La crise liée à la pandémie de Covid-19 va-t-elle accélérer la transition énergétique, et donc la fin rapide du pétrole ? Le journaliste Jean-Michel Bezat estime que oui, la planète pétrole n’est plus dans la situation des contre-chocs précédents de 1986, 2008 et 2014. Il n’y a pas si longtemps, l’Agence internationale de l’énergie (AIE) prévoyait une production à 120 millions de barils par jour en 2030. Mais au plus fort de la récession d’avril-mai, la demande quotidienne est tombée de 100 millions à 70 millions de barils. Elle reculera de l’ordre de 8 % sur l’année. Et après ? Des tendances réduisent sa consommation, la limitation des voyages en avion, la percée des véhicules électriques, le développement de l’hydrogène comme à la SNCF, la réduction du transport maritime sous l’effet de relocalisations industrielles. Le directeur général de Shell admet qu’il est « très difficile » de dire si la consommation retrouvera rapidement son niveau d’avant-crise. Au sein des compagnies pétrolières, l’ambiance n’est plus à l’euphorie des heures fastes. Depuis cinq ans, elles ont réduit leurs dépenses d’exploration et n’ont jamais découvert aussi peu de brut : 10 milliards de barils en 2019, deux fois moins qu’en 2015. Dissipés les mirages des sables bitumineux du Canada, la multiplication exubérante des forages par 7 000 mètres de fonds marins, les projets fous dans l’Arctique, région déclarée « no-go zone » par Goldman Sachs fin 2019. La Bourse est un juge de paix implacable, les valeurs pétrolières reculent depuis des années. Les investisseurs institutionnels tiennent de plus en plus compte du risque systémique du réchauffement climatique : une partie importante des réserves, qui constituent l’actif de ces « zinzins », devra rester sous terre si l’on veut réduire les émissions de CO2.
Jean-Michel Bezat, le spécialiste énergie du MONDE, peaufine sa conversion aux réalités biophysiques. Adepte autrefois du tout-pétrole, militant du court-termisme du prix du baril fixé par le jeu de l’offre et de la demande, il se penche maintenant sur les problèmes structurels de la merde du diable, c’est-à-dire la raréfaction des ressources en énergie fossile, la contrainte climatique, la chute des cours en bourse. Bienvenue Jean-Michel au pays des militants de la descente énergétique liée au fait qu’on a déjà dépassé le pic du pétrole conventionnel depuis 2006. Pour en savoir plus grâce à notre blog biosphere :
10 avril 2020, post-Covid, une société sans pétrole ?
extraits : L’éditorial du MONDE titre : « Après la crise, sortir de notre addiction au pétrole. » Il s’intéresse au conjoncturel, le contre-choc pétrolier, une baisse du prix du baril manigancé politiquement par la Russie et l’Arabie saoudite. Il s’intéresse à la baisse de la demande qui risque d’être durable confinement oblige, et qui accentuera un cours à la baisse de l’or noir. Pourtant l’éditorial constate que le climat exige une diminution de la consommation de pétrole… mais il ne dit pas que le prix du baril doit augmenter !…
21 février 2019, Beyond Petroleum, des mouvements vers cet objectif
extraits : Jean-Michel Bezat, journaliste au MONDE, était un « spécialiste » du pétrole qui se contentait de commenter l’état du marché, c’est-à-dire le jeu de l’offre et de la demande. Aucune perspective à long terme, aucune mention des dangereux rapports entre pétrole et réchauffement climatique. Il était un adepte du court-termisme. Dans une chronique récente, il donne au slogan de BP, « Beyond Petroleum », une toute autre dimension. Sa prise de conscience des enjeux écologiques est réelle…
17 janvier 2016, Le juste prix du pétrole, le même en 2009 et en 2016 !!!
