Contrairement à ce qui se passait il y a encore moins de trente ans, les informations relatives au désastre écologique en cours ne manquent pas. Mais, c’est surtout la forme et le contenu de cette présentation qui pose problème. Dans « LE MONDE », ces informations font toujours l’objet d’un traitement particulier ; une page particulière leur ait consacré sous le titre Planète alors que le supplément « économique » ne fait jamais mention des problèmes écologiques posés par ce qui est toujours présenté comme des avancées économiques ou technologiques pour l’humanité. Comme l’huile et l’eau, ces deux catégories d’informations ne sont jamais mis en interface au risque de masquer les vraies questions.
D’autre part, l’espace médiatique a toujours tendance à simplifier ou à tordre le sens des informations relatives aux questions d’environnement par le jeu de slogans ou de formules stéréotypées qui prétendent tout faire comprendre à l’opinion ! Il y a des mots qui occultent la gravité du désastre, tels que « durable », « transition », « économie circulaire » etc…destinés à éviter toute remise en question, en particulier de notre mode de vie occidental mondialisé. On peut même dire que les pratiques rhétoriques dans ce domaine sont celles de la « novlangue » chère à Orwel dans son « 1984 » ! Dans une société qui cultive l’obsolescence de nos objets quotidiens et de nos cadres de vie, que veut donc dire un oxymore comme « développement durable » ??? Il y a même des expressions étonnantes comme « sauver la terre », reprises d’ailleurs par des écolos qui se veulent durs et purs alors qu’il s’agit là du comble de l’esprit prométhéen à l’origine de toutes les dérives actuelles et à venir comme la « géo-ingénierie » censée répondre au réchauffement climatique. Comme l’a montré une récente vidéo du « National Géographic », ce n’est pas la planète qui est menacée de destruction mais l’humanité elle même et ceci par sa propre faute. Autrement dit, ce qu’il faut maintenant envisager sérieusement, c’est l’hypothèse du suicide de l’humanité par son développement incontrôlé rendant au final la terre inhabitable, cette dernière étant parfaitement apte avec le temps à s’en remettre par la suite, malgré des écosystèmes certes transformés mais aussi régénérés !
Compte tenu de l’accélération des processus de destruction en cours, c’est à l’évidence cette hypothèse qu’il faut retenir, aussi tragique soit elle. Non pas pour s’abandonner à « la fatalité du progrès » comme certains esprits cyniques nous le laissent entendre, mais au contraire pour prendre toutes les dimensions du défi ! C’est ici que se situe d’ailleurs le nœud du problème, à savoir le fait d’avoir le courage d’une prise de conscience qui concerne chacun de nous, malgré le fait qu’il soit vraiment tard pour s’y attaquer au regard des premières alertes officielles datant d’au moins cinquante ans. Or jusqu’à présent, la majorité des pays responsables de cette situation dramatique, en particulier l’oligarchie les dirigeants, a pratiqué une politique de faux semblants dont l’Accord de Paris de 2016 sur le climat en est l’illustration éclatante et ceci tout en continuant à faire prospérer les causes de destruction en raison de son addiction à la religion de la croissance. Significativement, les seules réponses officielles à ce défi sont toujours d’ordre technoscientifique et économique, reprenant ainsi la manière de penser qui est à l’origine des problèmes que l’on prétend résoudre !
Que la planète ne soit pas menacée, en tant que bloc rocheux, certainement; par contre, que ce soit l’humanité en premier lieu qui le soit, me semble relever d’une erreur de même nature que celle que Simone Charbonneau dénonce par ailleurs. Elle remet l’Homme au centre de la création comme s’il était son objet même.
Bien avant l’Homme c’est en effet la biosphère qui est menacée et beaucoup d’espèces ont déjà disparu de notre fait et en pratique les grands animaux sauvages sont pratiquement tous sur la voie de l’extinction.
Certes, la géo-ingénierie doit être dénoncée, mais plus profondément ce qui doit être dénoncé c’est l’idée d’un Homme non parmi la nature mais au-dessus d’elle, et qui ne devrait la sauver que par intérêt pour sa propre survie.
C’est un utilitarisme que je n’aime pas trop. Le problème n’est pas le suicide de l’humanité il est l’assassinat de la vie sur Terre (ou de la vie au delà d’une certaine taille) par une seule espèce. D’une certaine façon, au moins sur cet extrait le raisonnement de Simone Charbonneau s’arrête en chemin. Nous ne sommes pas suicidaire puisque notre acte de suicide n’est ni voulu ni vraiment conscient, par contre nous sommes assassins.