Planète surpeuplée, monde invivable

La procréation, par nature, peut être exponentielle, alors que les ressources terrestres ne le sont pas. C’est ce que disait déjà Malthus, dont certains pensent qu’il n’a jamais eu que le tort d’avoir raison trop tôt. Aujourd’hui, y a-t-il péril en la demeure ?

Alain de Benoist : Vers 1700, on comptait moins de 700 millions d’habitants sur Terre. En 1900, on en était à 1,6 milliard. Aujourd’hui, avec plus de 250.000 naissances par jour, on a dépassé les 7,7 milliards. Pour la fin du siècle, les estimations moyennes tournent autour de douze milliards, les estimations hautes autour de seize milliards. Bien entendu, on peut discuter à perte de vue sur le nombre de bipèdes qui peuvent vivre sur cette planète. La seule chose qui est sûre, c’est qu’il y a une limite. Malheureusement, nous sommes à une époque qui ne supporte pas les limites. La surpopulation aggrave mécaniquement tous les problèmes en les rendant insolubles. Elle est belligène, elle accélère l’épuisement des réserves naturelles, elle favorise les migrations de masse, elle aggrave les effets de la surconsommation, de l’épuisement des sols… Plus de 90 % de toute la biomasse produite annuellement dans le monde sont d’ores et déjà exploités. À quoi bon parler de sauvegarde de la diversité si l’espace laissé aux espèces sauvages est appelé à disparaître ? À quoi bon vouloir limiter les émissions de gaz à effet de serre si on ne limite pas aussi la population ? Avec des bidonvilles de plus de vingt millions d’habitants et des mégapoles de plus de cent millions d’habitants, c’est un monde proprement invivable qui se dessine.*

« Croissez et multipliez », lit-on dans la Genèse, adresse qui vaut tout autant pour les chrétiens que pour les musulmans et les juifs. Cet axiome religieux vous paraît-il toujours d’actualité ?

Alain de Benoist : À une époque où la plus grande partie du monde était inhabitée, le « croissez et multipliez » était parfaitement justifié. Le problème commence lorsqu’on soutient qu’un principe valable dans telles ou telles circonstances est à considérer comme un dogme valable en tous temps et en tous lieux. Au nom de l’« accueil de la vie » et de la critique du « malthusianisme », on préfère se mettre un bandeau sur les yeux. Or, le laisser-faire nataliste est aujourd’hui irresponsable. Quelle est, alors, la solution ? L’émigration de masse vers d’autres planètes relève de la science-fiction. Que reste-t-il, alors ? Les épidémies, peut-être !*

Remarque biosphèrique : Alain de Benoist sent le souffre, il est classé d’extrême droite ! Mais si l’on ne relaie pas les propos de tel ou tel parce qu’ils ont une image particulière, on s’intéresse au messager, pas au message. Nous n’avons pas à juger ce journaliste et philosophe sur son appartenance idéologique. En 1961, à 18 ans, il apportait son soutien à l’Algérie française. A la présidentielle de 2017, il a appelé à soutenir Mélenchon. Ça le regarde, il a même le droit de changer d’avis. Que dit aujourd’hui Alain de Benoist ? Ce que dit aussi l’association Démographie responsable, exemple : « Il y a une limite : pas plus qu’il ne peut y avoir de croissance matérielle infinie dans un espace fini, la population ne peut s’accroître indéfiniment sur une étendue limitée… Il est révélateur que la plupart des écologistes autoproclamés se comportent comme si la démographie et l’environnement étaient des sujets séparés, alors qu’ils sont indissociablement liés… » Bravo. Une critique cependant, sa dernière phrase est un raccourci inopportun : «  Que reste-t-il comme solution au surpeuplement  ? Les épidémies, peut-être ! » Comme si la maîtrise de la fécondité ne passait pas par des tas d’autres choses !! Méprisons ceux qui critiquent le messager sans vouloir prendre connaissance du message…Il s’agit là de personnes terriblement anti-démocratiques, contre la liberté d’expression.