extraits : Le journaliste Jean-Michel Bezat* se contente de ce qu’il connaît, le jeu marchand de l’offre et de la demande : « juste prix du baril, prix qui assure la rentabilité des investissements de production sans tuer la demande de pétrole ». Donc pour faire plaisir à tout le monde, « un cours oscillant autour de 70 dollars ». Rien de nouveau sous le soleil, Bezat avait écrit exactement la même chose… en 2009 : Sous la rubrique matières premières (29-30 mars 2009), il s’interrogeait doctement sur le juste prix du pétrole ou optimum économique. Avait-il la réponse ? Oui, il avait la réponse : « Le prix équitable se situe autour de 70 dollars ». Pour l’affirmer, il suffisait au journaliste de recopier ce que réclame les pétromonarchies du Golfe. Mais n’occultons pas la conclusion que faisait Jean-Michel : « Le sursis que les pétroliers s’accordent ne fera que rendre plus difficile la résolution de l’équation climatique. »…
25 septembre 2011, Jean-Michel Bezat occulte la fin du pétrole
extraits : Jean-Michel Bezat occulte la fin du pétrole en laissant trop de place à un écolo-sceptique, Daniel Yergin. Son article du MONDE* est d’autant plus biaisé qu’il dévalorise les analystes du pic pétrolier, traités d’adeptes du peak oil alors que ce sont des géologues confirmés…
Le pétrole a été extrait pour la première fois vers 1860 ; il est probable qu’aux alentours de 2100 il sera une denrée rare au coût prohibitif. Soit environ 250 ans pour épuiser la totalité des réserves ; ce qui à l’échelle de l’évolution humaine représente un battement de cil (Homo sapiens est apparu il y a 300 000 ans). Réponse aux marchés: le pétrole n’est pas du tout mais alors pas du tout durable. L’agence internationale de l’énergie a publié en décembre 2018 un rapport précisant que le peak oil du pétrole CONVENTIONNEL avait été atteint en 2007. La même agence affirme maintenant que le peak oil du non-conventionnel (schiste et bitumineux), avait été finalement atteint en 2018.
Fixons l’objectif d’une transition rapide à partir de maintenant ; défi bien plus excitant que de continuer à creuser des trous pour maintenir cette ressource encore quelques décennies de plus.
C’est quoi une «transition rapide» ? Pas cette sacro-sainte Transition tout de même !
S’il est vrai que les « spécialistes » énergie et planète du Monde font en général passer leurs convictions avant les faits, rien ici n’étaye votre prédiction de l’explosion des coûts du pétrole. D’une part sur une perspective longue le prix du baril n’est pas lié à l’offre et à la demande (comme très clairement montré par Jancovici ), d’autre part la décrue sera lente, régulière et predictible, compatible avec les réserves mondiales et donc il y a très peu de risques d’une panique générale. Le fait que les grands acteurs de l’énergie, comme Total cité ici, s’engagent très clairement pour diversifier leur portefeuille énergétique en prévision de la décrue du pétrole contribuera en cette direction de stabilité globale.
Mr Letulleau, votre optimisme est un des facteurs qui nous empêche de prendre les mesures nécessaire pour rationner l’énergie et changer nos infrastructures collectives centrées sur un baril à faible coût. D’autre part mon pessimiste ne vient pas seulement de la raréfaction de l’or noir, l’expérience historique montre qu’un choc pétrolier ne découle pas des réalités biophysiques, mais de considérations géopolitiques : choc de 1973 causé par la guerre du Kippour, choc de 1979 causé par Khomeiny. A cette époque, le contre choc pétrolier découle de la découverte de pétrole non OPEP, et plus récemment la hausse des prix du baril avant 2008 a été amoindrie par le pétrole non conventionnel. Cette période est terminée, il n’y a plus de réserves facilement accessibles à bas prix le retour et énergie (EROEI) approche de 1. Enfin les ressources renouvelables n’apportera jamais l’abondance énergétique actuelle. On est coincé, définitivement !
Eh oui, on est coincé. Et ça c’est difficile à avaler. Il est d’abord là le problème. Comment accepter que la fête se termine ? That’s The Question !
Deux voies s’opposent :
– La plus inéluctable : sa raréfaction physique, ou quand l’exploitation deviendra non rentable parce que l’énergie d’extraction dépassera l’énergie que l’on pourrait en tirer en le brûlant.
