La désobéissance s’apprend, savoir déterminer l’injuste

L’autorité est ce qui assure la cohésion d’un groupe… rien d’infamant à obéir à ses parents. Encore faut-il ne pas confondre soumission volontaire et obéissance servile. Nous obéissons à des valeurs, qui nous apprennent à distinguer le bien du mal. Cela se concrétise ensuite dans notre comportement. La désobéissance s’inscrit dans un jugement de valeur et mesure notre capacité de résister à un ordre contestable. Un article du MONDE* présente de ces mécanismes complexes une vision superficielle : « Les sympathisants de gauche, les femmes militantes et les bordéliques sont plus enclins à la désobéissance que les personnes affables, consciencieuses ou de droite ». La « banalité du mal » pour parler comme Hannah Arendt ne dépend pas d’une idéologie de droite ou de gauche. La désobéissance dépend de notre capacité personnelle à mettre en (dés)accord notre échelle de valeur et la pression du groupe. Tout le monde ne sait pas désobéir, cela s’apprend.

Il faudrait introduire les « ABCD » de la désobéissance dès le berceau, apprendre à distinguer le vrai du faux dès l’enfance, ne pas croire au père Noël ni aux dieux du monothéisme. Il ne faut pas gorger les enfants de cadeaux et les nourrir aux mamelles de la publicité, il faut leur apprendre à discerner l’essentiel derrière les apparences, savoir même reconnaître que notre comportement envers l’enfant peut être disproportionné. Pas besoin de gifle ou de fessée pour se faire obéir dans un tel contexte, l’enfant intériorise ce qui doit être de ce qu’il est inamissible d’accepter. Il devient raisonneur plus que raisonnable, il prend confiance en lui, il se fiera à son propre raisonnement et pas à ce qu’on veut qu’il soit. Cela donne du courage, le non-respect de l’autorité comporte des risques qui seront assumés. Une fois adulte, cet enfant pourra rejeter les diktats de la mode et de la publicité, poser un regard critique sur la société de consommation, se démarquer de la société du spectacle et choisir une existence basée sur la simplicité volontaire et la sobriété énergétique. Autant dire qu’il sera minoritaire dans la société  contemporaine en cherchant la voie du vrai.

 Cela veut aussi dire que les adultes d’aujourd’hui devraient suivre un apprentissage pour se débarrasser de leur soumission volontaire à un monde de croissance et de gaspillage. On peut apprendre à tout âge. Vous pouvez consulter quelques posts sur notre blog :

A-t-on vraiment le droit de saboter un chantier de TGV : « L’écrivain italien Erri De Luca a déclaré: « Le TGV doit être saboté », les actes de sabotage « sont nécessaires pour faire comprendre que le TGV est un chantier inutile et nocif ... »

Khmers verts et autres ayatollahs de l’écologie : « Nous soutenons les faucheurs d’OGM, les objecteurs de conscience, les écoguerriers, les lanceurs d’alerte et la désobéissance civile en général. Pourtant nous ne sommes pas des ayatollahs de l’écologie, des Khmers verts et autre totalitarismes fascisants. Tout au contraire. C’est l’obéissance servile aux mécanismes actuels de détérioration de la biosphère et de déliquescence des rapports humains qui nous concocte l’arrivée d’un autoritarisme qui sera toujours classé à droite : inégalitaire et anti-démocratique… »

Devenons casseurs de pub, soutenons les déboulonneurs : « Lors du procès du collectif « les Déboulonneurs », le réquisitoire du procureur a largement reposé sur l’argument d’une atteinte à la liberté d’expression des annonceurs. Mais c’est la publicité qui porte atteinte aux libertés de l’individu ; elle peut aussi avoir des effets nocifs, surcharge cognitive, stress, obésité… »

Devenir activiste avec Greenpeace : « Résister à la pression, rester zen, c’est ce qu’apprennent les futurs activistes. 80 % de cette formation porte sur la non-violence lors du stage de base, le Basic Action Training, le  » BAT « . Les personnes doivent être prêtes à endurer des situations de stress, physique et psychologique. Les militantes ont vite fait de se faire cracher dessus, traiter de « pétasse », de « salope », tu es formée pour sourire, ne pas répondre. Pas toujours facile, mais c’est la condition pour devenir activiste… »

