Le 24 février 2022, la Fédération de Russie a envahi son voisin ukrainien. La contre-offensive de Kiev en territoire russe, lancée le 6 août 2024, ne change pas fondamentalement la donne : 150 000 soldats russes au moins sont déjà morts « pour rien » et beaucoup trop de soldats ukrainiens… sans compter les pertes civiles.
Pourtant la Russie n’est pas prête à des négociations, le conflit s’enlise car Poutine n’est qu’un dictateur qui veut toujours avoir raison. Toute forme de dissuasion, militaire ou non-violente, ne joue qu’à la condition que l’adversaire soit relativement raisonnable. Des chefs d’État peuvent se lancer dans des entreprises parfaitement démentielles, un peuple peut mener contre un autre une guerre d’extermination, réaliser un génocide, déporter en masse… Ce qu’il reste des peuples autochtones d’Amérique en est un témoignage bouleversant.
Mais que ce soit clair. Une société œuvrant pour la paix et non pour la guerre n’aurait pas besoin d’armée. Avec des citoyens profondément objecteurs de conscience, la Russie n’aurait pas suivi les fantasmes de gloire de Poutine, elle n’aurait pas envoyé des supplétifs se faire tuer en Ukraine. La Russie aurait été un pays déterminant au niveau international pour éliminer toutes les armées et construire une paix durable. Mais pour cela, il faudrait que les élites russes acceptent d’éduquer les consciences individuelles de chacun. Le budget des armées serait amplement suffisant pour financer l’apprentissage généralisé à la résistance à l’injustice. Le pays ferait même des économies, et Poutine n’aurait jamais conservé son trône….
à lire sur ce blog,
Manifeste du pacifisme (Michel Sourrouille, 2010)
Synthèse de ce livre de cent pages : Il serait dangereux de se laisser aller à un antimilitarisme sommaire : un peuple a le droit et le devoir de se défendre contre une agression extérieure. Autrement dit, la remise en question de la défense armée ne peut aller sans la recherche d’une autre forme de défense. Certains préconisent un système de défense qui consiste à armer la population et à fonder la résistance sur des milices populaires. Mais à la différence de la défense nationale armée, qui a pour seul but la défense du territoire national, la défense civile non violente est la prolongation particulière d’une attitude permanente à l’égard de l’injustice sociale et du pouvoir. L’attitude non-violente dépasse le problème de la guerre et de la paix. Il y a continuité entre la lutte à l’intérieur d’un pays pour une plus grande justice, et l’action contre un envahisseur ; ce sont les mêmes techniques qui sont utilisées dans les deux cas, dans le même esprit. Une population habituée à ne pas tolérer les atteintes aux droits des personnes et à réagir immédiatement devient, pour un envahisseur ou un pouvoir dictatorial, un mur sur lequel sa violence se brise. Contrairement à ce qui se passe dans la lutte armée où des gens qui ne se connaissent pas se tuent au profit de gens qui se connaissent bien et ne se tuent pas, la lutte non-violente permet à ceux qui, en d’autres circonstances, se seraient entre-tués, de mieux se connaître et affaiblit le pouvoir de ceux qui auraient bénéficié du carnage. Tout pouvoir a besoin de la collaboration active d’une partie de la population. La stratégie non-violente s’appuie sur une série de techniques de non coopération : grève sous toutes ses formes (partielle, générale, tournante, grève du zèle) de la part des travailleurs, boycott des consommateurs, refus de l’impôt des contribuables, démission ou résistance des notables, etc. Ajoutons qu’en cas de péril extrême, la défense non-violente ne s’interdirait pas de recourir à des actes de sabotage non meurtrier.
Toutes ces méthodes nécessitent de l’imagination et du courage. Gandhi disait : « Je vois bien comment je peux enseigner la non-violence à un violent, mais je ne peux pas l’enseigner à un lâche. » Dès qu’une part importante de la population refuse de coopérer, la situation du pouvoir devient difficile. Elle devient impossible si le refus se généralise.
