Frontex et la chasse aux immigrés

Qu’on ne s’y trompe pas, la libre circulation des personnes n’a jamais existé et aujourd’hui l’Europe devient une forteresse. Frontex, l’agence pour la protection des frontières extérieurs de l’Union, acquiert de plus en plus de pouvoir : moyens de surveillance aérienne, coopération avec les gardes-côtes, interception par hélicoptère, prérogatives et indépendance de plus en plus grandes, etc. La commissaire européenne aux affaires intérieures, Cecilia Malmström*, estime que la quasi-totalité des récents immigrés en Italie seront renvoyés : « L’Europe devrait s’engager davantage. Elle devra adopter sa stratégie de voisinage, commencer un dialogue sur le long terme… » En termes clairs, l’Europe demandera aux autres pays de garder leurs concitoyens chez eux et ne sera accueillante que selon ses besoins. La puissance politique et économique de l’UE est déjà employée pour faire de pays du Maghreb des partenaires coopérant à la délocalisation de la violence. Presque tous les pays occidentaux doivent d’ailleurs leur forme actuelle d’Etats-nations à une politique d’homogénéisation ethnique dont l’envers est la purification ethnique ; c’est le côté caché de la démocratisation.

Harald Welzer** montre de façon argumentée la violence potentielle contenue dans l’être humain, acculé à des solutions extrêmes quand il se retrouve en situation de péril extrême. L’ère des Lumières pourrait même s’achever (temporairement ?) au XXIe siècle. Comme les ressources vitales s’épuisent, il y aura de plus en plus d’hommes qui disposeront de moins en moins de bases pour assurer leur survie. Il est évident que cela entraînera des conflits violents entre ceux qui prétendent boire à la même source en train de se tarir. L’augmentation de la pression migratoire provoque déjà chez la population européenne des sentiments de menace et des besoins de sécurité, qui entraîneraient des exigences d’une politique migratoire plus rigoureuse.

Pourtant selon Harald Welzer, l’ennemi, ce n’est pas l’immigré, c’est nous-mêmes : «  Un individu  qui ne voit pas le moindre problème à gagner 70 fois plus que tous les autres, tout en consommant leurs matières premières et rejetant 9 fois plus de substances nocives dans l’environnement devient une personnalité pathologique. Cette personnalité psychopathologique se désintéresse de surcroît aux conditions de vie de ses enfants et petits-enfants. Un être pareil serait considéré, selon tous les critères normatifs, comme un dangereux parasite qu’il faudrait empêcher de nuire. » Pourtant c’est quelqu’un à imiter en cherchant à s’expatrier…

* LeMonde du 20-21 février 2011, La commissaire européenne

** Harald Welzer, Les guerres du climat (Gallimard, 2009)

9 réflexions sur “Frontex et la chasse aux immigrés”

  1. Helvète s’exprime brutalement, mais vous aussi, dans l’autre sens. Comment pouvez-vous attribuer la « purification ethnique » à la « démocratisation » ? C’est totalement faux. Certes, il y a une contradiction entre la libre et irresponsable circulation des capitaux et marchandises et les limitations aux mouvements des migrants, mais est-ce une raison pour renoncer à réguler les mouvements migratoires ? On pourrait aussi chercher à limiter les flux d’investissement spéculatifs et les échanges commerciaux inéquitables. Vous êtes particulièrement conscient des problèmes graves qui vont se poser en termes d’alimentation notamment, et vous ne souhaitez pas les atténuer pour votre pays et vos enfants ? J’avoue que je ne vous comprends pas. Ces vagues de migrants représentent un péril pour notre vieille Europe. Enfin, présenter la France, comme le sinistre Céline, comme un résidu où l’on s’arrête parce qu’on ne peut plus aller plus loin est une insulte à notre beau pays.

  2. Depuis que Frontex est opérationnel (2005), les passages clandestins par mer de l’Afrique à l’Espagne ont baissé de 70%. Dans le même temps, le nombre d’accidents mortel en mer a augmenté de 50%. Mais ceci est sans doute un hasard. Qui oserait penser que Frontex assassine les migrants aux frontières de l’europe ? Pas moi, bien sûr.

