle pas un miroir aux alouettes dans un pays qui pratique des « exécutions extra-judiciaires », « assassinats ciblés » et accepte le bombardement de populations civiles ?

– Rappelons que M. Badinter, à l’instar des dirigeants israéliens, ne souhaitait pas que la CPI se penche sur d’éventuelles violations des droits des Palestiniens (courrier envoyé à la CPI début 2022 pour plaider la non compétence de la Cour). Il est vrai , comme on peut le constater à nouveau, que les droits de l’Homme ne concerne pas encore les Palestiniens.

– De Robert Badinter je me souviens, hélas, d’un entretien un matin sur France Culture, pendant les bombardements israeliens sur Gaza en 2008en réponse à des rockets tres artisanales, déjà, à l’époque, les bombardements avaient fait des morts et M Badinter expliquait que les bombardements de civils ne pouvaient pas être des crimes de guerre car Israël n’avait pas adhéré à la CPI mais que les lancers de rockets étaient des crimes contre l’humanité.

– il y a eu aussi l’épisode des gilets jaunes où ce monsieur écumait de rage sur les plateaux télé contre les gilets jaunes qui avaient osé balader la tête … en carton de Macron au bout d’une pique , mais n’a pas dit un mot sur les violences policières et les mutilations des manifestants.

On ne peut souhaiter la mort de personne, chacun a sa part de vérité. Nous préférons raisonner comme Teddy Goldsmith : « Quand il n’y aura plus assez de ressources minérales et pétrolières pour nous permettre d’épandre dans le monde entier des poisons, quand le monde naturel se trouvera si appauvri qu’il ne pourra plus alimenter des formes de vie complexe, alors la Nature montrera, hélas, le peu de cas qu’elle fait du caractère sacré de la vie humaine. Le caractère sacré de la vie humaine est un mythe auquel nous croyons quand cela nous arrange. »

– Un phare s’est éteint … Probablement en route pour le paradis …

14 réflexions sur “Robert Badinter, condamné à la peine de mort”

  1. Parmi la trentaine de propositions de contribution auprès de la CPI en 2020, celle du Français Robert Badinter. : « La Cour Pénale Internationale n’a pas juridiction sur les crimes prétendus avoir été commis en Cisjordanie, incluant Jérusalem Est et la bande de Gaza. La Palestine ne remplit pas les critères d’un Etat selon le droit international. Le terme « Etat » selon l’article 12(2) (a) du Statut de la Cour signifie que l’Etat est souverain, or la Palestine ne l’est pas. Ce n’est pas à la CPI de déterminer si la Palestine est un Etat souverain. La seule façon d’enquêter sur des crimes commis dans ce cadre est constituée par la saisine de la CPI par le Conseil de sécurité. »  

    Notons que le résumé de l’argumentaire de Robert Badinter est identique mot pour mot aux déclarations récentes du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou.

  2. Badinter en 1981 avait demandé et obtenu de voter l’abolition de la peine de mort sans l’assortir d’aucune restriction ni d’aucune réserve quelle que soit la catégorie du crime commis, même « odieux ». Les jurés ne devaient avoir aucune latitude de réflexion, il ne faut plus faire de différence entre criminels, ce serait de la « discrimination ».

    1. Celui-là aussi (argument) il l’a démonté. Le mieux c’est de lire ou relire :
      – Le discours intégral de Robert Badinter sur l’abolition de la peine de mort en France, le 17 septembre 1981 (Libération 9 février 2024)

  3. – « Les assassins seraient donc les seuls à ne pas risquer la mort »
    C’est le genre d’ « argument » que Badinter a dû réfuter. Bien sûr il y en avait d’autres, bien moins ridicules, et Badinter les a TOUS démontés. Après ça il faut être sacrément gonflé pour oser dire que le contenu de son argumentation était faiblard (sic À 10:22).
    Badinter était un homme de convictions. Non seulement critiqué, il fut très violemment attaqué. D’ailleurs il disait que la justesse d’une conviction se mesure à la haine qu’elle suscite.
    Non seulement CONTRE la peine de mort, il était aussi CONTRE l’euthanasie.
    – « Le droit à la vie est le premier des droits de tout être humain – c’est le fondement contemporain de l’abolition de la peine de mort – et je ne saurais en aucune manière me départir de ce principe ». ( «Nul ne peut retirer la vie à autrui dans une démocratie» : quand Robert Badinter s’opposait à l’euthanasie – lefigaro.fr hier)

