Le monde d’après Covid, avec ou sans avions ?

Jean-Michel Bezat, le cul entre trois chaises : « Dans le monde d’après, les hommes s’envoleront à nouveau pour aller au bout de la Terre, sans honte. Passé les violentes turbulences liées au Covid-19, le trafic aérien devrait retrouver son rythme de croisière… (Mais) un voyageur Paris-New York-Paris émet deux tonnes de CO2 – le quota annuel qu’il faudrait attribuer à chaque enfant né aujourd’hui, durant sa vie, pour maintenir la hausse de la température du globe à 2 °C … (Mais) chaque avion de nouvelle génération consomme entre 15 % et 20 % de carburant en moins, grâce à des moteurs plus sobres. Ces progrès technologiques ne s’arrêteront pas, avion propulsé à 100 % par des biocarburants pour la fin de la décennie, court-courrier brûlant de l’hydrogène dans ses réacteurs pour 2035. Objectif : attirer les touristes en mal de destinations exotiques, en attendant un hypothétique retour des hommes d’affaires… (Mais) on peut se battre pour un grand soir écologique. Il suffit d’imposer au transport aérien des taxes environnementales si lourdes qu’il deviendrait inaccessible… (Mais) ce serait revenir aux débuts des vols commerciaux, réservés à une élite fortunée. Et tuer une industrie majeure pour les pays développés, la France en tête. Le ciel sera plus « vert » dans vingt ans, et le rêve d’Icare sauvé. »

Jean-Michel Bezat ménage la chèvre et le chou, mais surtout le Lobby des Avionneurs Irresponsables. Les commentateurs sur lemonde.fr deviennent de plus en plus critiques :

Artemis purple : Le rêve d’Icare n’était pas de faire voler 4,5 milliards de passagers dans une seule année ! Comme tout, c’est l’industrie de masse qui tue l’environnement.

Frédérique Hervé S. : Hormis le fait amusant que cet article base ses prédictions sur celles de l’IATA (donc sur les avionneurs), il est assez frappant que personne, ni l’auteur ni aucun commentateurs, ne se souvienne plus d’un aéronef nommé Concorde. Il y a dix ans encore, peu avant son arrêt, les mêmes avionneurs annonçaient TOUS avoir des plans et des développements pour les appareils transcontinentaux supersoniques du futur. C’était évident. Si je me réfère au destin de Concorde, dans dix ans, on aura sans doute oublié pas mal des bêtises écrites par JM Bezat…

Fouilla : D’abord « chaque avion de nouvelle génération consomme entre 15 % et 20 % de carburant en moins », puis plus loin, « Une nouvelle guerre des prix se profile ». Conclusion, les gains en carburant seront compensés par une baisse des prix et il y aura au moins autant d’émissions CO2, ça s’appelle l’effet rebond. Quand à l’avion à hydrogène pour des vols commerciaux dans moins de 15 ans, qui peut croire une seconde une telle fadaise?

The GonZo Man : Dans le monde d’après on voyagera dans d’immenses soucoupes volantes, et la scène centrale sera occupée par des spectacles pour permettre aux voyageurs de patienter.

Raphou : Pas une seule fois dans toute l’ère industrielle l’amélioration du rendement énergétique n’a entraîné une baisse de la consommation de ressources et donc de l’émission de C02. Si les avions du futurs consomment 50% de kérosène de moins, il s’en produira mécaniquement 50 % de plus, ne serait-ce que pour rembourser les frais de R&D dépensés dans la conception d’un avion mois polluant. Dire que le problème va être résolu avec un avion plus efficace énergétiquement est donc un mensonge flagrant.

Happytaxpayer : l’avion de masse a standardisé le voyage… les mêmes galeries commerciales se retrouve ntdans toutes les villes du monde avec les mêmes produits…. le néant. C’est plus dépaysant fe séjourner en Aveyron qu’à l’île Maurice.

