Il y a plus de quarante ans, l’impossibilité de poursuivre une croissance indéfinie dans un monde fini était déjà démontrée par le rapport au Club de Rome dont voici ci-dessous un extrait centré sur la pêche : « Rares sont ceux qui imaginent devoir apprendre à vivre à l’intérieur de limites rigides lorsque la plupart espèrent les repousser indéfiniment. Cette foi s’est trouvée renforcée par une croyance en l’immensité de la terre et de ses ressources et en la relative insignifiance de l’homme et de ses activités dans un monde apparemment vaste. Ce rapport entre les limites de la terre et les activités humaines est en train de changer. Même l’océan, qui, longtemps, a semblé inépuisable, voit chaque année disparaître, espèce après espèce, poissons et cétacés. Des statistiques récentes de la FAO montrent que le total des prises des pêcheries a pour la première fois depuis 1950 accusé une baisse en 1969, malgré une modernisation notable des équipement et des méthodes de pêche (on trouve par exemple de plus en plus difficilement les harengs de Scandinavie et les cabillauds de l’Atlantique. »
Il est français mais inconnu en France. Il est pourtant le premier à alerter la communauté internationale sur la surexploitation des ressources halieutiques. S’appuyant principalement sur les statistiques de la FAO, Daniel Pauly prouve en 2001 que les stocks de poissons diminuent depuis la fin des années 1980… Il démontre que les humains pêchent des poissons de plus en plus bas dans la chaîne alimentaire des océans : nous finirons par manger du zooplancton… Selon l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture, la FAO, la pêche mondiale a connu un pic en 1996, avec 86 millions de tonnes de poissons sortis de l’eau, puis elle est restée quasiment « stable ». Daniel Pauly et Dirk Zelly approfondissent la question par une étude de janvier 2016*. Ils chiffrent le maximum à 130 millions de tonnes en 1996. Puis les performances de la pêche ont régressé de 1,2 million de tonnes par an. Malgré la forte croissance des armements, la diffusion des techniques industrielles de pêche jusque dans les coins les plus reculés de la planète et la sophistication toujours plus poussée du matériel, les tonnages des captures ne cessent de diminuer. Or le poisson reste un apport de protéines essentielles auprès de beaucoup de populations côtières,
L’humanité aura besoin en 2050 du double de ce que produit la planète tous les ans. Nous devrons donc puiser dans les réserves. A force d’y puiser, les réserves qui ne seront pas encore épuisée à cette époque ne seront ni nombreuses, ni importantes, que ce soit en énergie fossiles, en eau potable ou en matière premières naturelles. La plupart des experts prédisent que les stocks de poissons commerciaux seront épuisés, des forêts presque totalement détruites et des réserves d’eau douce faibles et polluées. Il n’est pas raisonnable d’espérer que d’hypothétiques découvertes miraculeuses nous mettront à l’abri des effets de l’interaction entre une population une demi-fois plus nombreuse qu’aujourd’hui en 2050 (ndlr : soit 9 milliards d’êtres humains), des ressources rares et chères, des écosystèmes déréglés et un climat moins complaisant. Il est même assez probable que le tout génère des troubles sociaux, voire géopolitiques généralisés.
* LE MONDE du 21 janvier 2016, La surpêche et le déclin des ressources ont été largement sous-estimés