Dans la presse fleurissent quelques articles exprimant une « inquiétude » démographique face à un risque illusoire de dépopulation menaçant nos sociétés. C’est dans Courrier International (13 au 19 janvier 2022), mais presque tous les grands journaux ont repris les mêmes analyses. Ce n’est que propagande nataliste alors que l’extinction ne menace pas l’espèce humaine, en surnombre, mais la biodiversité, en baisse catastrophique.
La manipulation des chiffres est une constante de l’interprétation des statistiques. Rétablissons les faits. S’inquiéter est vraiment déplacé quand l’humanité vient de compter 88 millions de représentants de plus en 2021, quand le seuil des 8 milliards devrait être franchi au début de 2022 et alors que la population mondiale a été multipliée par 5 depuis 1900. Certes nous vivons depuis 50 ans dans un contexte de baisse du taux de croissance démographique, croissance annuelle de 2,1 % au cours de la décennie 1960-1970, un peu plus de 1 % aujourd’hui. Mais cela représente quand même un doublement de la population en 70 ans. Certes il y avait 5 enfants par femme en 1960 au niveau mondial, et 2,4 en 2019. C’est d’ailleurs la poursuite anticipée de cette tendance qui fournirait le cadre général d’un affolement sans cause. Car si les indicateurs de fécondité diminuent, ils restent au dessus du taux de remplacement des générations et, comme ils s’appliquent à des populations de plus en plus importantes, nos effectifs en valeur absolue augmentent plus que dans les années 1960. C’est pourquoi il est prévu, dans les prévisions les plus « optimistes », un pic de population à 9,7 milliards en 2064 pour atteindre un peu moins de 8,8 milliards en 2100 ( contre 10,9 milliards à cette date selon l’hypothèse moyenne de l’ONU). De toute façon, 9 ou 10 milliards, c’est beaucoup trop ; il y a surpopulation humaine et cela se retrouve dans la réalité actuelle de l’extinction des espèces non humaines.
Un million d’espèces animales et végétales pourraient disparaître et la mauvaise santé des écosystèmes menace les hommes. Malgré cette urgence, les États n’ont pas tenu leurs engagements antérieurs pour inverser la tendance. Le projet de nouveau cadre mondial sur la biodiversité présente vingt-et-une cibles, dix jalons, quatre grands objectifs… et rappelle que les efforts de conservation « classiques », tels que les réseaux d’aires protégées, les plans de protection des espèces ou les mesures de restauration, ne seront absolument pas suffisants pour arrêter la perte de diversité animale et végétale. Il faudrait transformer le système de production alimentaire, réduire massivement les subventions néfastes dans les secteurs de la pêche ou de l’agriculture, abaisser la pollution en réduisant l’épandage d’engrais dans l’environnement d’au moins 50 % et l’épandage de pesticides d’au moins deux tiers, diminuer la pollution par le plastique, augmenter les financements en faveur de la biodiversité (au moins 200 milliards de dollars par an), des objectifs chiffrés mais sans aucun moyen de les mettre en pratique… En 2010, la Convention des Nations unies sur la Diversité Biologique (CDB) avait adopté les accords dits « objectifs d’Aïchi », qui établissaient vingt points à atteindre pour 2020 ; les objectifs n’ont pas été atteints. Le document actuel doit être négocié en octobre 2022 et pourrait à nouveau connaître un report.
Lire, Biodiversité, CDB, COP15 et IPBES… en vain
Nous constatons que le poids quantitatif de la population humaine sur les écosystèmes n’est pas du tout abordé alors que la généralisation mondiale du planning familial pourrait être entreprise à moindre coût. C’est pourquoi la perspective lointaine d’une décrue de la population humaine ne peut pas être une mauvaise nouvelle, sauf qu’elle arrivera un peu trop tard pour léguer à nos générations futures un héritage vraiment viable et vivable.
Que faire ? Agir avec l’association Démographie Responsable
La perte de biodiversité est toujours analysée comme une conséquence DIRECTE de l’homme.
Il est vrai que son habitat, ses villes, usines, bureaux ont très mauvaises influences sur les écosystèmes.
Pourtant une part très conséquente de perte de biodiversité est due aux animaux domestiques. Un chat autour d’une maison, ou un troupeau de brebis dans un champ, c’est moins d’animaux sauvages, que se soit par la prédation ou par l’occupation de l’espace.
Il nous faudra aussi choisir entre une surpopulation des uns au détriment des autres.
Je suis un nataliste du sauvage et un malthusien du domestique.
On peut imaginer qu’une dépopulation humaine sans dépopulation de ses cheptels n’aurait que très peu de conséquence positive pour notre sauvage…
Quelques personnes se préoccupent du sujet, comme ces femmes interrogées dans cette brève émission (4 minutes) de France Inter qui fait d’ailleurs référence à l’association Démographie Responsable.
https://www.franceinter.fr/emissions/social-lab/social-lab-du-dimanche-23-janvier-2022
– « des femmes et des hommes font le choix de ne pas faire d’enfants par conviction écologique. » ( Valère Corréard )
Que ce soit pour «sauver » la planète, ou bien par peur de mettre au monde un enfant dans ce monde qui va au Désastre, combien sont-ils exactement ? Et combien de femmes et d’hommes font le choix de ne pas faire d’enfants, pour ne pas avoir à s’emmerder avec des enfants, tout simplement ?
On ne connait pas encore la proportion, mais je vous assure pour écouter les commentaires qui arrivent auprès de Démographie Responsable que parmi les gens ne voulant pas d’enfant, la motivation « pour protéger la planète » (et non par confort personnel) commence à être significative.
