La footballeuse Megan Rapinoe, championne du monde en 2015 et 2019, n’en fait qu’à sa tête : « Après avoir posé le genou à terre pour la première fois avant le match de la ligue à Chicago, je me suis à nouveau agenouillée dans le Maryland. Le tollé a été énorme et instantané. Les Blancs étaient furax. Pfiou, ce qu’ils étaient furax ! Quand j’ai dit aux journalistes que je m’agenouillais pour dénoncer la suprématie blanche et les violences policières, beaucoup de Blancs l’ont pris de façon incroyablement personnelle. J’ai trouvé ça bizarre. Ce n’était pas leur faute en tant qu’individus s’il y avait eu l’esclavage ; mais c’était notre responsabilité à tous d’affronter le problème en rejoignant la campagne de protestation de Colin. Je croyais que le fait d’être blanche m’offrait une certaine immunité. J’étais également une femme – grande gueule, certes, mais aux yeux de beaucoup d’hommes blancs en colère, assez peu menaçante. Je ne m’attendais pas du tout à une indignation de cette ampleur. Les critiques ne cessaient d’affluer. Les courriers haineux déferlaient au bureau de mon agent. Les gens demandaient que je sois virée de l’équipe. Les fils d’actualité de mes réseaux sociaux débordaient d’insultes. La Fédération a sorti un communiqué : « Représenter son pays est un privilège et un honneur. Devant un public souvent mondial, c’est un privilège de représenter son pays. Aussi attendons-nous des joueurs qu’ils se lèvent en hommage à notre drapeau, au moment où est joué l’hymne national. » Ma sœur Jenny a appelé. Elle aussi jugeait que j’avais été trop provocatrice. »*
Megan Rapinoe confirme notre pensée allergique à la superficialité, celui ou celle qui est jugé(e) comme provocateur-trice ne veut pas provoquer, seulement inciter à réfléchir. Par contre ceux qui se sentent provoqués ont des réactions démesurées, comme s’ils n’avaient pas d’argument pour essayer de chercher ensemble le consensus entre opinions contradictoires. La tolérance réciproque est à la base d’un système démocratique ; en venir aux insultes et menaces est une grave atteinte à l’intelligence collective.
Ceci posé, rentrons dans le détail. S’agenouiller lors de l’hymne national pourrait être interprété comme un hommage à la nation, et rester debout comme une agression ; toute signification peut se retourner quand il s’agit de symboles sociaux, tous plus artificiels les uns que les autres. Respecter un drapeau national, c’est d’ailleurs faire preuve de chauvinisme ; le passage est facilité entre se déclarer la guerre sur un terrain de foot et déclarer la guerre les armes à la main. L’état d’esprit est le même, la confrontation à l’Autre, l’idée d’écraser l’Adversaire au nom de son pays. Donnez à un idiot un drapeau à agiter, apprenez-lui un hymne à chanter et quelques âneries patriotiques à répéter frénétiquement, et il marchera vers la bataille pour tuer d’autres idiots marchant en chantant sous un drapeau adverse. La question de fond mérite d’être posée en France : est-ce que le drapeau bleu-blanc-rouge ou la Marseillaise font partie des valeurs de la République ? Si les seules valeurs à reconnaître sont les principes de liberté, d’égalité et de fraternité ainsi que la déclaration universelle des droits de l’homme, les symboles qui ont alimenté tant de guerres n’en font pas partie.
Approfondissons l’analyse. Est-ce qu’un match de foot entre joueurs professionnels complice de la société du spectacle et du fric mérite d’être organisé ? Du point de vue des écologistes, la réponse est NON et détaillée sur notre blog biosphere :
* extraits de son livre « One life », Stock, 278 pages, 20,50 euros.
https://www.lemonde.fr/sport/article/2020/11/07/megan-rapinoe-je-m-agenouillais-pour-denoncer-la-suprematie-blanche-et-les-violences-policieres_6058848_3242.html
Aux USA, et ailleurs aussi, ne pas respecter l’hymne national, avec tout ce qu’il sous entend, est un véritable blasphème. Le geste de protestation de Tommie Smith et John Carlos aux J.O de 1968 signa la fin de leur carrière sportive. Aujourd’hui pour signifier la même chose, la mode est à mettre un genou à terre, durant l’hymne national.
