Ville durable, un oxymore de plus

Le propre de l’oxymore est de rapprocher deux réalités contradictoires. Développement durable, agriculture raisonnée, marché civilisationnel, financiarisation durable, flexisécurité, moralisation du capitalisme, etc. La montée des oxymores constitue un des faits révélateurs de la société contemporaine.

Plus l’on produira des oxymores, plus les gens seront soumis à une sorte de double bind permanent. Ils seront désorientés et rendus inaptes à penser et à accepter les mesures radicales qui s’imposeraient dans l’ère de l’après-pétrole. C’est le moment de rappeler l’étymologie grecque d’oxymore, qui signifie « folie aiguë ». La ville n’échappe pas à cette épidémie d’oxymores.

Albert Levy : Valence coche toutes les cases de la ville durable : politique de tourisme durable, actions pour la neutralité carbone (centrale solaire socialisée, éclairage public intelligent, mobilité douce, espaces verts, agriculture urbaine… mais la catastrophe climatique pose la question de la durabilité des villes face au nouveau régime climatique. Les inondations catastrophiques de Valence ont offert un paysage urbain apocalyptique. On a invoqué à juste titre les choix urbanistiques d’extension de Valence, la bétonisation tous azimuts, l’artificialisation excessive des sols. Les choix économico-politiques ont transformé Valence en métropole de près de deux millions d’habitants.

Dans un monde qui s’urbanise à grande vitesse (60 % de la planète aujourd’hui), les villes, par leur fonctionnement et leur croissance, produisent 75 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre, principale cause du réchauffement climatique. Elles sont devenues d’énormes agrégats urbains, aires métropolitaines étalées totalement dépendantes des énergies fossiles. Politique de transition et politique de métropolisation sont incompatibles, la métropole durable reste un oxymore. En Espagne comme ailleurs,l es villes doivent s’adapter à la hausse inéluctable du réchauffement. Elles doivent se protéger de ses impacts dévastateurs en repensant l’urbanisme.

Le point de vue des écologistes ruraux

Albert Levy est un rigolo, « les villes doivent s’adapter… les villes doivent se protéger… » Comment ? Il n’en sait rien. Nous avons la réponse, tout est question de taille. Une ville de 2 millions d’habitants comme Valence ne sera jamais durable. Les difficultés de tous ordres ne seront pas seulement inondations ou sécheresse, mais aussi blocage énergétique, raréfaction des emplois, crises socio-politiques… car comme l’indique l’article en passant trop rapidement, les villes qui n’ont pas taille humaine sont aujourd’hui « totalement dépendantes des énergies fossiles ». Le mot d’ordre devrait devenir « désurbanisation », retour des urbains à la terre, l’inverse de l’exode rural auquel la « révolution agro-industrielle » nous a obligé.

Valence, fondée en 138 av. J.-C. par un consul romain, avait moins de 10 000 habitant à l’origine et c’était déjà trop. En 75 av. J.-C. la ville est détruite, entre 260-270 la ville est détruite, en 625 la ville est pratiquement abandonnée, en 2024 la ville commence à être détruite… cette fois par la nature.

le débat sur lemonde.fr

Michel SOURROUILLE : L’homme est-il responsable de ses malheurs ? Une controverse célèbre entre Voltaire et Rousseau eut lieu lors d’un raz-de-marée qui ravagea Lisbonne le 1° novembre 1755. On compta plus de 50 000 victimes. Voltaire se désole de la fatalité et de la cruauté du sort dans un poème sur le désastre de Lisbonne. 

J.J.Rousseau fit à Voltaire cette réponse : « Vous auriez voulu, et qui ne l’eut pas voulu !  que le tremblement se fût fait au fond d’un désert. Mais que signifierait un pareil privilège ? […] Serait-ce à dire que la nature doit être soumise à nos lois ? La plupart de nos maux physiques sont encore notre ouvrage. Sans quitter votre sujet de Lisbonne, convenez, par exemple, que la nature n’avait point rassemblé là vingt mille maisons de six à sept étages, et que si les habitants de cette grande ville eussent été dispersés plus également, et plus légèrement logés, le dégât eût été beaucoup moindre, et peut-être nul. (Lettre sur la providence)

pm22 : On devrait construire les villes à la campagne : on n’aurait pas ces soucis. Et puis, l’air y est plus sain…

