la démondialisation contre Pascal Lamy

D’un jour à l’autre, les excommunications du protectionnisme se poursuivent dans LeMonde. Après l’absurde démondialisation selon Zaki Laïdi*, voici le directeur général de l’OMC  qui passe à l’offensive : « La démondialisation est un concept réactionnaire »**.  En fait Pascal Lamy n’a que deux arguments :

1. « Le protectionnisme est un débat franco-français. La mondialisation est une transformation gigantesque dont on avait sous-estimé l’ampleur et la rapidité. Le phénomène est parti pour durer. » Mais le fatalisme de ce raisonnement est absurde. Si une chose peut advenir et s’amplifier brutalement, son contraire peut faire de même. L’histoire nous indique que les crises économiques entraînent des contractions phénoménales du commerce international. Après la crise des subprimes, la Chine avait commencé à renvoyer dans leur campagne d’origine ses ruraux exploités par les usines à exporter. Après le prévisible choc pétrolier qui nous attend, une démondialisation sera nécessaire et durable.

2. « Les moteurs de la mondialisation sont technologiques : le porte-conteneurs et Internet. Gageons que la technologie ne reviendra pas en arrière. » Mais nous sommes dans une économie mondialisée parce que l’idéologie libérale a pris le dessus dans les années 1980 avec Reagan, Thatcher et l’impuissance du keynésianisme à enrayer la crise qui suivit le choc pétrolier de 1973. De plus, nous ne pouvons avoir comme idéologie que ce que le niveau des richesses naturelles nous procure. La multiplication des échanges est surtout la conséquence d’un baril de pétrole qui a baissé à partir du milieu des années 1980. Or la raréfaction du pétrole va renchérir ses coûts, que ce soit pour le porte-conteneurs transporteur mais surtout le contenu carbone des produits transportés (les ordinateurs…). N’oublions pas la révolte des peuples contre la paupérisation et la montée des inégalités qui accompagne la mondialisation.

Nous attendions mieux de Pascal Lamy, qui indiquait dans le Nouvel Observateur du 14 décembre 2006 : « L’histoire nous a donné une leçon, quand il y a perception du danger, les hommes s’organisent pour y faire face. De ce point de vue, le mouvement écologique a apporté sa contribution à la perception de ces dangers.  Cette conscience est plus forte qu’hier et elle progresse. Dans ses principes, l’OMC prévoit que le développement des échanges doit contribuer au développement durable. Vous avez donc le droit, au nom de la protection de l’environnement, d’instituer certains obstacles aux échanges. C’est parfaitement légal dans le système de l’OMC. Même si, comme partout en politique, il y a des arbitrages à faire entre les différentes urgences, entre la liberté et la sécurité, entre la pauvreté et le développement, entre l’environnement et la croissance (…) Les pays ne peuvent aboutir à un accord que si les uns et les autres font des compromis. C’est compliqué et difficile. Mais nécessaire si on veut que cette planète préserve elle-même son intégrité, notamment environnementale. »

C’est d’ailleurs ce que revendique Arnaud Montebourg dans sa brochure à deux euros Votez pour la démondialisation : « Le moment est venu de faire payer le juste coût de l’atteinte à l’environnement aux transports maritime et aérien des produits fabriqués hors d’Europe, par la taxation massive et kilométrique des marchandises acheminées en Europe. »

* LeMonde du 30 juin 2011, Absurde démondialisation.

** LeMonde du 1er juillet 2011, La démondialisation est un concept réactionnaire.