  3. @Helvète
    Toujours la même rengaine provenant de personnes ayant lu un article en diagonale.
    Le coup de la serrure, c’est presque un aussi grand classique que le « si vous les voulez, prenez-les chez vous »…
    Chez moi, c’est la France et la France n’est que le cul-de-sec de l’Europe où des dizaines de peuples sont venus s’échouer étant incapable de traverser l’Atlantique.
    Mais si, vous, Helvète, vous ne voulez pas d’étrangers (de non-européens) en Europe, allez jusqu’au bout de votre logique et ne soyez pas hypocrite : refusez de porter des fringues faites en Tunisie ou en Chine, refusez l’électicité d’origine nucléaire (uranium), balancez votre ordinateur par la fenêtre, brûlez votre voiture qui fonctionne grâce au pétrole, rejetez tout ce qui est plastique, etc, etc

    …et enfin, regardez vous dans une glace vous êtez un européen pur jus depuis combien de générations ? En êtes-vous sûr ?

  4. Merci Helvète pour vos précisions sur la « libre » circulation.
    Mais vous avez mal compris notre message, nous ne sommes pas hostiles au contrôle des migrations, que ce soit entre pays, à l’intérieur de l’Europe ou même entre régions.
    Nous constatons simplement que la libre circulation mondiale des personnes n’est pas possible alors qu’il y a une libre circulation effrénée des marchandises et des capitaux. Il y a là une sacrée contradiction.
    Nous constatons aussi que les touristes sont libres d’aller déstabiliser par leur présence d’autres peuples alors que les travailleurs sont soumis à des quotas et des interdits dans leurs déplacements hors frontières. Contradiction.

    Nous sommes donc favorables à une relocalisation des activités et des personnes pour reconstituer des sociétés conviviales dans lesquelles il n’y aurait plus besoin de serrures et de clés.
    Alors des individus isolés pourront librement voyager en bénéficiant de l’hospitalité partout autour de notre planète…

    Les raisonnements dans un monde complexe et surpeuplé sont toujours complexes et soumis à conditions.

  5. Je ne poserai qu’une question: avez-vous une serrure installée sur votre porte d’entrée ? Si oui, pourquoi considérez-vous comme anormal de contrôler l’accès de votre appartement et pas celui de votre pays ?

    L’article commence sur une distorsion des faits: « …la libre circulation des personnes n’a jamais existé et aujourd’hui l’Europe devient une forteresse ». La libre circulation des personnes ne concerne QUE les Européens. Que l’auteur de ce blog indique où il est écrit que toutes les nationalités ont le droit de circuler en Europe. Le système actuel permet la circulation des citoyens des pays ayant signé les traité de libre circulation ainsi que des personnes étrangères ayant été autorisées à vivre par un de ces mêmes pays sur son territoire. Rien de plus !

    Ensuite l’utilisation du terme « purification ethnique » est mensonger alors que la population européenne n’a cessé de devenir plus multiculturelle depuis 50 ans: si l’auteur de ce blog veut rester crédible en utilisant ce terme, qu’il étaye ces dires avec des chiffres tels que l’évolution du pourcentage de la population extra-européenne en Europe ou le nombre de naturalisation. Or voici un lien qui dément le concept de forteresse européenne (cf. ci-dessous).

    Si les moyens engagés pour lutter contre l’immigration illégale deviennent plus impressionnants, c’est simplement parce que les conséquences de l’immigration commence à se faire sentir (salaires bas notamment) et parce que l’économie ne peut plus absorber ce flux.

    Que se passe-t-til lorsqu’un homme sans travail et sans droit au système social , parce qu’immigré clandestin, doit survivre en Europe ? Il va tomber dans la petite criminalité (revente de drogue, vols) ou alors au mieux effectuer des petits boulots au noir selon le bon vouloir de personnes pas toujours bienveillantes.