  4. La mort serait un châtiment juste pour beaucoup de tortionnaires et d’assassins mais un état démocratique ne peut pas tuer un humain car il rend coupable de meurtre l’ensemble de la population qu’il représente.
    Ceci dit , Badinter était très copain avec Mitterrand , ils avaient en commun le goût de la magouille. N’en faisons pas un héros. Il n’a fait qu’exécuter ce que Mitterand avait décider pour faire croire qu’il était de gauche.

  5. Esprit critique

    Sur les commentaires de Rapporterre :
    – « Le contenu de son argumentation était faiblard » … Ben voyons !
    – « comme si le suivisme était un viatique. » … Pourquoi ce mot, « viatique » ?
    Dans quel sens faut-il ici l’entendre… encore dans sons sens religieux ? Probablement puisqu’en suivant Rapporterre parle des Églises et de Dieu. Maintenant si ON prend ce mot dans son sens littéraire, il désigne alors un soutien, un secours indispensable, une aide.
    Le suivisme (faire comme les autres) serait alors le genre d’argument qu’ON fait valoir faute de mieux, pour se tirer d’affaire. Un argument finalement sans aucune valeur.
    Là où c’est drôle (enfin moi je trouve) c’est quand ON se réfère aux autres (pays voisins) pour montrer combien ils sont en avance (ou en retard) sur nous. Sur la fin de vie, par exemple (article suivant), là c’est bien de faire comme les autres. Hi-han hi-han !

  6. – « Robert Badinter, condamné à la peine de mort » (Titre)
    Ça me rappelle « Bal tragique à Colombey , 1 mort »… dans Hara-Kiri, le journal bête et méchant.
    Si ON veut aller par là, faire dans la Déconnante, ON peut dire aussi bien que nous sommes TOUSTES con damné(e)s à la même peine.
    Biosphère À 22:38 se pose des questions. Disons plutôt des fausses questions. Juste pour nous faire entendre que Manu est un petit prétentieux, qui se croit au-dessus du Lot, et doté de l’infaillibilité pontificale (sic). Notons au passage que Biosphère reconnaît donc au Pape cette faculté. C’est marrant ce besoin chez Biosphère de bouffer du curé à tout va. Comme là encore dans l’article suivant. Comme si la raison d’être de ce blog n’était pas de faire la promo d’une certaine religion. ( à suivre )

    1. (suite ) La meilleure c’est la dernière, question :
      – Macron et Badinter sont-ils plus pertinents que le point de vue du peuple ?
      Comprenons par là qu’ils le sont nettement moins que Biosphère. Voire que le Pape.
      Ce qui est également marrant, c’est que Biosphère se réfère à la Démocratie quand ça l’arrange. Sur ce coup le Peuple (le Pôple, la Populace, le Gros Animal) est POUR à 55% .
      C’est bien admis, les sondages c’est la démocrassie. Sauf que quand l’Opinion (la Grosse Girouette) ne va pas dans le sens du vent de Biosphère, là ce n’est plu pareil.
      Bref, choisis ton vent camarade ! « Je suis POUR » chantait l’autre con.
      Quoi qu’il en soit, si ON con sidère que les ni-ni sont CONTRE (ben oui si t’es pas POUR c’est que t’es CONTRE, et vice-versa)… 45% de CONTRE ce n’est pas seulement deux pékins. Fussent-ils les plus pertinents du monde. ( à suivre )

