Sous sa rubrique écrans, LeMonde du 29.05.2008 rappelle les propos de Sarkozy lors du dernier meeting de la campagne présidentielle : « Mai 68 nous avait imposé le relativisme intellectuel et moral, il nous avait imposé que tout se valait, le bien et le mal, le vrai et le faux, le beau et le laid… Il est urgent d’en finir. » Donc, il n’y aurait plus aucune valeurs, ces constructions sociales qui nous permettent de classer en noir et blanc notre environnement ? La libération des mœurs issue de 1968 et la lutte contre l’autoritarisme seraient des valeurs à occire définitivement ? Vive le caporal-chef Sarko ?
En fait les maîtres à penser de Sarko (ceux qui écrivent ses discours) font l’amalgame classique entre le fait de relativiser et le relativisme. En ethnologie, le relativisme (ou relativisation) est une méthode de distanciation par rapport à ses préjugés. Un observateur plongé dans un milieu très différent de celui dans lequel il a été socialisé doit s’interdire de prendre comme modèle les valeurs et les institutions de la société dont il est issu. Lévi-Strauss nous appelle à acquérir à la manière d’un ethnologue ce « regard éloigné » qui nous permet de distinguer de manière plus lucide les aspects positifs et négatifs de notre propre culture. L’effet de décentrement dont l’ethnologie procède aboutit à considérer que la société thermo-industrielle n’est pas la norme absolue, mais une manière parmi d’autres de percevoir le monde ou de rentrer en relation avec lui. Mai 68 nous a permis d’imaginer un autre monde possible. Il y a une nette différence entre ce relativisme de méthode et le relativisme normatif, celui qui consiste à dire « tout se vaut ».
Lévi-Strauss a travaillé sans relâche à décentrer l’homme : notre esprit est dans la nature, non à côté. Il y a continuité entre l’homme observant et le monde analysé. Nous ne sommes ni des témoins, ni des dieux, nous sommes simplement embarqués, objets et sujets d’une sorte d’immense histoire du temps et de l’espace. Cela ne donne pas blanc seing pour dire n’importe quoi. Et pourquoi pas un homme dominé par ses gènes, tant qu’on y ait ; je parie que c’est dans la lignée de la pensée de Sarko 1er !