Sortons du pétrole, laissons le pétrole sous terre, c’est aussi important que de sortir du nucléaire. Car la valeur du pétrole est incommensurable. Il faut environ 100 millions d’années pour « produire » du pétrole ; si la nature était une marchande capitaliste, à combien nous offrirait-elle le litre de super ? Certainement pas à 100 dollars le baril, ni même à 1000 ! Pourtant Antoine Reverchon* s’escrime à envisager un brillant avenir pour le pétrole : « Les découvertes de nouveaux gisements reculent sans cesse la date du « pic de production »… « Les entreprises du secteur pétrolier et gazier voient leurs actions servir de valeurs refuges à l’heure où les titres d’Etat sont risqués. » Pourtant le pic du pétrole conventionnel est dépassé depuis deux ou trois ans !
Antoine Reverchon ne voit qu’une limite au pétrole, le réchauffement climatique : « L’Agence internationale de l’énergie (AIE), dans son rapport World Energy Outlook 2011, révèle que la combustion de l’énergie fossile produite actuellement et dans les années à venir par les équipements existants en 2010 (usines, transports, bâtiment) provoquera, à l’horizon 2050, un réchauffement du climat de 6° C, alors que notre économie planétaire ne pourraient absorber sans catastrophe majeure qu’une élévation de température de 2°C. » Alors « la valorisation des entreprises du secteur énergétique n’a pas de sens économique puisqu’elle ne tient pas compte du risque climatique. » Mais « pour les investisseurs, le scénario de la production jusqu’à la dernière goutte reste le plus attractif. »
Contre la myopie de ces « investisseurs » et de leurs marchés, il faudrait dès aujourd’hui se préparer au plus vite à des changements structurels de nos modes de vie pour éviter le double fléau de la pétrole-apocalypse et du cataclysme climatique. Seule une augmentation du prix du pétrole constante et progressive, dont les royalties iraient à la promotion des économies d’énergie et non aux rentiers du pétrole, permettrait une prise de conscience mondiale. Cela ne peut se faire que si une volonté politique forte et cohérente incite à l’augmentation régulière et programmée du prix des énergies fossiles. La campagne présidentielle française de 2012 a commencé, aucun des candidats n’envisage une telle politique. Nos dirigeants sont aussi aveugles que les marchés… Il faudra voter écolo dès le premier tour, au pays des aveugles les borgnes sont rois.
* LE MONDE économie du 15 novembre 2011, Quelle est la vraie valeur des réserves d’énergie fossile ?