Pour aller plus loin, un ouvrage d’Alain de Benoist en 2007« Demain la décroissance (penser l’écologie jusqu’au bout) ». Il ne sépare pas comme le font aujourd’hui certains décroissants bornés la décroissance économique et la décroissance démographique.

* Alain de Benoist, extraits de « Avec la surpopulation, c’est un monde invivable qui se dessine… »

5 réflexions sur “Planète surpeuplée, monde invivable”

  1. Le point de vue de jean-marc Jancovici (01 March 2020)
    J’ai aussi conscience que la raison première de la pression des hommes (et des femmes) sur l’environnement est avant tout une fonction de la démographie. La planète est déjà surpeuplée, mais la bonne question est de savoir quoi faire. J’ai livré quelques premières pistes dans une interview récente :
    http://www.socialter.fr/fr/module/99999672/834/jean_marc_jancovici__qleurope_est_en_dcroissance_nergtique_depuis_2007q )

    et effectivement je me suis fait “allumer” par un chroniqueur français qui m’a dit que je voulais euthanasier les vieux 🙂 (mais en l’occurrence ça ne m’a pas empêché de dormir). Il faut s’attaquer à des choses pas faciles : les allocations familiales et incitations à avoir des enfants, le fait que tout le monde pense que la retraite est fonction du nombre d’enfants qui travaillent, etc. Et donc une fois le constat partagé, c’est l’action qui devient difficile !
    Son blog : https://jancovici.com/

  2. L’augmentation de la population est un problème complexe que doit être discutée. Mais il ne faut pas traiter ce sujet de façon générique, comme si tous les habitants de la planète provoquerait le même type d’impact sur le milieu naturel. Les dommages provoqués au vivant et au inanimé sont différents selon les catégories de la population. Marcel Mazoyer estime que le nombre de paysans sur la planète est de 2,8 à 3,0 milliards d’habitants. Les agriculteurs sont le plus grand contingent de travailleurs dans le monde, environ 38 % à 40 % de la population mondiale. La grosse majorité est composée de paysans pauvres. Or, leur impact sur le milieu naturel est essentiellement de caractère local et régional. L’impact de l’agriculture paysanne sur la menace la plus grave, le changement climatique irréversible, est peu important. De même que sur la perte de biodiversité (possible d’être maîtrisé) et sur l’épuisement des ressources naturelles renouvelables et non-renouvelables. Les pollutions diverses e variées sont organiques et rarement chimiques ou physiques. En d’autres termes, l’impact négatif des paysans pauvres sur la nature est bien inférieur aux dégâts provoqués par les populations insérées dans la société thermo-industrielle. Ce contingent-là est responsable de la consommation d’environ 9 % à 10 % de l’énergie primaire mondiale, c’est-à-dire 1,4 G/tep/an. L’énergie consommée par ce segment du secteur primaire, que peut vivre aussi en autarcie, est essentiellement la biomasse végétale (bois pour coction et chauffage, traction animale, aliments nécessaires pour piocher et bêcher, séchage au soleil, hydraulique et éolien. Un milliard de paysans n’ont pas d’électricité. La consommation d’énergie fossile est ridicule. Et la biomasse utilisée est une énergie renouvelable, dont l’impact planétaire est bien moins nuisible que, par exemple, le secteur transport de la société thermo-industrielle, responsable pour 14 % de la consommation d’énergie primaire de la planète (le système sanguin de la globalisation). La consommation d’énergie primaire de ces paysans est de l’ordre de 0,2 tep/an/habitant. Tandis que celle de M. Benoît, un nanti européen, est de l’ordre de 4,0 tep/an/habitant (les Américains consomment environ 7,8 tep/an/habitant pour un niveau de vie semblable aux Européens.). La consommation mondiale d’énergie primaire est composée en 84 % par des énergies fossiles. Ces données n’empêchent pas M. Benoît de suggérer qu’il faut contrôler la naissance de la horde de barbares pauvres qui vont pulluler aux frontières européennes. Le contrôle de la population consiste en stériliser les femmes, sans aucun doute. M. Benoît veut limiter la croissance de la population dont l’empreinte énergétique et écologique sur le milieu naturel est ridicule. Au lieu de voir comment réduire la production et la consommation des nantis. Il faut noter que le monde peut aujourd’hui alimenter 10 milliards de personnes, car la plupart de surfaces agricoles sont destinées à l’alimentation des animaux (cultures de grains e pâturages). Les vaches e porcs européens et chinois sont alimentés avec de grains, et le rendement est très faible. On donne 10 kilos de grains à une vache (biomasse végétale) pour qu’elle les transforme en à peine 1 kilo de viande e dérivés (biomasse animale), en matière sèche. Il faut penser en un monde de partage et de sobriété. à inventer.
    Il s’agit d’un problème complexe dont les solutions ne peuvent pas se résumer au contrôle de la natalité des pauvres. Or, s’il faut rester dans ce registre, il y a une solution plus rapide et moins coûteuse : vasectomiser tous les mâles de la planète qui consomment plus de 2,0 tep/an/habitant d’énergie primaire, à commencer par M. Benoît, s’il n’est pas encore impuissant.

