En 1962, Rachel Carson écrivait : « Le tir de barrage chimique, arme aussi primitive que le gourdin de l’homme des cavernes, s’abat sur la trame de la vie, sur ce tissu si fragile et si délicat en un sens, mais aussi d’une élasticité et d’une résistance si admirables, capables même de renvoyer la balle de la manière la plus inattendue. »
Aujourd’hui la chrysomèle du maïs, Diabrotica virgifera, a donné raison à Rachel Carson. Les agriculteurs américains avaient vu l’efficacité des insecticides diminuer au fil des ans. Ils croyaient avoir trouvé la parade ultime avec un OGM capable de produire lui-même une toxine grâce à un gène transplanté d’une bactérie, Bacillus thuringiensis. Ce maïs Bt, mis en culture en 2003, a dû à son tour plier devant l’inventivité de Diabrotica : « La présence de chrysomèles capables de prospérer dans des champs transgéniques a été mise en évidence, pour la première fois, dans des parcelles de l’état de l’Iowa, en 2009. On a constaté que cette capacité à survivre était « non récessive » : il suffit d’une seule copie du gène de résistance, hérité d’un des parents (et non des deux), pour que ce caractère s’exprime. La nouvelle vient seulement d’être rendue publique, dans la revue PLoS One… »*.
Nous sommes en accord avec la conclusion de Rachel Carson : « Nous avons à résoudre un problème de coexistence avec les autres créatures peuplant notre planète. Nous avons affaire à la vie, à des populations de créatures animées, qui possèdent leur individualité, leurs réactions, leur expansion et leur déclin. Nous ne pouvons espérer trouver un modus vivendi raisonnable avec les hordes d’insectes que si nous prenons en considération toutes ces forces vitales, et cherchons à les guider prudemment dans les directions qui nous sont favorables. La mode actuelle, celle des poisons, néglige totalement ces considérations fondamentales. Ces extraordinaires possibilités de la substance vivante sont ignorées par les partisans de l’offensive chimique, qui abordent leur travail sans aucune largeur de vues, sans le respect dû aux forces puissantes avec lesquelles ils prétendent jouer.Vouloir « contrôler la nature » est une arrogante prétention, née des insuffisances d’une biologie et d’une philosophie qui en sont encore à l’âge de Neandertal ». (in Le printemps silencieux)
* LE MONDE du 1er septembre 2011, article d’Hervé Morin
Merci pour cette excellente nouvelle qui permet de commencer la journée dans la bonne humeur !