Greenpeace attaque des centrales nucléaires : « Greenpeace, par intrusion dans deux centrales nucléaires, apporte la preuve de leur vulnérabilité. Ce sont des « stress tests » gratuits pour le gouvernement ! Pourtant des commentateurs du monde.fr se déchaînent. Nous répondons…

Fauchage de OGM, obscurantisme ou démocratie : « Jusqu’en 1990, aucune association, aucune personnalité politique, n’entreprend en France de mettre la question des biotechnologies. La France devint terre d’élection des essais d’OGM… »

Appel à la désobéissance généralisée : « L’éducation des petits d’hommes a pour finalité d’en faire, non pas des citoyens obéissants, mais des citoyens responsables, capables d’apprécier et de juger la loi à laquelle l’Etat leur demande d’obéir. En clair, les enfants ne doivent pas obéir à un ordre injuste, quel que soit celui qui le leur demande… »

Appel de prêtres à la désobéissance : « Quatre cents prêtres en Autriche se prononcent dans un appel à la désobéissance pour l’ordination des femmes et la fin de la règle du célibat. Les conservateurs ressentent ce choix du mot  » désobéissance  » comme une dangereuse provocation. Mais la véritable provocation, c’est le maintien d’un ordre injuste… »

LE MONDE incite à l’action directe : « Il est si rare qu’un quotidien d’information générale incite à la désobéissance civile qu’on ne peut que le remarquer. Hervé Kempf ne se contente pas de constater que Greenpeace a lancé un appel à l’action directe non-violente : « Nous sommes face aux industries les plus puissantes du monde, nous ne les vaincrons pas en étant gentils… »

Ne pas confondre désobéisseur et désobéissant :  « La cause profonde des conduites les plus injustes ou les plus cruelles est moins le sadisme de quelques individus que la soumission collective à l’autorité. Or notre société tout entière est basée sur une organisation injuste et cruelle, que ce soit la militarisation de la société, l’exploitation des travailleurs dans les entreprises, le pillage des ressources de la biosphère, etc. L’insurrection des consciences devrait donc être permanente… »

Objection de conscience et religion : « L’objecteur de conscience est défini très officiellement comme « celui qui refuse d’accomplir son service militaire ». Cette démarche est bonne, si tout le monde était objecteur de conscience, il n’y aurait plus d’armées, il n’y aurait plus de guerre. Mais LE MONDE utilise cette expression d’objecteur de conscience pour qualifier tous ceux qui en Espagne n’appliquent pas la loi sur l’interruption volontaire de grossesse… »

Agir avec desobeir.net : « Nous sommes un certain nombre à penser que la situation inquiétante de notre planète nous impose de retrouver le chemin de formes d’action et de lutte plus efficaces et plus radicales. Nous croyons que la réalité des rapports de force que nous subissons en matière de nucléaire civil et militaire, de protection de l’environnement contre les pratiques de certaines multinationales, de mondialisation de l’injustice sociale, etc. exigent de renouer avec une culture de la désobéissance civile/civique, de l’action directe non violente, du refus radical et ludique… »

La désobéissance civile de Henry David Thoreau (1849) : « Il n’est pas souhaitable de cultiver le même respect pour la loi et pour le bien. La seule obligation qui m’incombe est de faire bien… »

Le code de l’écoguerrier : « Si la pub veut faire sa pub, qu’elle accepte donc les phrases des anti-pub. C’est ça la démocratie, l’expression de tous et pas uniquement celle des marchands… »

Vous pouvez aussi lire des livres d’analyse de fond :

Désobéissance civile et démocratie d’Howard Zinn

L’impératif de désobéissance (fondements philosophiques et stratégiques de la désobéissance civile) de Jean-Marie Muller

Petit manuel de désobéissance civile de Xavier Renou

* LE MONDE Science&médecine du 21 mai 2014, Les racines de la désobéissance