Et ce geste devient de plus en plus courant sur les stades, notamment depuis la mort de George Floyd. Aujourd’hui on voit un ou deux types debout, et les autres avec le genou à terre.
Devant un tel scandale… la logique voudrait que les insoumis soient punis, bannis. Seulement voilà, comment bannir tous ces mécréants et en même temps sauver le Spectacle ? La Fédération américaine de football (USSF) ainsi que la Ligue de football américain (NFL) ont vite trouvé la solution. Elles autorisent désormais ce genou à terre, pendant l’hymne national. Et tout le monde ou presque, voit là une avancée.
En attendant je trouve que le poing levé a bien plus de gueule.
Je confirme, ne pas respecter l’hymne national c’est mal vu. Et pourtant, elle avait de la gueule ma Marseillaise version reggae, non ?
Aux armes et caetera !
En France l’outrage à l’hymne national est puni par la loi. L’outrage au drapeau tricolore aussi. Tout ça est qualifié d’outrage aux symboles nationaux .
Massacrer la Marseillaise, façon Gainsbourg ou façon Ruffin, ça peut-être mal interprété. Brûler le drapeau tricolore c’est comme brûler un billet de 500, c’est pas bien. Et puis c’est pas beau. Piétiner le drapeau non plus, attention faut pas déconner avec ça. Mais on peut porter un slip ou un soutif arborant les couleurs nationales, ça c’est bien. C’est le message qui compte, on peut montrer son slip ou son soutif, à condition qu’il soit beau. Notre drapeau il est beau, notre hymne aussi. Les chants militaires c’est ce qu’il y a de plus beau.
«Chanson pour le soldat Morales». Les militaires adorent. Moi aussi.
Aujourd’hui je suis d’accord avec l’analyse de Biosphère. Personnellement, du foot, je n’en ai rien à foot. En fait pas exactement, j’en dénonce moi aussi ses excès, principalement dans son professionnalisme et dans la compétition. Je ne connaissais pas cette footballeuse, mais grâce au Progrès, en 2 clics et en moins de 2 minutes j’en apprends suffisamment sur elle. Pas au sujet de ses talents de footeuse, bien sûr, mais sur ses prises de positions politiques.
Cela m’a fait penser de suite à ces deux athlètes noirs sur un podium, levant leurs poings gantés de noir. Devant le monde entier, ces deux champions américains dénonçaient là les inégalités et les injustices dont étaient victimes les Noirs américains. C’était en 1968 aux J.O de Mexico.
50 ans plus tard Megan Rapinoe s‘agenouille. Pour finalement dénoncer la même chose. Les années passent, les modes aussi, notamment les modes d’expression. Jusque là s‘agenouiller était un geste de soumission, aujourd’hui il faut voir là un geste de rébellion. Comme quoi il faut suivre la mode pour ne pas être largué. Dans 50 ans, lorsque nous verrons des footeux et des footeuses se rouler par terre, peut-être faudra t-il comprendre qu’ils dénoncent là quelque chose d’encore plus intolérable que le fait d’avoir raté un but. En attendant, quelles que soient les bonnes intentions, tout ça reste du Spectacle.
Je rêve que dans 50 ans il n’existe plus de podiums, plus de jeux du Cirque, plus de compétitions, plus de guerres. Que d’une manière ou d’une autre, les guerriers, les incendiaires, les compétiteurs, les champions, les winners comme les loosers disent NON à tout ça. NON à cet esprit que dénonce très bien Biosphère. NON à l’engrenage de la violence qui engendre la violence, de la haine qui engendre la haine, etc. En attendant, on peut rêver.