Danmer : C est incroyable au vu des contributions, le nombre de personnes apeurées par le futur. C est par le haut et les progrès scientifiques que la vie sur terre s améliorent. Pas par un retour à l ère préhistorique

Transition_necessaire @ Danmer: La vie sur Terre ne s’améliorera pas avec un réchauffement non contrôlé et les éventuels emballements si l’on dépasse certains seuils. Vous n’avez pas peur, tant mieux pour vous.

Pangeran : Le transport aérien est une cible facile pour les critiques alors que l’impact de l’utilisation intensive d’internet a un impact nettement plus important. Mais on ne peut pas s’en passer. Le monde qu’on nous promet sera sans avion et sans internet ? Allons voyons soyons sérieux.

Stéphane Savoie @ Pangeran : Oui, nous volerons sans doute plus de plus en plus, de moins en moins cher dans une guerre commerciale sans fin, bercés par la douce musique réconfortante des progrès technologiques qui ne lèveront jamais le coût énergétique forcément énorme de défier la gravité… Et alors nous nous crasherons, dans un cataclysme environnemental à l’échelle de notre démesure. Enfin, peut être, nous accepterons la mesure et apprendrons qu’elle n’empêche pas de rêver, de défier la connaissance.. Mais avec respect, douceur et partage.

F.a. : Dans le monde d’après, qui sera comme le monde d’avant en pire, les hommes – et les femmes – rouleront aussi encore en SUV, en 4X4, des grosses voitures prétentieuses, la clim à fond parce qu’il fera « un peu chaud », vite, vite, vite, sur des autoroutes flambant neuves, sans savoir pourquoi, sans honte et sans vergogne et sans but, parce que c’est comme ça, et que le voisin fait pareil, et que sinon c’est la honte.

Pour en savoir plus grâce à notre blog biosphere :

22 mai 2020, L’aviation au banc des accusés, coupable ! (synthèse)

21 juin 2019, Mettre à terre le lobby aérien

25 juillet 2015, Limiter le trafic aérien, réduire les gaz à effet de serre

25 septembre 2011, Jean-Michel Bezat occulte la fin du pétrole

9 réflexions sur “Le monde d’après Covid, avec ou sans avions ?”

  1. Esprit critique

    Avionophiles ou pas, plusieurs commentateurs sur lemonde.fr mettent en avant le fait que l’avion ne représente que 2% des émissions totales de CO2. Et donc qu’il convient de mettre la priorité ailleurs, d’arrêter de se focaliser là dessus, et de chercher à jeter la honte sur ceux qui prennent l’avion.
    Seulement c’est oublier que tout est lié. Déjà qu’il n’y a pas que le problème du CO2, ni que celui du climat. Maintenant si on veut mettre la priorité sur le climat, il ne faut pas oublier que l’avion est directement lié au tourisme, qui lui est lié au développement, à la croissance, à l’emploi etc. L’avion est également lié aux transports (de marchandises), à l’industrie (aéronautique etc.) et plus généralement au Business (voyages d’affaires). Tout cela étant lié au développement, à l’emploi etc. Bref c’est le cercle infernal.
    Alors dans cet imbroglio, quelle devrait être la priorité ?

    1. Et le nombre d’émission de CO2 par passager ? Qu’en est il ? C’est facile de présenter comme ridicule avec le chiffre 2% mais c’est beaucoup ! Surtout par passager ! D’autant que 2 % est aussi un chiffre dilué avec tous les autres biens et services, industries, etc Si chaque secteur procède ainsi alors chaque secteur aussi pourra présenter un chiffre de 2 % hormis que les 2 % ne sont pas partagés par autant de bénéficiaires (usagers, passagers, consommateurs ou personnes)

  2. Je n’ai pas fait l’effort de disséquer ces 68 contributions, de compter les POUR et les CONTRE (l’Avion), mais si les commentateurs sur lemonde.fr deviennent de plus en plus critiques, alors tant mieux. C’est déjà ça.
    Pour répondre à la question, “le monde d’après Covid“ sera évidemment AVEC avions. N’allons pas croire que le Covid marque le début d’une nouvelle ère. Comme il n’a pas commencé à tourner avec l’invention de l’avion, ni même avec la naissance de JC, le monde ne s’est pas arrêté de tourner avec le Covid. Pour moi, l’Avant ou l’Après Covid n’a donc pas beaucoup de sens. Bien sûr, et comme tant d’autres, le Covid restera un évènement qui marquera l’Histoire, ainsi que les mentalités.
    La question devrait plutôt être, combien de temps encore allons-nous voir voler des avions ?
    Autrement dit pour certains, combien de temps vais-je encore pouvoir le prendre ?
    (l’Avion, le SUV, le 4×4, la Bagnole etc.)

