La demande de Chantal Sébire au droit à mourir a été refusée par la justice. Atteinte d’une maladie incurable et très invalidante, le tribunal lui a refusé, en l’état actuel de la législation, la prescription d’un produit létal. L’éditorial du Monde (19.03.2008) indique à juste titre qu’il ne faut pas légiférer sous le coup de l’émotion. Mais il pose clairement le problème de fond : « Quelles frontières tracer entre la vie et la mort, entre la liberté du malade et l’obligation des médecins ?
La convention européenne des droits de l’Homme fait jaillir la contradiction des principes, le droit à la vie (article 2) d’un côté, le droit à la liberté (article 5) de l’autre. Pourtant ce débat a déjà été tranché avec l’autorisation de l’interruption volontaire de grossesse. L’individu peut s’arroger le droit de vie ou de mort dès la conception d’un autre que soi-même, et la société peut prendre en charge l’avortement. Pourquoi faudrait-il que l’individu en toute possession de ses moyens ne puisse pas décider de la continuité ou de la fin de sa propre existence ? Le suicide n’est-il pas un droit que l’on s’arroge même si la société n’est pas d’accord ? D’ailleurs, c’est la structure globale de la société et le regard qu’une culture porte sur le passage à l’acte qui explique le taux plus ou moins important des suicides. Suicide calme et non pathologique aux Philippines, recherche de l’immortalité en Chine bouddhiste, inadaptation face à la montée de la modernité au Maghreb, suicide apparemment absent en Afrique noire dans les milieux sociaux traditionnels.
Le parlement français a voté en 1987 un texte spécifique réprimant la « provocation au suicide » et « la propagande ou la publicité en faveur de produits, d’objets ou de méthodes préconisées comme moyen de se donner la mort ». Il s’agissait en fait d’interdire le livre « Suicide, mode d’emploi. Mais comme aucune loi ne peut empêcher de se donner la mort, pourquoi la société ne donnerait-elle pas à l’individu les moyens de sa liberté ? Où placer une dignité humaine indéfinissable ? Une maladie incurable ne peut-t-elle donner le droit au suicide assisté ? Enfin, si on se place du point de vue de la Biosphère, toute mort consentie n’est-elle pas une délivrance partielle sur une planète ravagée par le poids des humains ? Quand le fait de se donner la mort paraît la seule issue possible, pourquoi ne pas l’accepter. En toute liberté…
OUI à l’aide au suicide, mais NON à l’euthanasie !
Au sujet de la différence entre l’euthanasie et l’aide au suicide, il faut distinguer entre les arguments juridiques, éthiques et religieux. On ne peut pas simplement affirmer sans nuance qu’il n’existe pas de différence entre les deux : dans un cas c’est le patient lui-même qui s’enlève la vie (aide au suicide) alors que dans l’autre c’est le médecin qui la retire. Il faut d’abord préciser sur quel terrain (juridique, éthique ou religieux) on tire notre argumentation. Si l’on se situe sur le terrain de l’éthique, on peut raisonnablement soutenir qu’il n’existe pas de différence. Cependant, si l’on se situe sur le terrain juridique, il existe toute une différence entre l’euthanasie (qualifié de meurtre au premier degré dont la peine minimale est l’emprisonnement à perpétuité) et l’aide au suicide (qui ne constitue pas un meurtre, ni un homicide et dont la peine maximale est de 14 ans d’emprisonnement). Dans le cas de l’aide au suicide, la cause de la mort est le suicide du patient et l’aide au suicide constitue d’une certaine manière une forme de complicité. Mais comme la tentative de suicide a été décriminalisée au Canada en 1972 (et en 1810 en France), cette complicité ne fait aucun sens, car il ne peut exister qu’une complicité que s’il existe une infraction principale. Or le suicide (ou tentative de suicide) n’est plus une infraction depuis 1972. Donc il ne peut logiquement y avoir de complicité au suicide. Cette infraction de l’aide au suicide est donc un non-sens.
En revanche, l’euthanasie volontaire est présentement considérée comme un meurtre au premier degré. Le médecin tue son patient (à sa demande) par compassion afin de soulager ses douleurs et souffrances. Il y a ici une transgression à l’un des principes éthiques et juridiques des plus fondamentaux à savoir l’interdiction de tuer ou de porter atteinte à la vie d’autrui. Nos sociétés démocratiques reposent sur le principe que nul ne peut retirer la vie à autrui. Le contrat social « a pour fin la conservation des contractants » et la protection de la vie a toujours fondé le tissu social. On a d’ailleurs aboli la peine de mort en 1976 (et en 1981 en France) ! Si l’euthanasie volontaire (à la demande du patient souffrant) peut, dans certaines circonstances, se justifier éthiquement, on ne peut, par raccourcit de l’esprit, conclure que l’euthanasie doit être légalisée ou décriminalisée. La légalisation ou la décriminalisation d’un acte exige la prise en compte des conséquences sociales que cette légalisation ou cette décriminalisation peut engendrer. Les indéniables risques d’abus (surtout pour les personnes faibles et vulnérables qui ne sont pas en mesure d’exprimer leur volonté) et les risques d’érosion de l’ethos social par la reconnaissance de cette pratique sont des facteurs qui doivent être pris en compte. Les risques de pente glissante de l’euthanasie volontaire (à la demande du patient apte) à l’euthanasie non volontaire (sans le consentement du patient inapte) ou involontaire (sans égard ou à l’encontre du consentement du patient apte) sont bien réels comme le confirme la Commission de réforme du droit au Canada qui affirme :
« Il existe, tout d’abord, un danger réel que la procédure mise au
point pour permettre de tuer ceux qui se sentent un fardeau pour
eux-mêmes, ne soit détournée progressivement de son but premier,
et ne serve aussi éventuellement à éliminer ceux qui sont un
fardeau pour les autres ou pour la société. C’est là l’argument dit du
doigt dans l’engrenage qui, pour être connu, n’en est pas moins
réel. Il existe aussi le danger que, dans bien des cas, le
consentement à l’euthanasie ne soit pas vraiment un acte
parfaitement libre et volontaire »
Eric Folot
L’enquête pour « provocation au suicide » sur la mort de Chantal Sébire est définitivement close le 23 mars 2009, soit quasiment un an jour pour jour après son décès. Cela prouve l’acharnement judiciaire, ou la lenteur de nos institutions !
