Trop d’enfants, c’est un frein à l’amélioration de la société. Les néo-malthusiens associent systématiquement la limitation des naissances à la révolution sociale. Le néo-malthusianisme, mouvement d’émancipation très proche des féministes, s’est développé en France à la fin du 20ème siècle. Paul Robin fonde en 1896 la ligue de la régénération humaine qui se propose de faire connaître la loi de Malthus, ainsi que « les procédés anticonceptionnels qui permettent d’en faire une arme contre le malheur ». Mais en 1920, la majorité nationaliste issue de la Première guerre mondiale vote une loi condamnant « la propagande contre la natalité ou anti-conceptionnelle ». Cette loi criminalise aussi l’avortement, Marie Latour sera exécutée en 1943 sur ce motif. Les néo-malthusiens sont contraints de fermer leurs journaux et à cesser leur action. Dans ce contexte, on ne pouvait plus réfléchir. Pour ou contre l’avortement ? Ma mère était contre, comme sa génération née en 1925. Cela ne l’a pas empêché d’avorter trois fois. La loi n’est pas toujours en accord avec les consciences. Je suis né en 1947, j’ai aussi vécu au temps de la répression, je me suis auto-formé sur la question de la sexualité et de la contraception.
En janvier 1971 je trouve dans Partisans un dossier, Libération des femmes, année zéro. Je prends en note : « Du point de vue du danger, mieux vaudrait vendre les pilules dans des distributeurs automatiques et ne délivrer les cigarettes que sur ordonnance… L’utérus des femmes est la propriété de l’Etat… Actuellement en France à la suite d’avortements, il meurt tous les ans 5000 femmes, 10 000 à 15 000 demeurent stériles à vie et 200 000 souffrent de maladies infectieuses. En Hongrie où l’avortement est considéré comme une intervention chirurgicale normale, on ne compte que six cas mortels pour 100 000 avortements…» C’était l’époque du MLF (mouvement de libération de la femme) : « Qui est le plus apte à décider du nombre de nos enfants ? Le pape qui n’en a jamais eu ? Le président qui a de quoi élever les siens ? Votre mari qui leur fait guili guili le soir en rentrant ? Ou bien vous qui les portez et les élevez ! » Mais la question démographique est bien plus complexe, il y a le droit de la femme à disposer de son corps et le droit de la planète à ne pas être envahie par les bébés. Il faut un compromis entre les libertés de l’individu et les contraintes écologiques. J’ai toujours pensé que la population humaine était trop nombreuse. Le 4 décembre 1970, j’écrivais dans mon carnet de notules comment je vois le monde tel qu’il va :
Un jour les gouvernements seront obligés de supprimer les voitures
Ils seront obligés de tuer des nouveau-nés bien portant
Il y aura pourtant des guerres civiles et internationales en même temps
Des gens mourront parce que l’eau potable manquera
Le ciel sera obscurci de bruits et de fumées
La terre sera sillonnée de bandes armées déchaînées
Notre vie ne tiendra qu’à un fil, la raison du plus fort
Les villes seront pillées et l’armée deviendra brigands
Car les gens ne sont pas préparés intellectuellement
A agir rationnellement contre surpopulation et pollution.
(à suivre)
NB : pour lire la version complète de cette autobiographie, ICI
En effet, le droit à être nombreux est un droit qui s’oppose à tous les autres droits cela avait été exprimé dans l’ouvrage coordonné par Michel Sourrouille : Moins nombreux plus heureux (Editions Sang de la Terre).