Le rapport au club de Rome de 1972 était clair : « Notre modèle d’analyse des systèmes traite cinq tendances fondamentales : l’industrialisation, la population, l’alimentation, les ressources naturelles non renouvelables et la pollution. Les interactions sont permanentes. Ainsi la population plafonne si la nourriture manque, la croissance des investissements implique l’utilisation de ressources naturelles, l’utilisation de ces ressources engendre des déchets polluants et la pollution interfère à la fois avec l’expansion démographique et la production alimentaire. La validité de notre modèle réside dans le fait que, quelles que soient les conditions initiales, il y a toujours un point sur le graphique où l’expansion s’arrête et où l’effondrement commence. Partout dans le réseau des interactions existent des délais sur lesquels les techniques les plus élaborées n’ont aucun effet.
Les conséquences d’une politique de régulation des naissances ne pourront devenir sensibles qu’avec un retard de l’ordre de 15 à 20 ans. Le cycle de la pollution est très long, pour certains cancérigènes il peut atteindre 20 ans. Le transfert des investissements d’un secteur à l’autre n’est pas une opération instantanée. Dans les systèmes à croissance rapide ou exponentielle, les changements d’orientation doivent intervenir tellement vite que les impacts des changements précédents n’ont pas encore pu être déterminés.«
Aujourd’hui pourtant, bien que la population mondiale ait dépassé 8 milliards de Terriens, peu de monde accepte l’idée d’une surpopulation, une des cinq variables en interaction. Exemple de commentaires croisés sur lemonde.fr à un article sur le « basculement » (lire notre article précédent).
Démographie Responsable : Parmi les solutions possibles, l’arrêt de l’explosion démographique et la décroissance de la population mondiale ne sont toujours pas envisagés par nos doctes scientifiques. Dès lors, comment leur accorder crédit ?
Lee Pampeast : La prétendue explosion démographique, c’est au pire de l’avenir. Les problèmes sont actuels, et la cause en est la consommation actuelle en Occident, et aucunement la démographie (des autres…) au siècle prochain. Nous sommes les seuls responsables, et pas les enfants à naître, qui seront victimes, s’ils naissent un jour.
Tanith : Le problème c’est moins le nombre de sapiens sur terre que la manière dont ils consomment. Déjà, arrêter de changer de voiture tous les 3 ans, de téléphone et d’ordi tous les ans, de chauffer à 22°c des baraques mal isolées, de prendre la voiture pour faire 500m, d’acheter des trucs hyper-emballés, de manger de la viande gavée de mais à tous les repas,… D’arrêter de produire plus que la terre peut nous donner, ça serait pas mal. Un américain consomme plus et produit plus de CO² que 50 africains ( et encore je trouve plus l’article qui compare ça).
Suzette @Tanith Vous dites la même chose : 1 personne avec un niveau de vie confortable consomme autant que 50 personnes pauvres. Alors à un moment, il faut choisir entre qualité et quantité. Vous avez testé ce que ça serait de vivre avec votre « quota carbone »? Regardez ce qu’on peut faire aujourd’hui en divisant les émissions acceptables pour la planète par 8 milliard d’habitant, et puis essayez si on devait partager seulement entre 4 milliard d’habitants. Ou juste 1 milliard. Et comparez la qualité de vie des habitants… C’est vrai qu’il y a des gains d’efficacité possible pour consommer autant en polluant moins, mais ça reste marginal. Aussi, un ajustement démographique programmé et volontaire vaut bien plus qu’un ajustement contraint et violent.
Silgar : Et la démographie, on en parle ? Qui de sensé pourrait imaginer que passer de deux milliards d’humains dans les années 1930 à huit milliards aujourd’hui et peut-être 10 ou 11 milliards vers 2050 se ferait sans détruire l’environnement, les écosystèmes, la biodiversité et le climat ? Notre démographie impacte directement la biodiversité, la disponibilité des ressources en eau, la capacité à nourrir une population croissante dans un contexte de réduction des rendements agricoles, la production de déchets de toutes sortes, l’extension des villes et des zones urbaines, la déforestation, etc.. Pour quiconque s’intéresse un minimum aux problématiques environnementales, il est impossible de les dissocier de la démographie humaine. Alors on nous parle de moins consommer et d’un monde durable pour créer l’illusion que la démographie n’est pas le sujet. Mais le monde durable qui a existé avant la révolution industrielle n’a jamais permis d’avoir plus d’un milliard d’humains vivants sur Terre.
