Sivens, nouvelle ère écologique ? LE MONDE ouvre le débat. D’un côté il y a tous ceux qui estiment que Rémi Fraisse est victime d’une guerre de civilisation (Edgar Morin), qu’il ne faut pas amalgamer les casseurs et les écologistes (Hubert Reeves), que la planète n’est pas qu’un vulgaire gisement de ressources (Pierre Rabhi), que les projets inutiles cristallisent les luttes post-croissance (Luc Semal)… De l’autre côté il y a, isolé, celui qui n’a toujours rien compris, Pascal Bruckner, pour qui « La tyrannie des idéologues verts s’oppose à la légitimité démocratique ». Pascal Bruckner, une incompétence notoire qui souffre de dissonance cognitive. Mais laissons la parole aux commentateurs de son pensum sur le monde.fr :
jicehef13 : Lamentable. Mais pas surprenant venant de celui qui a commis « Le Fanatisme de l’apocalypse« .
Christophe Bureau : Ce qui est imbécile chez Pascal Bruckner c’est l’amalgame entre les combats qui ont une véritable légitimité écologique et les autres. Cela témoigne de l’inculture scientifique totale de l’auteur. Un exemple, la totalité des indicateurs montre que l’érosion de la biodiversité s’est accélérée que l’on est à un stade dramatique d’irréversibilité. Sur ce plan il est urgent de prendre des décisions radicales. Assimiler cela à du fanatisme montre que ce monsieur n’a pas lu un seul rapport de l’EEA ni du MNHN.
Gaffophone : Sivens, c’est un dossier entaché de conflits d’intérêts, multiples casquettes des élus à la fois commanditaires et financeurs, contournements de la loi, aucun appel d’offres, une même société d’économie mixte qui fait l’étude et réalise le barrage, non respect de l’arrêté préfectoral d’autorisation du projet dans la surface de zone humide à conserver lors des travaux… décidément Pascal Bruckner a une conception très particulière de la légitimité et de la démocratie…
Dario Ciprut : Bruckner et son ami ou ex-ami Finkielkraut, c’est toujours la même antienne. La démocratie parlementaire à délégation périodique, la dictature soft de l’économie pour les favorisés de l’emploi et de la retraite, hard pour tout le reste, le règne impavide des lobbies marchands sur l’opinion, est le nec plus ultra de la démocratie et rend toute critique extérieure caduque et complice des djihadistes. Affligeant.
Louis A : Bruckner vient d’inventer le droit à massacrer l’écosystème. Une drôle de conception de la démocratie. Ce qui colle bien à son image de libertarien. Rien, ni même la liberté des autres à vivre dans un environnement plus sain, ne doit entraver sa liberté à faire tout et n’importe quoi. Et avec un culot monstre quand il affirme que l’écologie avance sans preuve. Il y a des baffes avec les rapports du GIEC qui se perdent. Toujours « marrant » quand un petit bourgeois parisien se pose en défenseur des « redneck » franchouillards. C’est 400 millions d’oiseaux qui ont disparu en 30 ans sur le continent européen ? Encore un complot des Khmers verts sans doute.
M@m : Bruckner qui se préoccupe des paysans maintenant ? On aura tout lu ! Depuis « Paria » il s’est surtout distingué par des prises de positions réactionnaires et libertaires (riennes?) en matière de sexualité, de colonialisme, etc. Dommage, lorsqu’il ne se mêle ni de philosophie ni de politique, il peut être intéressant. Cette prise de position est affligeante !
Daniel Heguy : Je l’ai écouté l’autre soir sur FR3 dans l’émission de Frédéric Taddéi, beaucoup d’approximations et de contre-vérités. Heureusement il y avait en face Corinne Lepage et Christian de Perthuis, personnes plus qualifiées pour parler environnement qu’un écrivain obscur, en mal de publicité. Il me fait penser à Claude Allègre, l’ancien ministre. Sa position est une posture.
Damien : Peut-être aurait-on fait l’économie des scandales de l’amiante et du tabac si on écoutait de temps à autre ces quelques « zozos » stigmatisés par M. Bruckner. L’Histoire a montré à maintes reprises quels désastres « les milieux autorisés » savent réserver aux petites gens. Mais sans doute devons-nous accepter sans réagir d’être gouvernés par les vrais réactionnaires de l’acabit de M. Bruckner et de ses amis.
Christian Cépété de Far : Pascal Bruckner ne connaît pas la France profonde où les élus ne sont que les défenseurs de leurs intérêts. Il ne connaît pas cette France profonde qui tue impunément les espèces protégés, où seuls les « riches » qui peuvent payer les frais de justice arrivent à faire reconnaître leurs droits. Cette France où les petits mafieux locaux bafouent les codes (civil, rural, travail) et limitent leur sens de la communauté à l’arbre de noël des enfants et au repas des vieux.
Rogerthornill : Hallucinant! Certes Bruckner est un penseur de supermarché mais là on assiste à un véritable naufrage intellectuel. Sous prétexte de dénoncer des dérives extrémistes, son discours consiste à légitimer sans condition toute la modernité dans sa dimension industrielle, y compris la plus destructrice, sous prétexte que c’est la marche du progrès. Ce pseudo-modernisme s’apparente à un véritable nihilisme…
Alain Bourgoin : Il est toujours affligeant de voir un dit « philosophe » se ranger du côté du manche.
* LE MONDE du 5 novembre 2014, La tyrannie des idéologues verts s’oppose à la légitimité démocratique
Résumé d’un article* du journaliste Nicolas Truong qui fait le point sur la montée en dissidence par rapport à la société de croissance :
« Il aura fallu la mort de Rémi Fraisse pour que l’opinion prenne conscience de la radicalité écologique. Le sociologue Edgar Morin dénonce le « silence officiel embarrassé » de l’Etat pour ce « martyr » d’une « guerre de civilisation » qui oppose écologistes et productivistes. La polarisation sur les militants encagoulés a minoré l’arborescence des utopies environnementales. Car c’est toute une contre-société qui s’organise, des cabanes improvisées aux centres de recherche institutionnels, des fermes autogérées aux revues décroissantes à la radicalité savante, des gourous verts aux anonymes activistes. Les « transitionneurs » multiplient et pollinisent les expériences écologiques alternatives, de l’écovillage à la ferme pédagogique, de la monnaie locale à la permaculture. Les « anarchistes néo-luddites » s’attaquent à l’emprise de la machine et de la technoscience, à l’image des luddites du XIXe siècle qui brisaient les métiers à tisser mécanisés. Impossible de cartographier tous ces courants à la fois hétérogènes et poreux, qui vont d’une partie d’Europe Ecologie-Les Verts aux post-situationnistes, du pacifisme consensuel à la guérilla insurrectionnelle. Même si une indéniable résistance à l’idéologie de la « croissance » réunit ces opposants aux « grands projets inutiles et imposés », comme disent les militants.
Les décroissants comportent plusieurs courants, dont un « catastrophiste » qui insiste sur le fait que, contrairement aux années 1970, au moment où le rapport Meadows suggérait de rompre avec la mystique de la croissance, il reste peu de temps pour éviter la dévastation planétaire ».
* LE MONDE du 5 novembre 2014, La résistance des renoncules