InG : Alphonse Allais avait raison sauf sur un point, la dépendance à la voiture du campagnard mais ça, il ne pouvait pas le savoir.

pm22 @InG : Ma grand-mère allait en charrette à âne vendre ses volailles sur le marché de la petite ville, ma mère, jeune fille, l’accompagnait.. Plus de 10km dont la moitié en chemin non goudronné. En plein hiver, quand il pleuvait trop et que le chemin était détrempé, il fallait le char à bœuf. La voiture a du bon. Ok, ok, c’était le bon temps : le temps des sabots.

LIRE, La politique de l’oxymore de Bertrand Méheust (2009)

En savoir plus sur les oxymores grâce à notre blog biosphere

Transition énergétique, un oxymore de plus

extraits : La « transition » énergétique  n’a pas eu lieu, elle n’aura jamais lieu, la croissance record des renouvelables ne fait rien à l’affaire. Du point de vue des écologistes, il faut parler de « rupture » d’’avec la société thermo-industrielle, pas de molle transformation progressive. Le nucléaire n’a pas remplacé le gaz qui n’a pas remplacé le pétrole qui n’a ps remplacé le charbon qui n’a pas remplacé le bois. Nous vivons sur une hypothèse (la substitution) qui n’a pas raison d’être si nous ne devenons pas plus frugaux. Rien de nouveau sous le soleil, hélas….

Nucléaire vert, énergie durable, oxymores

extraits : Le nucléaire classé énergie « verte » et le gaz « énergie de transition », la taxonomie européenne ou classement des activités économiques en fonction de leurs émissions de CO2 se révèle pour ce qu’elle est, un exercice purement politicien. Le propre de l’oxymore est de rapprocher deux réalités contradictoires. Nucléaire vert, moteur propre, développement durable, agriculture raisonnée, financiarisation durable, vidéoprotection, etc. La montée des oxymores constitue un des faits révélateurs de la société contemporaine. Ces zombies nous suggèrent perfidement la possibilité de concilier l’inconciliable, c’est du pur greenwashing (écoblanchiment)….

Croissance durable, un oxymore obtient le prix Nobel !

extraits : Un bon économiste est d’abord un bon écologiste. Mais la Banque de Suède, qui a attribué le « prix Nobel » d’économie aux Américains William Nordhaus et Paul Romer, ne le sait pas encore. Les colauréats ont paraît-il « mis au point des méthodes qui répondent à des défis parmi les plus fondamentaux et pressants de notre temps : conjuguer croissance durable à long terme de l’économie mondiale et bien-être de la planète ». Comme chacun devrait savoir, une personne qui croit encore qu’une croissance à long terme est possible dans un système planétaire clos (dont on a déjà transgressé toutes les limites) est soit un fou, soit un économiste….

Croissance verte, l’oxymore de la Banque mondiale

extraits : Jusqu’à présent on disait « la croissance d’abord l’environnement plus tard », maintenant il y a la croissance verte des riches et la croissance verte des pauvres. Comme le dit un document du 10 mai 2012 de la Banque mondiale, il faut « la croissance verte pour tous » (Inclusive Green Growth : The Pathway to Sustainable Development). Mais les coûts de la dégradation de l’environnement sont estimés à près de 10 % du PIB en Chine, ce qui veut dire qu’une croissance économique de 10 %, score chinois, ne fait pas avancer la richesse réelle du pays….

Soumission/ volontaire, comment sortir de cet oxymore ?

extraits : Nous aimerions une société idéale où l’individu ne serait conforme aux autres que si chacun répondait par son comportement aux exigences de l’éthique et de la solidarité. Mais éthique et solidarité sont souvent contradictoires. Il y a trop souvent EUX et NOUS, particulièrement dans une situation de pénuries. On accepte de partager les difficultés dans son groupe, on rejette d’autant plus violemment les autres. La montée de l’extrême droite dans le monde est le signe inquiétant de cette dérive. Pourtant sortir de la soumission volontaire à son groupe d’appartenance peut s’apprendre….

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