      1. (et fin) À mon tour de poser une question : Qu’est-ce qu’une avancée civilisationnelle ?
        Comme par hasard, à partir justement de ces quelques mots de Macron le 9 octobre 2021… Biosphère a consacré un article à cette question. Comme ce blog est au service de la conn… euh pardon de l’intelligence, collective… Biosphère avait pris soin de préciser :
        – « Dans l’espoir que des commentaires sur ce blog nous ouvrent d’autres perspectives ou complètent notre point de vue… » ( Biosphère 13 octobre 2021 )
        ON peut toujours espérer. La bonne blague !
        Cet article a généré 10 commentaires, dont 9 des miens. Force et de constater que Biosphère reste sur son point de vue. Et c’est pour tout pareil.

  7. 1/3) Robert Badinter n’avait fait en 1981 que suivre un des points du programme présidentiel de Mitterrand ! Le contenu de son argumentation était faiblard. Il avait fait un parallèle injustifié entre peine de mort et abolition de la torture ou de l’esclavage. Il s’étonnait aussi du retard de la France à abolir la peine de mort par rapport à d’autres pays européens, comme si le suivisme était un viatique. Il récusait la voie de l’opinion publique et le recours au référendum… Il relevait l’absence de lien entre la peine de mort et l’évolution de la criminalité sanglante, mais la peine de mort est-elle faite pour cela ? Il ajoutait plus loin : « Le choix entre le maintien et l’abolition de la peine de mort, c’est, en définitive, pour une société et pour chacun d’entre nous, un choix moral. » Mais quelle morale ? Celle des Églises ou celle des victimes ?

    1. 2/3) Ce n’est que tout à la fin de son discours ampoulé que Robert Badinter aborde le point de vue des victimes d’un assassin : « La mort et la souffrance des victimes, ce terrible malheur, exigeraient comme contrepartie nécessaire, impérative, une autre mort et une autre souffrance. A défaut l’angoisse et la passion suscitées dans la société par le crime ne seraient pas apaisées. Pour les partisans de la peine de mort, justice ne serait pas faite si à la mort de la victime ne répondait pas, en écho, la mort du coupable. » Badinter balaie alors cette argumentation d’un revers de manche : « Tout le progrès historique de la justice a été de dépasser la vengeance privée. Et comment la dépasser, sinon d’abord en refusant la loi du talion ? »

      1. 3/3) Or la peine de mort après un procès contradictoire et public ne relève pas de la vengeance privée, mais au contraire du transfert à la société de la justice privée. Grâce au monopole social de la peine de mort contre un meurtrier, les humains étouffent l’esprit de vengeance au lieu de l’exaspérer et de l’étendre. C’est pourquoi Badinter ne s’attarde pas sur ce point, déviant le débat vers une possible « erreur judiciaire » ou la « justice d’élimination » au détriment des Noirs (aux USA) ou de Maghrébins (en France) ! Badinter ose même : « Pour ceux d’entre nous qui croient en Dieu, lui seul a le pouvoir de choisir l’heure de notre mort. »

  8. Emmanuel Macron avait célébré le 9 octobre 2021 les 40 ans de l’abolition de la peine de mort, à son avis « une avancée civilisationnelle majeure ». Que veut dire une telle présomption ? Un chef d’État est-il doté de l’infaillibilité pontificale ?

    Notons d’un point de vue démocratique qu’en 2020 encore, 55 % des personnes interrogées dans un sondage Ipsos se disaient favorables au retour de la peine de mort. Macron et Badinter sont-ils plus pertinents que le point de vue du peuple ?

    1. Biosphère, il est clair que la majorité des citoyens veulent la peine de mort et cette tendance était aussi vrai lors de la loi. Badinter a donc usé d’arguties capables de retourner l’opinion des députés pour les convaincre.
      Il répète qu’il existe un seul argument imparable, un état démocratique ne peut pas assassiner un citoyen car il rend coupable de meurtre tous les citoyens et en particulier ceux qui ne veulent pas être des meurtriers.
      Les autres arguments ne sont que de la manipulation. On parle quand même de la mort d’un individu.

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