Le problème actuel des écologistes, c’est que depuis 2008 on saute d’une crise financière à l’autre. Crise des subprimes aux Etats-Unis, crise de l’endettement des Etats, Espagne, Italie, France, Grèce… personne n’est épargné ou presque. Comme cela va de pair avec un problème mondial de chômage structurel, les manifestations d’indignés se multiplient dans tous les replis de la planète. Quand tous les regards sont tournés vers les indicateurs économiques, comment porter un discours sur l’urgence écologique ? En France, Europe Ecologie-Les Verts ne parle que du nucléaire et de la répartition des sièges de députés, rien d’autre. Le choix d’Eva Joly comme candidate présidentiable, surtout connue pour sa lutte contre la corruption, ne fait rien pour aider. Aussi personne ou presque ne sait que nous allons être confrontés à une crise énergétique énorme qui va balayer toutes nos certitudes croissancistes et modifier de fond en comble notre mode de vie. Ce krach qui nous attend est dû à l’insignifiance des alternatives énergétiques quand prochainement nous aurons conscience du pic pétrolier, gazier, charbonnier… Prenons le cas de la biomasse. La biomasse, c’est l’ensemble des matières organiques d’origine végétale ou animale qui peuvent être transformées en une source d’énergie par combustion, méthanisation ou transformations chimiques (agrocarburant). Non seulement le bois ne peut que répondre à une part infime de nos besoins en énergie primaire, mais son usage industriel est pire que le charbon*.
Un récent rapport de Greenpeace, intitulé De la biomasse à la biomascarade, conclut en effet que la ruée vers l’or vert est néfaste tant pour les forêts que pour le climat. Les fabriques à petite échelle ont aujourd’hui laissé place à un usage industriel à grande échelle des forêts naturelles pour la production d’énergie. Or, pour fournir ne serait-ce que 15 % de la production électrique canadienne, il faudrait brûler l’équivalent de tous les arbres coupés en 2008 au Canada. Les nouvelles politiques en faveur de l’industrie de la biomasse réduisent en cendres la possibilité pour la forêt boréale de se régénérer. Au-delà de la déforestation, c’est le climat mondial qui défaille et notre santé qui trinque. Les émissions de CO2 provenant de la bioénergie forestière s’élèvent à 40 mégatonnes par an, chiffre qui dépasse celles du parc automobile canadien en 2009. En ce qui concerne la santé, « la fumée de bois contient toujours au moins cinq carcinogènes humains connus et au moins 26 produits chimiques qui appartiennent à la catégorie des polluants atmosphériques dangereux (…)Les centrales électriques nord-américaines fonctionnant à la biomasse émettent jusqu’à 150 % de plus de CO2, 400 % de plus de monoxyde de carbone irritant pour les poumons, et 200 % de plus de particules fines qui causent l’asthme que celles à charbon pour produire la même quantité d’énergie ».
En conclusion, Greenpeace estime que l’énergie tirée de la biomasse ne doit pas être considérée comme renouvelable et doit rester à petite échelle. L’ONG demande l’interdiction de la récolte d’arbres entiers et l’abandon du principe de « carboneutralité » concernant la biomasse. Nous serons un jour prochain obligés d’aller beaucoup plus loin, instaurer des communautés de résilience qui mettront en place une relative autonomie énergétique et alimentaire pour faire face aux terribles jumeaux de l’hydrocarbure, le pic des énergies fossiles et le réchauffement climatique.