Le système thermo-industriel a inventé la « neutralité carbone » pour persévérer dans son être : on pourra toujours émettre davantage de gaz à effet de serre, il suffit de compenser par ailleurs ses émissions de gaz à effet de serre grâce aux arbres. Est-ce possible ? Il y a des différences de temporalités entre le biologique et le géologique. Les arbres plantés aujourd’hui mettront plusieurs dizaines d’années pour séquestrer les émissions actuelles alors que le CO2 a une durée de séjour approximative de cent ans dans l’atmosphère. Sans compter qu’avec le changement climatique, les forêts sont plus vulnérables aux feux, aux insectes et aux maladies, et qu’à des températures trop élevées, elles relâchent du carbone au lieu d’en stocker.
Paul Dalmasso : L’Agence de la transition écologique (Ademe) rappelle que le concept de neutralité carbone n’a « réellement de sens qu’à l’échelle de la planète et ne peut pas s’appliquer à une autre échelle ». Les acteurs économiques, collectivités et citoyens qui s’engagent pour la neutralité carbone ne peuvent se revendiquer “neutres en carbone”, l’atteinte d’une neutralité carbone arithmétique n’ayant pas de sens à leur échelle. Pourtant certaines entreprises revendiquent, dans leurs annonces publicitaires, la neutralité carbone… Leur procédé de compensation consiste à financer, par l’achat de « crédits-carbone », le développement de puits de carbone ayant vocation à absorber les émissions de l’entreprise. Ne disposant pas actuellement de technologies efficientes pour absorber des quantités significatives de CO2, ces crédits financent principalement le développement de puits biologiques (projets de reforestation). Cette compensation n’est pas universalisable puisque le potentiel d’absorption des émissions résultant de la forestation/reforestation des terres disponibles s’élèverait à 367 milliards de tonnes de CO2, soit l’équivalent de seulement dix années d’émissions (37 milliards de tonnes de CO2/an). Or le Sénat autorise finalement les annonceurs à revendiquer la neutralité carbone, et donc promeut le « greenwashing ». Plus grave encore : il ancre, dans l’inconscient collectif, le biais selon lequel la neutralité carbone serait facilement atteignable, sans qu’il soit nécessaire de repenser notre structure socio-économique.
Biosphere : Il est impossible de garantir l’additionnalité des projets, le fait qu’ils n’auraient pas pu voir le jour sans la compensation. Seule une approche macro prenant en compte la statistique globale des émetteurs et récepteurs de CO2 ainsi que de la distribution dans le temps des puits de carbone permettrait de conclure si le système fonctionne ou pas. De toute façon il parait impossible qu’il y ait assez de surface à vocation forestière sans intérêt économique ni écologique pour qu’on puisse fournir massivement de nouveaux puits de carbone ex nihilo.Pour compenser ses émissions de CO2 produites par ses centrales à charbon, l’Allemagne devrait être couverte de forêts et cela ne suffirait pas ! Sur ce blog biosphere, nous condamnons depuis longtemps ce trafic des indulgences à savoir la rémission totale ou partielle devant Dieu de la peine temporelle encourue en raison d’un péché pardonné, ce qui se faisait généralement contre espèces sonnantes et trébuchantes. La forêt devient un alibi qui fait passer au second plan la priorité numéro un, c’est-à-dire la décarbonation de pans entiers de l’économie. Il faut en finir avec la voiture individuelle, l’avion pour touristes, le chauffage à gogo et les énergies fossiles.
Pour en savoir plus grâce à notre blog biosphere :
28 mars 2019, Désastre en 2050, neutralité carbone impossible
11 mars 2019, Neutralité carbone en 2050, la volonté de ne rien faire
26 septembre 2018, La comptabilité morale des petits-pas en écologie
8 octobre 2016, Compensation carbone, l’hypocrisie de l’aviation civile
19 janvier 2016, loi sur la biodiversité, la mascarade de la compensation
5 novembre 2013, effet rebond, compensation carbone… hypocrisie morale !
8 janvier 2010, l’illusion de la compensation carbone
30 janvier 2009, CLIMAT, l’illusoire compensation carbone
2 février 2008, compensation carbone ?
Ce débat sur les compensations aux émissions de CO2 avec des puits à carbone ou autres forêts est la démonstration de l’incurie des gens qui ne connaissent rien et ne cherchent pas à savoir pour juste écouter des avis fouareux d’entraîneurs qui eux ont des objectifs de manipulations des foules.
A l’attention des moutons de panurges, je rappellerais des vérités qu’ils pourront vérifier dans tout ouvrage scientifique.
1/ le gaz carbonique a une concentration dans l’atmosphère de 0,04% et l’oxygène de presque 21 % pour une raison simple, le CO2 est très soluble dans l’eau et l’O2 très peu autour de 1000 fois moins.
2/ une molécule de CO2 est plus lourde que l’O2 et le N2.
3/ le CO2 libéré par les émissions industrielles n’est pas évalué par rapport aux émissions de CO2 dues à la dégradation de la biomasse et des gaz de volcans.
La fable du Développement Durable (oxymore) et de sa soeur la Croissance Verte a du plomb dans l’aile. Pour autant n’allons pas croire qu’on (?) serait à court d’idées, pour d’autres fables.