    Pour que les accusateurs de la politique actuelle de l’Europe soient crédibles, il faut qu’ils commencent par montrer l’exemple en laissant ouvert toutes leurs portes. Ou alors qu’ils acceptent de se voir désigner comme hypocrite.

    http://www.observateurocde.org/news/fullstory.php/aid/1010/Migration_dans_l_92Europe__E9largie.html

  6. Chronique européenne de la chasse aux immigrés :
    – LeMonde du 27 février 2010 :Le Conseil européen des ministres de l’immigration a approuvé 29 mesures élaborées par la France afin de renforcer le contrôle des frontières extérieures de l’Union. Parallèlement, la Commission présentait des mesures visant, notamment, à sanctionner financièrement les pays qui refuseraient de coopérer lors du retour forcé de clandestins. Les propositions françaises visaient notamment à renforcer Frontex, l’agence de contrôle des frontières extérieures. Elle organisera des vols communs dans le cadre d’opérations de retour décidées au niveau européen.
    – LeMonde du 3 Octobre 2010 : C’est dans la discrétion la plus totale que le premier « charter » Frontex s’est envolé de Varsovie à destination de Tbilissi (Géorgie). Jamais, jusqu’à ce jour, l’agence européenne chargée de la gestion des frontières extérieures n’avait financé, à elle seule, ce type de « vol groupé ». Cinquante-six ressortissants géorgiens, arrêtés en Pologne, en France, en Autriche et en Allemagne, ont ainsi embarqué à bord d’un Boeing 737 lituanien – « le moins cher » sur le marché, ont précisé au Monde les responsables de Frontex, dont le siège est à Varsovie.
    – LeMonde.fr avec AFP du 1er octobre 2010 : La crise financière et l’augmentation du chômage ont conduit à une baisse de l’immigration illégale dans l’Union européenne, particulièrement visible au premier semestre 2010, affirme l’Agence européenne de surveillance des frontières extérieures (Frontex).
    – LeMonde du 21 février 2011 : Laurent Wauquiez, ministre des affaires européennes, sur la récente vague d’immigration tunisienne en Italie : « L’Europe doit, et va, les aider. Mais en Tunisie, et non à Lampedusa. Le temps des commentaires est terminé. D’abord, mieux utiliser l’agence Frontex. En Grèce, le déploiement européen a permis de faire passer de 300 à 100 le nombre de passages quotidiens. Nous allons agir en Italie aussi. Il faut renforcer les capacités opérationnelles de Frontex et imaginer, par exemple, que l’agence puisse cofinancer les achats d’hélicoptères ou de bateaux. »

  7. Chronique européenne de la chasse aux immigrés :
    – LeMonde du 27 février 2010 :Le Conseil européen des ministres de l’immigration a approuvé 29 mesures élaborées par la France afin de renforcer le contrôle des frontières extérieures de l’Union. Parallèlement, la Commission présentait des mesures visant, notamment, à sanctionner financièrement les pays qui refuseraient de coopérer lors du retour forcé de clandestins. Les propositions françaises visaient notamment à renforcer Frontex, l’agence de contrôle des frontières extérieures. Elle organisera des vols communs dans le cadre d’opérations de retour décidées au niveau européen.
    – LeMonde du 3 Octobre 2010 : C’est dans la discrétion la plus totale que le premier « charter » Frontex s’est envolé de Varsovie à destination de Tbilissi (Géorgie). Jamais, jusqu’à ce jour, l’agence européenne chargée de la gestion des frontières extérieures n’avait financé, à elle seule, ce type de « vol groupé ». Cinquante-six ressortissants géorgiens, arrêtés en Pologne, en France, en Autriche et en Allemagne, ont ainsi embarqué à bord d’un Boeing 737 lituanien – « le moins cher » sur le marché, ont précisé au Monde les responsables de Frontex, dont le siège est à Varsovie.
    – LeMonde.fr avec AFP du 1er octobre 2010 : La crise financière et l’augmentation du chômage ont conduit à une baisse de l’immigration illégale dans l’Union européenne, particulièrement visible au premier semestre 2010, affirme l’Agence européenne de surveillance des frontières extérieures (Frontex).
    – LeMonde du 21 février 2011 : Laurent Wauquiez, ministre des affaires européennes, sur la récente vague d’immigration tunisienne en Italie : « L’Europe doit, et va, les aider. Mais en Tunisie, et non à Lampedusa. Le temps des commentaires est terminé. D’abord, mieux utiliser l’agence Frontex. En Grèce, le déploiement européen a permis de faire passer de 300 à 100 le nombre de passages quotidiens. Nous allons agir en Italie aussi. Il faut renforcer les capacités opérationnelles de Frontex et imaginer, par exemple, que l’agence puisse cofinancer les achats d’hélicoptères ou de bateaux. »

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