Écoféminisme et question démographique

8 mars, Journée internationale des femmes depuis 1977… Ont-elles un rôle particulier à jouer en matière de maîtrise de la fécondité ? C’est ce que pense Gwennyn Tanguy, conférencière spécialisée sur les questions de transition énergétique, d’effondrement, de régulation démographique et d’écoféminisme. Son discours :

« Admettons que pour certains.es lecteur.lectrices, le calvaire de l’épilation, la torture de la chirurgie esthétique et l’astreinte quotidienne du maquillage/coiffage/habillement soient des épiphénomènes sans importance, et traitons à présent d’un sujet fondamental pour l’ensemble des êtres vivants : la reproduction.

Face aux catastrophes écologiques en cours, nombre de scientifiques ont récemment invité à réguler la démographie mondiale. Afin qu’il n’y ait aucun malentendu, rappelons que la dégradation catastrophique de la biosphère est essentiellement due à la surconsommation des pays développés. L’urgence et la gravité de la situation sont telles qu’il faut agir, à l’échelle mondiale, sur deux tableaux en parallèle : la réduction démographique et le plafonnement du niveau de consommation par personne à un niveau inférieur à la moyenne de celui, par exemple, des Français. La régulation de la population humaine mondiale est un des principaux leviers pour préserver la biosphère. Deux moyens d’atteindre cet objectif sont mis en avant : donner accès à tout.tes aux études et à la contraception. Je rajouterai volontiers un troisième moyen, applicables dans les pays où les deux précédentes mesures sont déjà en place : sortir de la culture nataliste. C’est-à-dire cesser de mettre la pression sur les femmes pour qu’elles fassent un premier enfant, puis un deuxième, puis un troisième. Comme tant d’autres, je peux témoigner du harcèlement subi lorsqu’une personne (a fortiori la femme) envisage de s’épanouir sans devenir parent. Et, alors que la loi est de leur côté, la pose d’un stérilet pour une nullipare, la ligature des trompes ou la vasectomie sont vécues comme des parcours du combattant.e (parfois non couronné de succès) pour celles et ceux qui souhaitent en bénéficier.

Il est grand temps d’oser affronter la question démographique en faisant preuve de tout l’humanisme requis. Permettre à chacun.e d’étudier, d’accéder à la contraception et à l’avortement, ainsi que respecter pleinement le choix individuel d’avoir peu ou pas d’enfants, sont de toute évidence des actions hautement salutaires, tant pour la biosphère que pour les femmes. »

source : Collapsus, ouvrage collectif, chapitre 32 (Femmes, démographie, écoféminisme… Quelles responsabilité des rapports de domination dans l’effondrement?) p.265-266, Femmes (Albin Michel, mars 2020)

l’écoféminisme sur notre blog biosphere :

11 févier 2019, Françoise d’Eaubonne, une icône de l’écoféminisme

8 mars 2019, 8 mars, Journée internationale des droits des femmes

17 juillet 2018, Le combat démographique analysé par une écoféministe

1er novembre 2017, Biosphere-info, féminisme et écologie (synthèse)

29 décembre 2016, Féminisme, sensibilité écologique et refus de maternité

18 décembre 2016, Féminisme et maîtrise de la fécondité sont inséparables (Paul Robin)

4 réflexions sur “Écoféminisme et question démographique”

  1. Je trouve cette position équilibrée : elle pointe d’abord le surconsommation, en précisant qu’elle devra être inférieure à la moyenne des français ( premier gros point de déni) et ensuite l’arrêt de la politique nataliste deuxième déni). Et elle met l’accent sur le droit des femmes à ne pas avoir d’enfant et ne pas être stigmatisée pour ce choix.
    Nos pays ont tout faux et la population aussi : bataille pour le pouvoir d’achat ( donc pour consommer plus), incitation à la maternité, interdiction de la ligature des trompes ou vasectomie. Le phénomène est occidental : un numéro de courrier international de début février avait son dossier  » un monde sans bébé » où l’on voit que tous les pays développés veulent soutenir leur natalité, toujours dans le soucis d’assurer la croissance et le système actuel.
    Il faut impérativement que tout le monde fasse le lien croissance/ capitalisme/ natalité. La hausse de la population c’est s’assurer la hausse des consommateurs en vendant l’illusion de maintenir notre système, y compris dans sa composante sociale. Cotisants = redistribution. On oublie comme toujours les ressources limitées et le fait que c’est le travail qui fournit les cotisations, pas les chômeurs. Plus de population c’est au contraire l’explosion du système. 
    On révèle sur ce sujet notre incapacité à proposer une solidarité et des services publics dans un monde en décroissance, avec moins d’argent qui circule et une proportion de gens âgés plus élevée.

