Renaud Camus sur Twitter, le 18 avril 2019 : « Une boîte de préservatifs offerte en Afrique, c’est trois noyés de moins en Méditerranée, cent mille euros d’économies pour la CAF [Caisse d’allocations familiales], deux cellules de prison libérées et trois centimètres de banquise préservée. » Poursuivi pour injure raciale, la procureure avait réclamé quatre mois d’emprisonnement avec sursis et une amende de 5 000 euros. Mais le tribunal de Paris a débouté les cinq associations antiracistes parties civiles qui poursuivaient Renaud Camus. Le tribunal a estimé qu’« aucun sens ni aucune portée ségrégationniste, discriminatoire, raciste ou “raciale” ne ressortent du propos incriminé ».
Les juges rappellent dans un long développement que la liberté d’expression « vaut aussi pour les idées qui heurtent, choquent ou inquiètent l’État ou une fraction quelconque de la population ». Ils considèrent ainsi « que la caricature, la satire et la parodie, même délibérément provocantes et grossières, participent de la liberté d’expression (…) par une forme de commentaire social lequel, de par l’exagération et la déformation de la réalité qui le caractérise, vise naturellement à provoquer ». Le jugement admet que le tweet est bien dirigé envers un groupe de personnes à raison de son origine, ou de son appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion, mais « pour avoir une origine géographique commune, le groupe des personnes visées par leur seule origine africaine n’est pas considéré en l’espèce à raison de l’essence des personnes qui s’y rattachent », et Renaud Camus n’impute à ce groupe « aucun fait précis susceptible d’un débat sur la preuve de sa vérité ». Le tribunal admet aussi que « face à des drames humains et des situations de précarité », les propos « peuvent choquer, et heurter la délicatesse mais ils participent du style acide et décalé, voire cru, de l’écrivain. Ce style et ces images relèvent du choix du mode humoristique pour traiter par l’absurde d’un sujet politique, et dramatique, dans le cadre d’un tweet propice à une concentration du propos autour de formules choc ».
Le message de Renaud Camus, conclut le tribunal, « ne justifie dès lors pas, dans une société démocratique, une limitation du libre exercice de la liberté d’expression, laquelle doit être d’interprétation stricte, et dont les limites admissibles n’ont pas en l’espèce été dépassées, par la critique satirique d’un système de croissance démographique et de certaines de ses conséquences ». Quelques posts de notre blog biosphere sur la liberté d’expression :
11 septembre 2020, ADMD, Facebook censure la liberté d’expression
30 janvier 2010, Le droit au blasphème, c’est démocratique
15 mai 2019, Interdisons de parole les négationnistes du climat
2 septembre 2013, La publicité ne relève pas de la liberté d’expression
La liberté d’expression est comme l’écologie, elle a bon dos. On pourrait aussi y rajouter l’humour, tout aussi sacré.
Le lien qui est fait là (dans ce Twitt) entre la démographie africaine et la fonte de la banquise ne trompe personne. Et il n’amuse que les fachos. Renaud Camus n’en est pas à sa première provocation, en 2014 il a été condamné pour provocation à la haine, ce coup ci il est relaxé.
L’écrivain comme l’humoriste est à l’aise avec les mots, il en joue, c’est là qu’on apprécie sont talent, voire son art. Seulement Renaud Camus en use et en abuse dans un style bien particulier, il n’est d’ailleurs pas le seul. Je retrouve là le style du vieux Le Pen, avec son «détail de l’histoire» maintes fois soutenu, ses blagues pourries du genre «Durafour crématoire». Ce genre d’«humoristes» et de «libre penseurs» me font gerber.