Voici un résumé du dernier post de Matthieu Auzanneau sur petrole.blog.lemonde.fr. Dommage que LE MONDE papier ne se fasse jamais l’écho de ces analyses:
« En décembre 2012 au Qatar, le PDG de Total, Christophe de Margerie, estimait que la production mondiale de brut atteindra son maximum au cours des années 2020, à 95 millions de barils par jour (Mb/j). Selon le patron de Shell, « il faudrait que le monde ajoute l’équivalent de quatre Arabie Saoudite ou de dix mers du Nord dans les dix prochaines années, rien que pour maintenir l’offre à son niveau actuel » (pas moins de 45 Mb/j de capacités nouvelles). Aujourd’hui Helle Kristoffersen, directrice de la stratégie générale du groupe Total et Guillaume Chalmin, chargé plus spécifiquement de la stratégie d’exploration, expliquent leur optimisme à Matthieu Auzanneau. Les capacités nouvelles attendues, ce sont d’une part des champs entièrement nouveaux, et d’autre part des champs déjà en production dont Total estime qu’il sera possible de relancer les extractions.
– sables bitumineux, essentiellement au Canada : + 7 Mb/j (!)
– Irak : + 5 Mb/j
– offshore très profond au large du Brésil : + 3 à 4 Mb/j
– réservoirs « compacts » en Amérique du Nord (huiles de schiste pour l’essentiel) : + 2 à 4 Mb/j
– plusieurs nouvelles ressources en cours de prospection en Afrique, dans le grand Nord ou au large de la Guyane, plus incertaine ; d’après les chiffres avancés, l’ensemble de ces ressources représente a priori un potentiel de production supplémentaire de + 2 à 5 Mb/j.
Dans le meilleur des cas, Total obtient donc un total de quelque 25 Mb/j de capacités d’extraction issues de puits qui n’existent pas encore. Où trouver les 20 ou 25 Mb/j restant pour parvenir à l’objectif souhaité de 45 Mb/j supplémentaires ? La direction de Total n’a pas fourni de réponse directe à cette question pourtant décisive. Helle Kristoffersen a évoqué le montant colossal des investissements nouveaux consentis par l’industrie pétrolière un peu partout dans le monde : 600 milliards de dollars, rien qu’en 2011, soit près du quart du PIB de la France ! Déverser des milliards ne suffit plus à garantir une production. Guillaume Chalmin a insisté sur les progrès de la sismologie et des techniques de récupération. Sans garantie de résultat !
Qu’en conclure ? Au moins ceci : à Total ou ailleurs, l’incertitude dans laquelle baigne désormais l’industrie la plus vitale pour l’avenir de l’économie mondiale paraît atteindre un degré ahurissant. Se peut-il que les rois du pétrole soient nus ? »