4 décembre 2021, Pierre Rabhi, figure de l’écologie, est mort
Ses propos recueillis par Catherine Vincent en 2018 :
Je ne serai pas arrivé là si je n’avais pas perdu ma mère à l’âge de 4 ans. Mon père, forgeron, s’est retrouvé seul dans une oasis au milieu du désert algérien. Mon père se dit : « Le futur est entre les mains des Européens ; si mon fils n’a pas les secrets de cette nouvelle civilisation, il ne réussira pas dans la vie. » Il se trouve qu’il y avait un couple de Français sans enfant dans mon village, qui ont proposé de me prendre en charge et de m’instruire. C’est comme ça que je suis passé, sans transition, d’une organisation sociale séculaire à la modernité. Je vivais par alternance chez mes parents adoptifs et dans ma famille d’origine, J’allais à l’école française, mais mon père exigeait que je passe aussi à l’école coranique… Quand j’étais dans l’islam, j’étais pour mes parents adoptifs chez des gens non évolués, mais quand j’étais chez les Européens, j’avais l’impression d’être chez les mécréants. Je n’aimais pas l’école. On m’y apprenait des tas de trucs qui me paraissaient sans intérêt, des dates de bataille… Mais on ne répondait pas à mes vraies questions, au grand point d’interrogation qu’était la vie, avec ses religions, ses cultures contradictoires. C’est en lisant les philosophes que j’ai trouvé des réponses. Et je découvre dans les Évangiles ce type appelé Jésus, qui répète en permanence que seul l’amour peut sauver l’humanité… et je choisis le prénom de Pierre car, de tous les apôtres, c’est celui qui m’inspire le plus.
A Paris, je ne supporte pas l’espace reclus de la ville et je rencontre Michèle, qui deviendra ma femme, qui veut aussi partir vers la nature. Nous sommes au début des « trente glorieuses », et voilà que nous décidons de devenir paysans et d’aller retourner la terre caillouteuse de l’Ardèche… Nous avons acheté la ferme de Montchamp en 1963… J’ai lu Fécondité de la terre, d’Ehrenfried Pfeiffer, et je m’aperçois qu’on peut parfaitement faire autrement en adoptant l’agriculture biodynamique. Dans cette ferme, il n’y avait pratiquement pas d’eau, pas d’électricité, pas de chemin carrossable et un sol rocailleux… J’ai passé des nuits blanches à me demander comment j’allais nourrir nos cinq enfants. Je me suis engagé dans la promotion de l’agroécologie, cette agriculture du pauvre qui affranchit le paysan de la culture d’exportation menée à coups d’engrais et de pesticides, et qui répond à ses besoins parce que c’est une agriculture élaborée, accessible à tous sans bourse délier et régénératrice des sols.
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J’ai commencé à donner mes premiers stages d’initiation à cette méthodologie. En Ardèche d’abord, puis, à partir du début des années 1980, au Burkina Faso où je me rendais régulièrement. Le président Thomas Sankara voulait me charger de l’agriculture du pays, mais il a été assassiné en 1987. Et tout s’est arrêté.
Je crois que quelque chose me différencie des autres : l’écologie, je ne fais pas qu’en parler, je l’applique. Des livres sur l’écologie, les bibliothèques en sont pleines ! Les gens me perçoivent comme un type qui fait ce qu’il dit et qui dit ce qu’il fait. Si nous voulons, nous pouvons changer le monde. Mais dans une société où les consciences sont au degré zéro de l’évolution écologique, avec des intérêts énormes en jeu, comment voulez-vous faire ?
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La solution ne passe pas par le politique, elle passe par l’élévation de la conscience. Le jour où le politique dira : il faut une grande part d’écologie dans l’enseignement, avec un jardin pour que les enfants apprennent ce que c’est que la vie, avec un atelier manuel et non pas des écrans, cela commencera peut-être à aller mieux. J’ai vu des gens sortir de grandes écoles ultradiplômés : ils ne savent même pas comment pousse un poireau !
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mesdames et messieurs bonjour. en parlant d’écologie, soyons honnetes et disons ce qui est vrai !!! exemple: une femme consommes en moyenne 5 grammes de produits de beauté par jour, sachant que ces produits sont à base de toxicité. en se démaquillant elle le verse dans un lavabo pour aller dans la nature en général. vous avez tous compris, c’est pour faire vite. question: toutes les femmes de la planete le font au quotidien, avec quelques hommes, en plus des lessives. faites le total du poids de toxicité qui est déversé au quotidien et faites la conclusion de ce qu’est l’écologie actuelle. dites au moins une fois dans ce bas monde, la vérité que tout le monde essaie de cacher ou ignorer. les sous sols sont pollués !!! en plus de l’atmosphère. !!! de quelle écologie parlez vous !!!
Toutes les femmes de la planète ne balancent pas tous les jours 5 grammes de produits de beauté dans le lavabo, encore faudrait-il qu’elles aient toutes un lavabo. Regardez quels sont les pays où l’on dépense le plus en produits de beauté. Tout le monde sait que les sous-sols sont pollués, il y a quelques jours (4 décembre 2021) nous parlions ici d’agriculture. La vérité, c’est que TOUT est pollué ! Même et surtout nos cerveaux.
Pierre Rabhi raconté par ceux qui le connaissent, c’est bien aussi.
Rabhi ne faisait pas l’unanimité, on le sait, quand on est connu c’est comme ça.
Certains le voyaient comme un modèle, voire comme un dieu, d’autres comme un gourou, un escroc, un imposteur etc.
Août 2018 le Monde Diplomatique publiait un article intitulé : “Le système Pierre Rabhi“.
Cet article raconte que Rabhi aime l’argent, qu’il entretient des liens avec des gens douteux, que les Colibris sont une bande de farfelus etc. etc.
D’un côté on a donc eux ceux qui jubilaient… et de l’autre ceux qui auraient bien aimé balancer quelques tomates à ce jeune journaleux (spécialiste de la tomate) auteur de l’article. Il y a donc eu des réactions, notamment du côté de ceux qui connaissaient l’accusé, ainsi que ce fameux «Système Rabhi».
– “ Pierre Rabhi, aimé ou détesté, en tout cas contesté. “
( Publié le 8 octobre 2018 sur Le Club de Mediapart )
Une analyse de Yohan Reversat, un démontage en bonne et due forme (très bien argumenté etc.) de toutes les accusations contre Pierre Rabhi portées ici par Jean Baptiste Mallet, l’auteur de l’article en question.
– « Je crois que quelque chose me différencie des autres : l’écologie, je ne fais pas qu’en parler, je l’applique. Des livres sur l’écologie, les bibliothèques en sont pleines ! Les gens me perçoivent comme un type qui fait ce qu’il dit et qui dit ce qu’il fait. » (Pierre Rabhi)
Je le crois moi aussi. Non seulement il faisait ce qu’il disait, mais en plus cet homme était pas loin d’être un sage. En tous cas c’est comme ça que je l’ai toujours vu. Tout ce qu’on peut lui reprocher ne pèse vraiment pas lourd à côté de ce qu’il aura été. Oui, un grand homme.