    1. [N’allons pas croire que le Covid marque le début d’une nouvelle ère.]

      Et pourquoi pas ? Si le Covid devient un phénomène récurrent, avec 100 000-200 000 morts/an rien qu’en France (et 3-4 millions/an dans le monde), alors oui, le transport aérien de masse cessera d’exister. Qui prendra le risque d’aller en vacances dans un pays lointain avec la menace de rester bloqué dans ledit pays sans possibilité de retour pendant des mois/années ?

      Et c’est pourquoi le avant/après Covid a, au contraire, beaucoup de sens. Combien de pays en Europe ont fondé une part (trop) importante de leur économie sur le tourisme : Espagne, Grèce, Chypre, France…

      Un futur avec avions : oui. Avec BEAUCOUP moins d’avions : oui aussi.

      1. @Guy : Ce que je veux dire, c’est que tout est n’importe quoi peut-être considéré comme le début d’une nouvelle ère, époque, voire d’un nouveau monde. L’invention du feu, de la roue, de l’imprimerie etc. tout ça marque en effet le début d’autre chose, et par conséquent la fin de ce qui précède. Sauf que le pétrole n’a pas mis fin au charbon, que l’avion n’a pas mis fin aux autres modes de déplacements etc. On nous a dit qu’après le 11 septembre 2001 le monde ne serait plus comme avant, bien plus tôt on a cru que ce serait la «der des ders», demandons-nous seulement ce que ces évènements ont vraiment changé.

      2. (suite) Pour en revenir aux avions, le Covid ne devrait pas les empêcher de voler. Pour peu que le Vaccin soit efficace, l’immunité collective etc. et notamment grâce au Passeport … si ça peut vous rassurer dites-vous que l’Avion a encore un bel avenir. Jusqu’à quand, c’est une autre affaire. L’Avion, et donc le Tourisme, le Business etc. (lire commentaire 5 MAI 2021 À 13:41)
        La seule chose qui mettra un terme à l’Avion, au Tourisme, à la Bagnole, à la débauche de consommation, à notre mode de vie de petits-bourgeois etc. ce sera la fin du Pétrole. Ce qui n’empêchera pas la terre de continuer à tourner.

    1. Bonjour Didier Barthès.
      Je partage l’analyse qui est faite dans cet article dont vous êtes l’auteur. Au delà des raisons techniques et commerciales de l’échec du Concorde, nous devrions en effet tirer des leçons de cet échec. Nous sommes en admiration devant les innovations, et nous ne voyons pas que les plus grandes inventions ne sont certainement pas celles-là. La tôle ondulée par exemple… eh ben tout le monde s’en fout ! Et pourtant. Et le préservatif, hein, ça vous parle ?

      – « Le condom est-il historiquement plus important que l’avion ? »
      Non non rassurez-vous je ne suis pas encore là en train de me moquer, je suis très sérieux.
      J’en ai déjà parlé, peut-être allez-vous vous souvenir. Cette question c’est David Edgerton* qui la pose dès le début de son livre (p.27) que je vous invite à lire.

      QUOI DE NEUF ? Du rôle des techniques dans l’histoire globale. (éditions du Seuil-février 2013)
      * David Edgerton est historien des sciences.

    2. Du Concorde, comme par hasard David Edgerton en a parlé sur son blog le 21 JUIN 2019.
      ( davidedgerton.org/blog )
      PLUS DE CONCORDES ? QUELQUES RÉFLEXIONS SUR L’HISTOIRE DE LA STRATÉGIE INDUSTRIELLE BRITANNIQUE

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