    1. @ TT TARQUINIO. Sachez déjà que je suis content d’entendre un autre son de cloche sur ce blog, ça nous change un peu. Je pense que je vais bien finir par signer la pétition (pour la Solution que vous préconisez), mais j’hésite encore, sur un tout petit détail, façon de dire… la bagatelle de 0,5 Tep.
      Le 5 août 2019 à 03:29 vous mettiez le seuil à «2,5 Tep/an d’énergie (tonne équivalent pétrole) de tous les pays, riches et pauvres», et maintenant je vois qu’il est passé à «2,0 tep/an/habitant d’énergie primaire».
      Mon problème c’est que d’après mes calculs je brûle plutôt dans les 2,25 tonnes par an. Ou par mois, je ne sais plus. Ceci dit, je n’en mettrais pas quand même mes cou…. euh pardon, ma main à couper. 🙂

      1. C’est vrai, le seuil a changé, arbitrairement. Dans les deux cas, votre situation ne change pas; il va falloir couper les mains.
        Il faut signaler que p
        lus de 2.000 animaux par seconde sont abattus dans le monde pour la viande, soit 65 milliards d’animaux tués chaque année selon la FAO. Les estimations hautes sont de 150 milliards d’animaux en comptant toutes les espèces (poissons, oiseaux, etc). Je ne sais pas combien d’animaux sont nourries par des grains produits par l’agriculture moderne, la révolution verte.

  3. Oui bien sûr. Autant nous expliquer qu’on ne pourra jamais mettre 13 oeufs dans une boite de 12, ni même un seul s’il est d’autruche. Nous voilà donc bien avancés, bravo le messager ! Maintenant c’est vrai, au nom de la sacro-sainte liberté de Penser nous avons encore le droit de penser qu’il est toujours bon de rappeler des évidences. Je ne suis pas CONTRE les piqures de rappel, la preuve : La terre est ronde, elle n’est plus plate, elle tourne autour du soleil et patati et patata. Toutefois au nom de la sacro-sainte liberté d’Expression, je me dois et en même temps, de rappeler qu’il se pourrait aussi que ce soit plutôt le soleil qui lui tourne autour. Eh oui, c’est juste une question de point de vue, ou de référentiel si vous préférez. Ceci dit, nous voilà toujours aussi bien avancés. Encore bravo le messager !
    Une petite critique cependant, sur la remarque biosphèrique. Ce coup de dents inopportun à ces malheureux «certains décroissants bornés». Les malthusiens «purs et durs», fidèles parmi les fidèles du Grand Maître et sa doctrine, apprécieront sûrement . 🙂

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