Nombreux sont ceux, même parmi les non croyants, qui se réjouissent de la prise de position du pape en faveur de protection la nature à l’occasion de la publication de l’encyclique Laudato si. Il était temps en effet qu’une autorité morale du plus haut niveau rappelle aux hommes la gravité des menaces qui pèsent sur notre monde et la responsabilité qui est la leur. Quelques mois avant la tenue des négociations sur le climat (COP 21) cela ne pouvait mieux tomber.
Toutefois, si le courage et le modernisme du pape sont incontestables, sa position sur la démographie reste absolument conventionnelle et fait bon marché des contraintes écologiques au profit de la défense séculaire d’un natalisme militant. Alors qu’au cours du dernier siècle le monde a multiplié ses effectifs par quatre, alors qu’au cours des 45 dernières années ce sont 50 % des vertébrés qui ont disparu (2) du fait de notre envahissement de tous les territoires, alors que les océans se vident à grande vitesse, alors qu’un continent, l’Afrique, voit nombre de ses efforts de développement obérés par une croissance démographique encore non maîtrisée (au cours du 20ème siècle l’Afrique devrait passer de 1 à 4 milliards d’habitants), voici ce que dit le pape François de la question (chapitre 50 de son encyclique Laudato si)
« Au lieu de résoudre les problèmes des pauvres et de penser à un monde différent, certains se contentent seulement de proposer une réduction de la natalité. Les pressions internationales sur les pays en développement ne manquent pas, conditionnant des aides économiques à certaines politiques de “ santé reproductive ”. Mais « s’il est vrai que la répartition inégale de la population et des ressources disponibles crée des obstacles au développement et à l’utilisation durable de l’environnement, il faut reconnaître que la croissance démographique est pleinement compatible avec un développement intégral et solidaire ». Accuser l’augmentation de la population et non le consumérisme extrême et sélectif de certains est une façon de ne pas affronter les problèmes ».
Le pape offre là une douche froide à tous ceux chez qui était né l’espoir que l’Église Catholique s’oriente vers une position plus raisonnable en matière de contrôle de la fécondité. Espoir né en janvier dernier suite à ses déclarations lors d’un voyage aux Philippines. A cette occasion François avait en effet affirmé qu’il n’était pas nécessaire de se reproduire comme des lapins pour être de bons catholiques. Il avait également réprimandé une femme enceinte déjà mère de nombreux enfants. Las, de toute évidence cette remarque visait à éviter les situations personnelles difficiles mais elle n’indiquait en aucun cas une prise de conscience des limites écologiques à l’explosion démographiques.
François signe là aussi une assez grande méconnaissance du problème. La croissance démographique est clairement incompatible avec la protection de la nature qui est pourtant l’objet de cette encyclique.Une méconnaissance du problème écologique proprement dit (mais où le pape mettra-t-il toutes les autres créatures de Dieu si l’Homme augmente encore ses effectifs ? Jésus n’a pas multiplié les mètres carrés, même dans les écritures). Mais aussi méconnaissance des propos des antinatalistes. Dans leur grande majorité, ceux-ci sont profondément écologistes. Ils ne se contentent pas « seulement de proposer une réduction de la natalité », ils affirment que c’est une condition nécessaire bien que non suffisante. Ils regrettent qu’elle soit si souvent passée sous silence mais ils savent aussi qu’elle s’insère dans un ensemble de problèmes encore plus vaste qui est celui de notre rapport à la nature. Caricaturer leur propos ne fait pas avancer la prise de conscience.
Pour connaître le texte intégral, aller à la source.
Bonjour,
Le problème pour notre environnement n’est-il pas davantage l’overshoot day (jour du dépassement) ?
Si l’on prend l’exemple du Nigeria, avec une population pléthorique, on observe qu’ils « consomment » 0,6 planète Terre par an. Tandis que les pays européens globalement « consomment » 3 planètes par an. D’autres pays ont un niveau de vie qui les amène à consommer 8 fois les ressources planétaires par an. On pourrait prendre d’autres exemples.
La question démographique est fondamentale mais la surconsommation des ressources planétaires n’est-elle pas la partie immergée de l’iceberg ?
Merci
Dans plusieurs de nos articles, nous avons déjà insisté sur le fait que la décroissance démographique ET la décroissance économique sont les deux facettes indissociables des solutions à apporter au fait que les humains dépassent les possibilités durables de la planète…
– « François signe là aussi une assez grande méconnaissance du problème. […] Mais aussi méconnaissance des propos des antinatalistes. […] Caricaturer leur propos ne fait pas avancer la prise de conscience. »
La caricature vaut dans tous les sens. Faut pas non plus prendre François pour un benêt. Comme si un pape ne pouvait pas être au courant du changement climatique, de la sixième extinction etc. Comme si François ne savait pas qui est Malthus etc. Maintenant tout bon apôtre du Pasteur devrait comprendre qu’il ne faut pas attendre d’un pape qu’il renonce à sa religion (sa foi, ses valeurs etc.) Malthus lui aussi prônait l’abstinence, il devait pourtant avoir entendu parler du préservatif, non ? Faut croire que les papes et les pasteurs n’aiment pas le sexe.
On ne lui demande pas de renoncer à sa foi, juste de respecter la beauté du monde qui suppose que les hommes le partagent avec le reste du vivant. C’est un comble de la part d’un pape qui a choisi de s’appeler François que d ignorer ainsi que toutes les créatures de la Terre ont besoin d’espace.
On apprenait au catéchisme que, selon l’Eglise elle-même, l’infaillibilité du pape était réservée au domaine de la foi, et qu’en aucun cas elle ne s’étendait à tous les savoirs.
Le curé de mon village nous avait expliqué qu’il pouvait parfaitement se tromper dans la prévision du temps du lendemain.
C’est pareil pour la démographie, ce n’est pas un expert.