Les gens sont ils sincères à 100 % ? me direz-vous ? Je n’en sais rien, mais ils ne sont certainement pas tous insincères et ils sont loin d’être ultraminoritaires, qu’ils osent le dire est aussi significatif.
Combien sont-elles et sont-ils ? En France, pas plus de 5 % . En considérant qu’ils et elles soient sincères. Par contre et « C’est une des révélations les plus surprenantes de l’enquête participative « Il est temps » sur l’écologie, lancée par Arte : en 2020, seules 25% des femmes répondent que faire des enfants est une évidence. »
Source : Elles ne veulent pas faire d’enfants par souci écologique.
Par Catherine Durand, sur marie claire )
– « Ce n’est que propagande nataliste alors que l’extinction ne menace pas l’espèce humaine, en surnombre […] S’inquiéter est vraiment déplacé quand l’humanité vient de compter 88 millions de représentants de plus en 2021 [etc. etc. etc.]» (Biosphère )
De la propagande nataliste, bien évidemment ! Et cette rengaine malthusienne qui ramène tout et n’importe quoi au (sur)nombre, ne serait-elle pas, elle aussi, de la propagande, de la manipulation, du bourrage de crânes etc. par hasard ? Oh non bien sûr !
Et puis c’est très déplacé que de dire une telle horreur. La bonne blague !
Rien n’est éternel nous le savons, Sapiens est une espèce relativement jeune etc. Que notre espèce ne soit pas menacée d’extinction est une chose. Toutefois nous ne pouvons pas écarter la possibilité que Sapiens disparaisse avant l’heure, ce ne serait d’ailleurs pas la première fois dans la grande histoire du vivant.
Pour ce qui est de notre civilisation c’est différent, c’est un autre sujet, un autre problème. Celle-ci, la notre, a plus de 2000 ans, elle est très fatiguée etc.
En attendant, pour quelle raison l’extinction de notre espèce ne devrait-elle pas en inquiéter (avec ou sans « ») certains ? Tout comme celle de notre civilisation, d’ailleurs.
Et pour quelle raison ce large sujet ne devrait-il pas être discuté, traité, comme le sont la biodiversité, le climat etc. ?
Courrier International est un journal généraliste, ayant déjà le mérite de traiter les sujets en profondeur. De plus il rend compte de la diversité des points de vue venus des quatre coins du monde. Bien qu’il fasse partie du groupe des affairistes Niel-Pigasse et Kretinsky pour moi ce journal reste largement au dessus de la plupart des meRdias. Courrier international avait déjà traité ce sujet il y 17 ans. Lire cet excellent article publié le 09/03/2005 :
– « Vers un effondrement de la population mondiale. La bombe démographique n’est plus ce qu’elle était. »
Introduction : « Dans les décennies à venir, ce n’est plus la surpopulation mais la dépopulation qui menacera la planète. Ce coup de frein démographique sans précédent aura des implications imprévues pour les humains du XXIe siècle. »
Je trouve particulièrement intéressant le chapitre «Le monde moderne joue contre les enfants» (à la fin de cet article). Pour moi ça mérite réflexion. Et autre chose que des analyses et des conclusions simplistes :
– « Pour certains biologistes, l’homme moderne s’est créé un environnement où les plus forts, c’est-à-dire les plus prospères, sont précisément ceux qui ont le moins d’enfants, voire pas du tout.[…] De façon paradoxale, les parents du futur seront des individus en conflit avec l’environnement moderne […] Après tout, ne sommes-nous pas tous porteurs des gènes de nos ancêtres du néolithique, qui ont trouvé le moyen de faire assez d’enfants pour perpétuer l’espèce ? »
Le «spécialiste» maison en génétique devrait pouvoir répondre à la question. En attendant elle me fait penser à cette théorie que j’ai exposée le 19 JANVIER 2022 À 16:19 (“La Chine, mastodonte”). Ne répondez pas tous et en même temps, merci.
S’inquiéter de la dépopulation dans un monde qui n’a jamais été aussi peuplé, c’est en effet incroyable.
Depuis 1900, nous avons multiplié nos effectifs par 5 ! Même les projections qui servent de base à ceux qui s’inquiètent d’une future baisse de la population prévoient qu’à la fin du siècle nous soyons quand même plus nombreux qu’aujourd’hui !
C’est incompréhensible car tous les problèmes seront plus difficiles à résoudre dans un monde plus peuplé : la protection de la biodiversité, les émissions de polluants, la disposition des ressources le logement des hommes …
Appel aux écologistes à ouvrir les yeux.
Incroyable mais vrai. Et en même temps tout à fait légitime. Eh oui mon cher Didier !
Parce qu’après tout, puisque certains éprouvent autant le besoin de s’inquiéter de la Surpopulation… pourquoi d’autres ne pourraient-ils pas faire de même avec la Dépopulation ? C’est quand même étrange ce besoin de se faire peur, de se faire mal, non ? Mais après tout … à chacun sa came, non ?
Tout simplement parce que la surpopulation est vraiment un problème mon cher Parti d’en rire, voilà pourquoi je ne peux retenir la symétrie d’attitude que vous proposez.
Je suis même sûr qu’au fond de vous même vous le savez bien que c’est un problème le nombre des hommes.
Si on divisait par deux les effectifs de l’humanité nous reviendrions à peu près à l’année 1974 ! Le monde était-il vide en 1974 ?
Mais bien sûr que je le sais, que c’est un problème, le nombre des hommes.
De toutes façons nous n’avons que ça, des problèmes. Et pour couronner le tout, la Dépopulation risque encore d’en rajouter. Nous voilà donc bien avancés.
Blague à part, que vous inspire l’article du 09/03/2005 de Courrier international ?
Et cette théorie sur les gènes de nos ancêtres du néolithique ?