La résistance non-violente présent trois avantages immédiats par rapport à une résistance armée. Tout d’abord, l’absence de résistance armée rendrait vraisemblablement la période d’invasion beaucoup moins meurtrières. Chacun serait bien conscient que même si la résistance non-violente devait coûter des vies humaines, toute forme de résistance violente en coûterait bien davantage. Second avantage, toute la population résisterait en restant sur place. On éviterait ainsi l’affaiblissement considérable qui résulte d’une mobilisation militaire : rupture des familles et ralentissement de l’activité économique. Troisième avantage, une attaque de l’adversaire n’est nullement ressentie comme un échec, mais comme une imprudence de sa part. L’armée adverse est rentrée dans un piège quand l’action non-violente est bien préparée. La tactique non-violente consiste à affaiblir la liaison entre l’Etat agresseur et les individus qui composent ses forces armées. On fait prendre conscience aux agresseurs qu’ils ne courent aucun risque en tant que personnes, mais qu’on leur opposera systématiquement le plus ferme des refus d’obéissance aussi souvent que nécessaire. La tactique à adopter durant la première phase du conflit est d’éviter les affrontements avec les troupes d’occupation et de faire connaissance quand les troupes s’installent.
Ainsi, lors de l’invasion de la Tchécoslovaquie, les États du pacte de Varsovie ont dû rapatrier des troupes complètement démoralisées par la résistance non-violente à laquelle elles s’étaient heurtées. Si les six jours de résistance non-violente en Tchécoslovaquie ont suffi à mettre en difficulté l’Etat soviétique, on peut imaginer l’efficacité que pourrait avoir une résistance non-violente dûment préparée pendant des années par une population maîtresse d’elle-même et consciente de ce qu’elle veut défendre.
Contrairement à la lutte armée qui peut servir à défendre n’importe quelle cause y compris et de préférence les pires, la lutte non-violente n’est adaptée qu’à la défense des causes réellement justes. Et de toute façon toute forme de dissuasion, militaire ou non-violente ne joue qu’à la condition que l’adversaire soit relativement raisonnable. Des chefs d’Etat peuvent se lancer dans des entreprises parfaitement démentielles, un peuple peut mener contre un autre une guerre d’extermination, réaliser un génocide, déporter en masse. Ce qu’il reste des peuples indiens d’Amérique en est un témoignage bouleversant.
Application à l’Ukraine d’une défense civile non violente,
Ukraine, éviter l’invasion était possible
extraits : Le principe le plus fiable est celui des objecteurs de conscience : « Si tu veux la paix, prépare la paix. » Si les Ukrainiens avaient laissé les chars russes arriver à Kiev sans intervenir, un gouvernement pro-Poutine aurait été mis en place, mais il n’y aurait eu aucun morts. Certes une dictature peut perdurer, mais tant que les citoyens feront preuve de soumission volontaire. Aucune dictature n’est éternelle, d’autant plus qu’elle repose le plus souvent sur une seule personne. Hitler, Staline ou Poutine n’ont que leur temps, ils ne maîtrisent pas l’avenir. Le problème n’est donc pas l’absence temporaire de démocratie, mais l’inertie des peuples. Les militaires ont le pouvoir parce qu’ils sont institutionnalisés, on paye des impôts pour les équiper et les nourrir.
Une population d’objecteurs de conscience ne se laisserait pas faire, elle aurait la capacité de résister à toute situation imposée à mauvais escient. Une armée composée d’individus qui déterminent par eux-mêmes pour quoi et pour qui il faut se battre ne pourrait être utilisée par aucun pouvoir politique.
Bonjour,
bel article mais je préciserais : Ce sont les 2 pays Russie ET Ukraine qui ne sont pas prêts à négocier.
Le conflit s’enlise car les 2 dirigeants ne veulent pas faire la paix (sauf si l’autre abandonne toute revendication) et veulent toujours en découdre.
J’ajoute qu’une guerre se fait à 2 et que ce n’est pas avec un discours simpliste disant qu’il y d’un coté un bon et de l’autre un méchant qu’on résout le problème, c’est toujours malheureusement un peu plus compliqué que celà
Rémi
Bonjour Rémi, vous avez malheureusement raison, c’est toujours malheureusement un peu plus compliqué que cela. Mais que voulez-vous, malheureusement les discours simplistes sont tellement plus simples à comprendre.