Jean.ne Monde : Tout le monde s’intéresse à la démographie, c’est juste que c’est le moins bon de tous les leviers : l’inertie est de plus 50 ans, et elle a tendance à baisser sans politiques publiques spécifiques quand le niveau de vie augmente. Pour agir plus directement, on connaît les recettes : contraception, éducation et socialisation professionnelle des jeunes filles, puis les politiques natalistes ou anti natalistes pour les pays où un état fort existe, ce qui n’est pas le cas des quelques pays où la démographie est encore dynamique. Et on ne va pas tuer les 8 milliards de personnes qui sont déjà nées. C’est pour ces raisons qu’on parle beaucoup de sortie des énergies fossiles et qu’on parle peu de démographie, d’autant que les pays qui ont une démographie dynamique ont souvent une empreinte environnementale par habitant faible – et inversement.
Silgar @Jean.ne Monde : Je crois au contraire que c’est le seul levier dont nous disposions réellement. D’abord notre démographie actuelle est le sous-produit de la révolution verte, laquelle est exclusivement assise sur la mécanisation agricole et sur la disponibilité d’engrais et d’intrants issus directement du pétrole et du gaz. Avant la révolution industrielle nous étions moins d’un milliard, avant la révolution verte nous étions moins de 2,5 milliards : La sortie des énergies fossiles nous ramènera à ces étiages. Ensuite, si l’augmentation du niveau de vie a pour corollaire une baisse de la démographie, il ne s’agit en aucun cas d’un levier d’action puisque, comme le précise Brutus, l’augmentation du niveau de vie est directement associée à une augmentation des émissions de CO2 et d’une manière générale des impacts environnementaux (cf. équation de Kaya I = PAT). Enfin, l’inertie du facteur démographique est à mettre en relation avec l’accélération de l’aggravation des autres leviers.
Acaila : On parle bien souvent du problème de démographie, mais on décide aussi d’ignorer les soucis qu’un changement pourrait engendrer. Je vous rappelle par exemple que notre système de retraite est intégralement bâti sur une majorité de travailleurs qui cotisent pour une minorité de retraités. Inverser la courbe démographique, ça veut dire accepter d’augmenter largement les cotisations des travailleurs, ou le nombre d’années travaillées, simplement pour pouvoir maintenir le système à l’équilibre. Sinon on se retrouve avec le système de retraite de la SNCF à l’échelle nationale, avec beaucoup trop de retraités pour trop peu travailleurs et un déficit abyssal. Parmi ceux qui sont pour la diminution démographique (probablement nécessaire effectivement), combien sont prêt une nouvelle fois à faire les efforts associés…
Silgar @Acaila : Sortir des énergies fossiles impliquera nécessairement de travailler beaucoup plus pour une production moindre. Les énergies fossiles permettent à des milliards de machines de fonctionner en démultipliant les capacités humaines. Et ce sont ces machines qui font l’essentiel de notre production, de nos créations de valeur ajoutée et donc de nos revenus (et temps libres), impôts et cotisations sociales. Aussi, sortir des énergies fossiles implique de facto la disparition de la retraite telle que nous la connaissons et de la plupart des services publics et protections sociales qui seront impossible à financer. Mais le point le plus important est que sortir des énergies fossiles impliquera aussi une réduction démographique forte puisque notre modèle agricole repose exclusivement sur le fossile. L’un ne va pas sans l’autre, la croissance démographique et la consommation de ressources fossiles sont deux courbes qui se suivent et s’auto-entretiennent… jusqu’au point de rupture.
Brutus : Le taux de natalité est inversement proportionnel au niveau de vie, qui est lui directement corrélé au niveau de CO². Pas évident.
Fitzcarraldo : il n’y a même pas besoin de débattre. Il y a 8 milliards d’habitants sur cette planète qui produisent ET consomment trop. Le bon sens impose deux options :
1. Si on veut préserver le même train de vie, il faut en exterminer au moins 6 milliards.
2. On se décide à réduire notre train de vie, produire et consommer moins, ce qui veut dire aussi travailler beaucoup moins et partager beaucoup plus.
Si on ne fait rien, c’est de toutes façons l’option 1 qui nous attend, car quand il n’y a plus rien à bouffer, l’eau potable est un luxe, l’air est irrespirable, l’espérance de vie se réduit drastiquement. C’est ça le réalisme fitzien…
Jean-Claude Herrenschmidt : On va commencer par supprimer les allocations familiales chez nous. Avec la généralisation des contraceptifs gratuits. À lire au premier degré, SVP.
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