Les coulisses du congrès EELV à Caen (le 30 novembre)

Petit lexique pour se retrouver dans les arcanes du congrès d’Europe Ecologie Les Verts : les 7 motions dites d’orientation et leur score aux congrès décentralisés (détermine le nombre de délégués à Caen et 80 % du Conseil fédéral)

AE, Avenir écolo – 6,3 % (l’écologie de rupture avec la société de croissance)

Cap, Pour un cap écologiste – 38,3 % (la majorité sortante autour de Cécile Duflot)

Dét, Déterminé-e-s – 4,1 % (motion assez indéterminée)

Love, Là où vit l’écologie – 8,7 % (pour une écologie qui se rapproche du Front de gauche)

LMP, la motion participative – 20,6 % (critique de la majorité à laquelle ils participaient auparavant)

OT, objectif  Terre – 3,5 % (mouvement tourné vers l’utopie)

VE, Via Ecologica – 17,1 % (avec Marie Bové et Jean Desessard, on n’en sait pas plus)

Votes blancs, 1,4 %

Il n’y avait aux congrès décentralisés que 5 413 votants pour 10 400 électeurs. Pour le congrès final à Caen le samedi 30 novembre, 600 délégués vont trancher sur les regroupements possibles entre motions. Les débats à l’intérieur de chaque motion et les négociations entre motions font chauffer Internet et les téléphones : résultat final en début d’après-midi samedi.

Une association des motions minoritaires AE, Love, Dét et OT cherche à augmenter son poids relatif. Mais les deux dernières n’ont pas obtenu les 5 % aux congrès décentralisés et toutes ne sont pas forcément sur la même ligne politique. Alors reste deux options. L’une veut promouvoir une grande réconciliation autour de Cap (la motion sortante), genre synthèse fourre-tout qui a si bien réussi précédemment au syndicat des éluEs. EELV continuera de faire cause commune avec le PS et l’écologie perdra le peu de visibilité qui lui reste aux yeux des citoyens. Il s’agit d’une écologie complice d’une société productiviste. Cap estime que le Secrétariat National donné à Emmanuelle Cosse (nommée médiatiquement par la ministre du logement avant le congrès) n’est pas négociable… mais il faut avoir en sa faveur 60 % des délégués pour en décider. Or Cap est minoritaire : 80 % des élus et des salariés d’élus sont dans une motion qui n’a obtenu que 38 % des voix, 35 % des délégués à Caen et 33 % des conseillers fédéraux. De toute façon, trois jours avant le congrès, rien de concret n’est encore sorti des négociations actuelles entre Cap et les autres motions.

Reste donc l’autre option, un affrontement qui refuserait la motion générale de synthèse avec Cap. Une écologie de rupture ? Pour certains, il est en effet indispensable de reconstruire la confiance entre EELV, ses adhérents, les citoyens et les électeurs écologistes, ce qui ne peut être fait avec Cap, inféodé au parti socialiste. On veut bâtir une autre majorité qui succédera à Cap. Yves Cochet, principal initiateur de la motion LMP, suit cette stratégie : « Le groupe LMP, OT, AE, Love, Dét doit avoir pour objectif de battre CAP au congrès ». Des personnalités comme Jacques BOUTAULT et Alain COULOMBEL ont eux aussi évoqué la possibilité de battre CAP au congrès. Mais on ne sait même pas ce que veut réellement VE qui pèse quand même 17 % des suffrages !

Tout est donc encore possible. D’autant plus que certains délégués des motions minoritaires ne soutiendront peut-être pas une synthèse faite sans eux, et réciproquement certains membres des motions importantes peuvent voter contre leur camp. Les votes sont anonymes et beaucoup de militants politiques suivent le sens du vent ! Cerise sur le gâteau, les vrais décideurs, ceux qui vont rédiger la ou les motions de synthèse, restent dans l’ombre.

Le jeu d’alliances entre motions est plein d’effets pervers, il y a perte de lisibilité, d’énergie, de temps, de connexion entre la base et les exécutifs, etc. Un système de votation en deux étapes, au niveau régional puis national, se veut démocratique en théorie et en pratique se perd dans les sables mouvants. L’écologie y perd des plumes…

5 réflexions sur “Les coulisses du congrès EELV à Caen (le 30 novembre)”

  1. L’analyse du Monde : Cuisine et dépendances chez Europe Ecologie – Les Verts
    – Le piège s’est refermé sur les écologistes : qu’ils parviennent à un large rassemblement et il leur serait reproché une unité de façade. Qu’ils échouent, et ce sont leurs divisions qui seraient pointées du doigt.
    – La question des investitures aux européennes a parasité les discussions. Dans un contexte où les écologistes ne parviendront que très difficilement à conserver leurs 16 élus sortants, chacun a cherché à sauver sa peau.
    – Certains proches de Daniel Cohn-Bendit ont sécurisé leur place en ralliant les ennemis d’hier autour de Mme Cosse. Le choix de Via Ecologica (l’une des motions les plus favorables à la participation gouvernementale, mais aussi l’une des plus critiques envers la direction sortante) de s’allier à la motion de Cécile Duflot (Cap) n’y est pas non plus étranger et permet à Karim Zéribi, député européen sortant passé du PS à EELV, de se placer pour 2014.
    – Autant de points qui ont occulté les enjeux écologiques, dont il aura été très peu question. Du soutien critique à la critique du soutien au gouvernement, les écologistes sont devenus inaudibles.
    – Au final, rien dans ce congrès n’aura permis de démentir les accusations de M. Mamère sur la « firme » qui dirigerait le parti. Fait rare, si Mme Duflot a été applaudie lors d’une courte prise de parole samedi, elle a aussi essuyé quelques huées.
    Raphaëlle Besse Desmoulières (04/12/2013)

  2. Un processus de bureaucratisation du parti écolo
    Les Verts disposent d’un matelas d’élus non négligeables qui amorce un processus de professionnalisation de l’organisation : 17 députés, 12 sénateurs, 16 députés européens, 263 conseillers régionaux, 54 conseillers généraux et 60 maires. Si l’on y ajoute la nébuleuse de collaborateurs rattachés aux élus, les enjeux d’appareil commencent à peser fortement sur le dispositif politique général des Verts et c’est une des problèmes fondamentaux de ce congrès de Caen.

  3. Un processus de bureaucratisation du parti écolo
    Les Verts disposent d’un matelas d’élus non négligeables qui amorce un processus de professionnalisation de l’organisation : 17 députés, 12 sénateurs, 16 députés européens, 263 conseillers régionaux, 54 conseillers généraux et 60 maires. Si l’on y ajoute la nébuleuse de collaborateurs rattachés aux élus, les enjeux d’appareil commencent à peser fortement sur le dispositif politique général des Verts et c’est une des problèmes fondamentaux de ce congrès de Caen.

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