Si les accords de Minsk auraient été respectés; on n’en serait pas là ! Il faut que la France sorte de l’OTAN ! Vous installez des bases américaines à la frontière russe; et vous vous plaignez qu’ils ripostent ! Quelle mauvaise foi ! Si les russes installaient des bases au Canada à la frontières des Usa, alors les Usa envahiraient le Canada; puis si les russes installaient des bases en Suisse, Luxembourg et Belgique, alors la France riposterait et envahirait la Belgique, Luxembourg ou Suisse ! Et oui c’est la faute des nos dirigeants européistes qui installent des bases américaines à la frontière russe. Il n’y a pas de fumée sans feu !
L’accord de Minsk (1991), le protocole de Minsk (2014), les accords de Minsk II (2015)… comme la plupart des accords et des traités de Paix, ici ou là partout dans le monde… n’ont toujours engagé que les naïfs qui y croient. En attendant, ces parchemins ont le mérite de pouvoir dire qui des signataires les a respectés, ou bafoués.
Seulement, là encore, comme pour n’importe quel verset de la Bible ou du Coran… selon qu’ON soit pro-ceci ou anti-cela, selon les lunettes et cætera, chacun aura sa propre lecture, sa propre interprétation ou traduction. Les pro-Poutine, par exemple, ne pourront pas faire autrement que de nous «démontrer» que le gentil Vlad ne fait que défendre son peuple bien-aimé. Qui l’a toujours élu pour ça et patati et patata. Et que les vilains ce sont les Ricains. Et leurs alliés bien sûr, choisis ton camp camarade.
Bref, c’est de bonne guerre comme ON dit. Misère misère !
Quelle langue de bois ! Ce sont bien les européistes et l’Otan qui ont provoqué et initié cette situation en encerclant la Russie avec des bases américaines. Vous avez poussé la Russie a déclencher une guerre. Les européistes et l’Otan savait très bien que la Russie réagirait, c’était le but recherché que de les pousser à la guerre. Hormis que Bruno Lemaire n’a pas réussi à faire s’effondrer l’économie russe, car les russes avait leur propre système pour contourner Swift… Les européistes se sont fait avoir tout seul… Car l’objectif de l’Occident (Usa Europe) dans le fond étant de piller les ressources naturelles de la Russie et contrôler les prix des matières premières… A part que les russes s’étaient préparés et ça ne s’est pas passé comme prévu…
– « Vous avez poussé la Russie a déclencher une guerre.»
Qui vous ? En tous cas pas moi !
Voir (sur Wikipedia) la Liste des pays qui ne possèdent pas d’armée.
La Russie sans armée est tout aussi difficile à imaginer que les US ou la France sans armée.
Toutefois, ça peut toujours aider, quelques pensées et slogans à méditer :
– « À bas tous les pouvoirs » (Colonne de fer Espagne 1936)
– « Un jour, aujourd’hui, demain, plus tard… nous aboliront l’argent. » (Élisée Reclus 1891)
– « Les nations étant inévitablement plus bêtes que les individus, toute pensée a le devoir de se sentir en révolte » (Émile-Auguste Chartier, dit Alain )
– « Faites l’amour, pas la guerre » (slogan de mai 1968)
– « À bas toutes les guerres » (Cabu)
– « Faites l’amour, pas les magasins » (et pas qu’à la Saint Valentin)
Bref, À bas toutes les armées !
N’en déplaise à plus d’un, toutes ces pensées, tous ces slogans, n’auraient jamais pu sortir d’un cerveau de droite.
– « Une population d’objecteurs de conscience ne se laisserait pas faire, elle aurait la capacité de résister à toute situation imposée à mauvais escient. Une armée composée d’individus qui déterminent par eux-mêmes pour quoi et pour qui il faut se battre ne pourrait être utilisée par aucun pouvoir politique. » (Biosphère)
Tout à fait ! En remplaçant «objecteurs de conscience» par autre chose…
par exemple «citoyens» (individus libres, responsables, adultes, éclairés etc.) …
et ce mot affreux, dont il faut se Défaire, «armée»… en le remplaçant tout simplement par «peuple», ou «population» … se dessine alors cette utopie qui faisait tant rêver les Reclus, Bakounine, Cabu et Jean Passe.
Bref, À bas tous les pouvoirs, À bas toutes les armées ! Et Vive l’Anarchie !