La preuve, on nous a inventé l’Économie Circulaire, parfaite elle aussi pour tourner en rond.
Reconnaissons déjà que ces fables nous arrangent bien, ne serait-ce que quand nous payons pour «compenser» le week-end à Rome en avion, ce qui revient à faire comme ces bourgeois qui donnaient l’aumône aux mendiants à la sortie de la messe. Ces fables nous arrangent aussi parce qu’elles nous permettent de croire qu’on rame dans le bon sens. C’est très important d’être en paix avec sa petite con science.
Ces fables utilisent des mots et des expressions trompeuses. La propagande pour la Transition en regorge, ne serait-ce déjà que ce mot transition. Lors des débats et autres «débats» ces mots et expressions sont dans toutes les bouches, donc dans toutes les têtes. Les mots développement, progrès, durable, propre et vert ne trompent plus que les gogos. Pas que ceux-là bien sur. Nous voyons depuis un moment ce qu’est devenue l’Écologie, comme nous voyons ce qu’on a fait de la Décroissance, précédemment nous avons vu ce que devenait la Sobriété,. Maintenant nous avons donc affaire à la Compensation et la Neutralité, derrière lesquels il y a le Zéro.
Le «Zéro Carbone» a donc lui aussi le vent en poupe. Tout naturellement nous le retrouvons dans la Propagande et dans la Pub, affiché en gros sur des bus, des bagnoles et n’importe quoi. Ce fumeux «Zéro Carbone» est généralement associé aux précédents attrapes-couillons, le temps de la transition… j’espère que vous suivez. Probablement pour amuser les adeptes des Dé, on dit aussi «Décarbonné». Comme on dit décaféiné, pour le café. Bref, l’idée c’est qu’en faisant comme ci et comme ça, et avec Ceci et Cela, au final et tous comptes faits (très compliqué !)… on émet zéro carbone. Pas la moindre petite molécule de CO2 !
Cette idée est évidemment absurde, même nos lointains ancêtres émettaient du CO2, ne serait-ce qu’en respirant. Et plus encore à partir du jour où ils ont fait du feu.
Le «Zéro Carbone» devrait donc lui aussi être banni des discussions sérieuses.
@ LAURENCE TUBIANA
Vous avez récemment dit que le «greenwashing est le nouveau déni climatique».
Précisons si besoin, que le greenwashing ne porte pas seulement sur le Climat.
La Compensation et la Neutralité Carbone sont bien évidemment des formes de déni climatique.
Des trucs qu’on (?) a inventé pour se faire croire (déni), et pour nous faire croire (tromperie), qu’il est possible de continuer à émettre du CO2 (GES) sans détraquer encore plus le Climat. Tout ça bien sûr c’est du pipeau et vous le savez.
Seulement même si c’est incohérent, comme vous dites, autrement dit même si nous n’y croyons pas, nous devons faire avec le fait que cette fable (conte) permet à plus d’un de maintenir leur équilibre (homéostasie) et d’avoir notamment la conscience tranquille. C’est ce qu’on appelle le déni. Nous pouvons aussi nous demander à qui profite le crime. Le crime ou la tromperie peu importe. Bref, déjà là c’est ce que j’appelle tourner en rond.
Pour en finir de cette fable de Compensation et de Neutralité Carbone, et de «net carbone», vous plaidez pour qu’on parle plutôt de «vrai zéro»… au sujet «des vraies réductions d’émissions, qui ne passent pas par la compensation». C’est vrai que nous devons faire très attentions aux mots. Vous parlez également de «crédibilité».
Déjà, qui peut croire… à cette fable de Vrai Zéro Carbone ? Ne plus brûler aucun fossiles (pétrole, gaz, charbon), ni arbres, ni rien du tout ? Je comprends toutefois qu’il ne s’agit pas, bien sûr, ni d’atteindre ni de tendre vers ce Zéro, ce qui serait absurde.
Alors pour éviter d’en rajouter à la Confusion et de nous faire encore plus tourner en rond, de mon côté je plaide pour qu’on utilise tout simplement le mot RÉDUIRE. Et autres mots et expressions que personne ne pourra interpréter de travers, ni moquer, ni traficoter.
Je suis la première à avoir mis le net zéro [zéro émission nette] et les stratégies de long terme dans l’accord de Paris. Mais ils sont inutiles, si l’on a aucune idée de comment faire. Ou si, comme des grands pays pétroliers ou des entreprises pétrogazières, on dit qu’on continue de produire et d’exporter du pétrole, tout en visant la neutralité carbone. C’est incohérent.
Je plaide pour qu’on ne parle plus de net zéro, mais de vrai zéro, des vraies réductions d’émissions, qui ne passent pas par la compensation – les crédits de carbone que l’on peut acheter à d’autres –, dont on sait qu’elle ne génère pas de véritables réductions d’émissions.La proposition du secrétaire général de l’Organisation des Nations unies, Antonio Guterres, d’évaluer les engagements des acteurs non étatiques – ce qui n’existe pas encore – nous aidera à compléter ce processus de crédibilité.