Si le Pentobarbital utilisé par Chantal n’était pas interdit en France, non seulement elle aurait pu mourir dans la dignité plus facilement, mais les frais judiciaires auraient été éliminés…
Le suicide assisté
On parle assez souvent dernièrement de créer un projet de loi pour permettre aux gens très malades de pouvoir décider de mourir en paix au moyen d’un suicide assisté. La véritable question n’est pas de savoir si c’est bien ou mal, correct ou pas correct l’euthanasie, mais bien de comprendre et non de raisonner, que l’amour n’est pas de dicter quoi faire ou non aux gens mais de permettre à soi-même de choisir librement. Dans notre débat nous allons vous démontrer notre point de vue sur ce sujet
, la souffrance de mourir peut devenir encore plus insupportable que la douleur de la maladie
Premièrement, bien des gens trouvent pas bien de se tuer volontairement et librement, et ces mêmes gens trouvent ça bien de tuer des gens sans leurs consentement quand ils ont des raisons pour le faire comme la guerre, la chaise électrique, au mon de la religion, et le plus ironique quand on laisse des entreprises d’alcool, de tabac, de nourriture, de pollution d’air, etc. nous tuer à petit feu
Deuxièmement, pour les gens qui sont favorables au suicide assisté, même si la vie est importante, ce qui prime d’abord et avant tout, c’est l’autonomie des personnes. Le pouvoir de prendre ses propres décisions et de choisir sa destinée, jusqu’au bout. Chaque personne devrait donc prendre ses décisions concernant sa propre mort, en accord avec ses valeurs et ses croyances, sans se les faire imposer par d’autres. Pour eux, c’est une question de liberté et d’égalité face
à la mort.
De plus, étant donné que se suicider n’est plus un crime, et qu’en plus, on peut refuser ou faire cesser ses traitements, certains estiment qu’on devrait aussi, en toute logique, reconnaître aux gens le droit d’être aidés pour mourir. Pour eux, cela ne fait pas une grande différence, si, au bout du compte, le résultat est le décès …
Et si on m’annonçait que je suis atteinte d’une maladie incurable et que la mort frappera à ma porte bientôt? Le diagnostic est formel… il n’y a pas de guérison possible. Si telle était ma situation, est-ce que je réclamerais qu’on m’aide à mourir? Un sondage réalisé en octobre 2004 auprès de 1000 Québécoises et Québécois révélaient que 68% des répondants demanderaient effectivement qu’on les aide à mourir s’ils étaient atteints d’une maladie incurable; Mourir dignement… on considère l’être humain comme maître de sa vie. Par conséquent, celui-ci peut décider de mettre fin à sa vie lorsque celle-ci a perdu beaucoup de qualité.
Enfin, le parlement français a voté en 1987 un texte spécifique réprimant la « provocation au suicide » et « la propagande ou la publicité en faveur de produits, d’objets ou de méthodes préconisées comme moyen de se donner la mort ». Il s’agissait en fait d’interdire le livre « Suicide, mode d’emploi. Mais comme aucune loi ne peut empêcher de se donner la mort, pourquoi la société ne donnerait-elle pas à l’individu les moyens de sa liberté ? Où placer une dignité humaine indéfinissable ? Une maladie incurable ne peut-t-elle donner le droit au suicide assisté ? Enfin, si on se place au point de vue de la Biosphère, toute mort consentie n’est-elle pas une délivrance partielle sur une planète ravagée par le poids des humains ? Quand le fait de se donner la mort paraît la seule issue possible, pourquoi ne pas l’accepter. En toute liberté…
L’autopsie du corps de Chantal Sébire pratiquée pour « recherche des causes de la mort » paraît inappropriée. Si Mme Sébire s’était jetée dans le canal tout proche de son appartement, il n’y aurait pas eu d’enquête (LeMonde du 22.03.2008).
La société a refusé à Chantal son assistance pour l’aider à mourir, mais elle n’hésite pas à engager des frais pour fouiller un cadavre. La société ne respecte pas le choix librement exprimé de mourir, elle ne le respecte pas non plus après le décès.
Le romancier flamand Hugo Claus a choisi de mourir par euthanasie alors qu’il n’était qu’au premier stade de la maladie d’Alzheimer (LeMonde du 21.03.2008). Il a déterminé le moment de sa mort, la Belgique ayant légalisé le droit à mourir. Mais il ne souffrait pas, il était loin du terme ultime de sa maladie, il était encore en pleine possession de ses moyens.
Encore une fois la question fondamentale se pose : à partir de quel moment un individu peut-il disposer librement de sa vie avec l’aide de l’Etat (une potion létale qu’on pourrait trouver en pharmacie) ?