Un système structurellement mensonger

« Aujourd’hui, tout le monde prend la parole sur tout, des photos sont truquées, des faux communiqués sont diffusés sans contrôle. La parole de l’État, des scientifiques et des journalistes sérieux est dévalorisée car noyée dans un ensemble confus. J’ai vu les esprits se dissoudre dans un bain d’acide. (Emmanuel Macron) »

Nucléaire, le gouvernement travaille en catimini à la construction de six nouveaux EPR. La ministre de la transition écologique et le ministre de l’économie, Elisabeth Borne et Bruno Le Maire, donnent une feuille de route précise au président d’EDF, Jean-Bernard Lévy, pour « être en mesure de répondre à l’exécution d’un programme de construction de trois paires de réacteurs sur trois sites distincts ». Cela n’était jamais allé aussi loin. Aucune mise en doute n’existe dans la rédaction. Et le courrier de détailler que la construction de chaque paire sera « espacée de quatre ans et les tranches au sein d’une même paire de dix-huit mois ». Il n’y a pas d’alternatives, la filière nucléaire estime qu’une construction en série est le seul moyen de faire baisser les coûts et de donner de la visibilité aux sous-traitants.

Viande, les chercheurs de NutriRecs ont passé en revue une centaine d’études qui montrent une association entre une consommation importante de viande et plusieurs types de maladies. Ils relèvent qu’une diminution de la consommation de viande à trois portions par semaine diminue le risque de mortalité, toutes causes confondues, de 13 %. Malgré le niveau de preuve de ces résultats, les chercheurs recommandent « de continuer plutôt que de réduire la consommation » de viande. Cette conclusion a été clairement rédigée dans le but de créer de la confusion. On a appris que parmi ces chercheurs, des inconnus dans le domaine de la nutrition pour la plupart, au moins trois d’entre eux n’ont pas déclaré leurs relations avec le secteur agroalimentaire, contrairement aux exigences éthiques.

Politique : Facebook a accepté de diffuser une publicité mensongère de la campagne de Donald Trump accusant Joe Biden « d’avoir promis 1 milliard de dollars à l’Ukraine s’ils licenciaient le procureur qui enquêtait sur l’entreprise de son fils » alors que Donald Trump est visé par une procédure de destitution pour avoir demandé à son homologue ukrainien d’enquêter sur son possible rival démocrate. Joe Biden a demandé à Facebook de retirer cette vidéo mensongère, ce que le réseau social a refusé de faire. Facebook a mis en place des partenariats de lutte contre la désinformation, mais les publicités n’y sont pas soumises. La transparence numérique n’empêche pas le mensonge.

Médicament, le procès du Mediator : De ce désastre sanitaire – plusieurs centaines de morts, des milliers de personnes handicapées à des degrés divers –, l’instruction désigne deux responsables. D’une part, les laboratoires Servier, qui répondent de « tromperie aggravée » pour avoir « sciemment dissimulé » les propriétés pharmacologiques du Mediator, un médicament présenté comme antidiabétique mais trop souvent prescrit comme coupe-faim. D’autre part, l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps), devenue Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, poursuivie pour « blessures et homicides involontaires », à laquelle sont reprochées une série de défaillances et une grave impéritie dans l’exercice de sa mission de contrôle. Un médicament aux qualités thérapeutiques douteuses parvient à se maintenir pendant trente-quatre ans sur le marché alors qu’il présente des risques graves pour la santé en passant outre les multiples alertes. Entre 1998 et 2003, les autorités de santé en Suisse, en Italie et en Espagne s’inquiètent des effets secondaires du benfluorex – la substance chimique active du Mediator – et adressent des demandes d’explications complémentaires aux laboratoires Servier, qui ne leur répondent pas mais retirent dans la foulée leur médicament de ces trois marchés, en se gardant de le signaler aux autorités de la santé française et européenne. Le président du centre de pharmacovigilance va lui-même présenter sa demande à l’Agence du médicament pour que le médicament soit retiré. En vain. La conclusion est terrible : « Le doute profitait toujours au médicament. La vie du médicament est prioritaire sur la vie des malades. » Le salut est venu de l’extérieur, des lanceurs d’alerte Irène Frachon, Catherine Hill, Alain Weill, Gérard Bapt, parce qu’ils n’appartenaient pas à ce système. 

3 réflexions sur “Un système structurellement mensonger”

  1. Didier Barthès

    Un système « structurellement mensonger » n’est il pas le pendant obligé de tout pouvoir, et n’est-ce pas la mise en place de modes de communication rapides et élargis qui donne à cette dérive un caractère plus apparent et plus inquiétant ? Jules César disait-il la vérité aux romains ?

    1. Bonsoir Didier Barthes.
      Aux deux premières questions, oui bien évidemment.
      A la troisième , non bien évidemment.

  2. Macron se désole t-il réellement de cette grande confusion (qui fait « les esprits se dissoudre »)… ou bien Macron fait-il seulement semblant ? Manu est-il sincère, honnête, brillant… est-il de gauche, d’extrême gôôôche, etc. etc. … ou pas ?
    Comme pour tout et n’importe quoi, aujourd’hui chacun peut croire n’importe quoi. C’est à dire ce qui l’arrange le mieux. Nous savons expliquer cette tendance qui nous pousse à croire ce qui nous arrange, ce qui nous fait le plus de bien. Eh bien, en réduisant à néant n’importe quelle vérité, n’importe quelle connaissance scientifique, le Système nous offre aujourd’hui le Summum. Désormais chacun peut croire ce qu’il veut, disons ce qu’il peut… en toute lé-gi-ti-mi-té ! Si je ne supporte pas l’idée que mon cerveau préfère croire ce qui m’arrange, ni l’idée que le réchauffement climatique est une des conséquences de mon hubris…. si ces idées me déplaisent, m’incommodent … NO PROBLEM ! En deux ou trois clics je règle mon problème. Aujourd’hui je peux même trouver des « arguments » pour soutenir que la terre est plate. On peut le déplorer, on peut pleurnicher « misère misère ! », en attendant c’est comme ça.
    En attendant, également… demandons-nous à qui profite cette grande confusion ? Qui sont les plus ennuyés lorsque « la parole de l’État, des scientifiques et des journalistes sérieux est dévalorisée car noyée dans un ensemble confus » ?

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