– Ce qui est évoqué ici : que nous délaissions le pétrole, soit pour des raisons écologiques, soit suite à une crise économique qui diminuerait la consommation, ferait baisser le prix et interdirait les investissements nécessaires.
la seconde voie peut être inversée en cas de reprise économique. d’autant plus qu’une des alternatives est le charbon… plus polluant encore.
Quels que soient les aléas des prix je crois qu’à terme nous brûlerons tout le pétrole et c’est la raréfaction qui en déterminera la fin. La seule inconnue est la date, sans doute avant la fin du siècle même si quelques usages très particuliers peuvent subsister (des plastiques de qualité, une minorité pour certains transports ou activités)
C’est ce que je crois également. Fidèles à notre célèbre devise «je pompe donc je suis», nous pomperons (et brûlerons) jusqu’à la dernière goutte (accessible). Nous sommes même capables de pomper à perte, de dépenser en terme d’énergie l’équivalent de deux barils de pétrole pour n’en extraire qu’un. Un certain temps seulement. Et ensuite, faute de fusion et autres poudres de perlimpinpin, ce sera le charbon. Et après le charbon, les arbres.
Quand les marchés vont s’apercevoir de la fin inéluctable du pétrole, le prix du bail explosera et il y aura un choc pétrolier tel que la période de confinement avec l’arrêt temporaire de l’économie nous apparaîtra comme une parenthèse heureuse. Notre croissance est faite de la combustion des ressources fossiles ; elle s’arrêtera faute de carburant.
Alors nous maudirons les politiciens d’aujourd’hui qui ne savent pas nous préparer à ce funeste destin.
C’est normal, c’est par ce que les marchés perçoivent la problématique encore sous l’angle de l’incertitude ! C’est simple pour les marchés, au fur et à mesure que l’on s’approche du mur (j’y reviendrai ci-après) hésitent encore à savoir s’il faudrait faire baisser le prix du pétrole ou alors l’augmenter. Ah ben oui mais pourquoi ? Et ben tout dépend si on trouve une alternative crédible au pétrole ou pas ? S’il y a une alternative crédible susceptible de remplacer rapidement le pétrole alors le prix va chuter puisque remplacer par une autre alternative. Et s’il n’y a pas d’alternative crédible alors le prix va augmenter de manière explosive. Et alors ça serait quoi potentiellement l’énergie susceptible d’être crédible ? Et ben tout simplement l’énergie nucléaire à fusion ! Et le mur dans tout ça ? Et ben le mur se situe pour les années 2025/2026 où les premiers résultats des tests de la fusion par le projet ITER seront présentés
Tout est dans le « crédible » (au sujet de la fusion). Personnellement je n’y crois pas.
Moi non plus je n’y crois pas, d’autant que le projet ITER est strictement identique aux projets précédents de la fusion qui n’ont pas été concluant, notamment à cause des disruptions, la seule différence avec ITER que les journalistes nous présentent comme nouveau et ce qui est faux, étant que le tomahawk est plus gros c’est tout !
Mais bien pour revenir aux marchés, ils attendent que le verdict concernant la crédibilité soit prononcé, soit en 2025/2026… Bien que les scientistes pourraient avoir la mauvaise idée de jouer la montre et reculer la prononciation du verdict, tout ça pour continuer de percevoir de l’argent publique aux détriments des contribuables qui financent un projet sans avenir à fond perdu….
Oui, moi aussi je crois que la fusion est une illusion, ça ne marche pas depuis 50 ans (sauf dans les bombes dites H, mais là c’est facile on a pas besoin de maîtriser l’ensemble qui est détruit à l’usage) et ça ne marchera pas, on ne fait aucun progrès, nous ne savons pas confiner le plasma et ensuite nous ne saurions pas extraire de l’électricité puisque cela suppose un transfert de l’énergie du plasma vers des parties mécaniques ce qui semble en pratique ingérable.
De toute façon une source d’énergie miraculeuse…. serait in fine une catastrophe pour la planète