    1. Lydia : « Il faut impérativement que tout le monde fasse le lien croissance/ capitalisme/ natalité. La hausse de la population c’est s’assurer la hausse des consommateurs en vendant l’illusion de maintenir notre système, … »
      Sur ce sujet délicat toujours un peu tabou il faut bien insister sur le fait que c’est aux pays riches, dits développés, de faire les premiers efforts d’abord parce qu’un petit américain ou un petit français consomme beaucoup plus (8 fois peut-être plus pour certains américains ?) qu’un petit africain ou indien, ensuite pour montrer l’exemple.
      Donc que cette mesure n’est pas une mesure contre les pays pauvres avec des connotations xénophobes, ce qui lui est souvent reproché …

      1. MICHEL SOURROUILLE

        Rien de nouveau sous le soleil, Eric. Je rappelle le programme de René Dumont, 1er candidat de l’écologie politique à la présidentielle 1974 : 
        « Nous sommes les premiers à avoir dit que la croissance démographique doit être arrêtée d’abord dans les pays riches, parce que c’est dans les pays riches que le pillage du Tiers-Monde, par le gaspillage des matières sous-payées, aboutit aux plus grandes destructions de richesse… Il faut réagir contre la surpopulation. En Inde surpeuplée certes, mais surtout chez les riches : 500 fois plus d’énergie consommée par tête à new York que chez le paysan indien. Ce qui remet en cause toutes les formes d’encouragement à la natalité, chez nous en France. La « France de 100 millions de Français » chère à M.Debré est une absurdité. Les propositions du mouvement écologique : la limitation des naissances ; la liberté de la contraception et de l’avortement. Nous luttons pour le droit absolu de toutes les femmes de régler à leur seule convenance les problèmes de contraception et d’avortement. »
        Source : L’écologie ou la mort (à vous de choisir) la campagne de René Dumont, les objectifs de l’écologie politique (Pauvert 1974)

        Le ou la futur(e) candidat(e) de l’écologie politique à la prochaine présidentielle pourrait rappeler que la démographie doit être aussi un objet de décision politique à prendre dans un pays toujours ouvertement nataliste en 2020.

  2. J’aime bien Gwennyn Tanguy, notamment ses gesticulations amusantes lors de ses «conférences gesticulées». J’adhère évidemment à son discours, seulement tout ça reste du spectacle.
    Gesticulées ou pas, les conférences (sur le climat, la planète ou n’importe quoi) font intégralement partie du grand Show politico-merdiatique. Ben oui ! Au même titre que les marches, les contre-sommets, les films et caetera, tout ça n’est que du spectacle. D’accord ou pas, de toute façon la spécialité et le business de Gwennyn Tanguy, il se trouve que c’est justement le spectacle. Et après tout chacun son truc.
    Business as usual ! The Show must go on ! Partant de là, il faut être aveugle pour ne pas voir qu’il n’y aucun moyen d’en sortir. Tant que nous alimenterons le Spectacle nous resterons con damnés à tourner en rond, en attendant. Et comme il y a mille et une façons de tourner en rond, après tout chacun son style pour amuser la galerie.
    Gwennyn Tanguy nous dit qu’il faut (yaca et faucon), «cesser de mettre la pression sur les femmes pour qu’elles fassent un premier enfant, puis un deuxième, puis un troisième. »
    Une certaine «étude» nous révélait dernièrement que 9 femmes sur 10 avaient déjà subies des pressions alors qu’elles disaient non, non, non, non ! Et maintenant j’apprends qu’en plus et/ou et en même temps, on leur met la pression pour en rajouter au surnombre. Quelle misère ! Finalement c’est toujours pareil, il faut être aveugle pour ne pas voir qu’il n’y aucun moyen d’en sortir tant que les femmes se laisseront mettre la pression.
    Je reste donc con vaincu que la pression, il ne faut pas se la laisser mettre, il faut la boire ! 🙂

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