Surpopulation, l’Égypte est mal partie

J’ai voyagé en Égypte il y a bien plus de 20 ans, une époque où ma sensibilité écolo commençait juste à se faire ressentir. De l’avion on s’aperçoit en arrivant que ce pays est un désert où seule une mince frange autour du Nil est verdoyante. On est hébergé dans des hôtels luxueux alors que tout autour règne la misère et la mendicité. Le bateau qui nous amène le long du fleuve est un vrai palace flottant. Nous suivons le rail des touristes où une masse d’occidentalisés s’agglutine. Des ânes traînent leur charrette pour rentrer au Caire par l’autoroute. Notre car rutilant passe au milieu des autobus délabrés qui amènent la foule. Partout la police du tourisme, pour protéger la rentrée de devises. J’ai alors pris conscience non seulement du fossé entre le niveau de vie français et égyptiens, mais aussi de l’impasse dans laquelle était entrée ce pays. Je n’irai plus en Égypte. D’ailleurs il ne faut plus que je prenne l’avion, j’ai épuisé mon quota.

Je pense à mon voyage passé en lisant l’article du MONDE (22 août 2022) sur la vie au Caire aujourd’hui, au temps des canicules. Statistiques à l’appui, on peut décompter les morts évités grâce à la climatisation. Mais seulement moins de 20 % des urbains au Caire possède un tel moyen. Les inégalités font leur tri entre ceux qui peuvent vivre et ceux qui survivent de plus en plus difficilement. La faute à qui, à quoi ? On peut pourfendre le prix de l’énergie, les inégalités et les rapports de domination, la dictature et ses dépenses somptuaires, la baisse des subventions et l’inflation… mais la cause profonde repose sur les mécanismes démographiques.

Les estimations de la population égyptienne en 1810 s´étagent de 2 à 4 millions d´habitants, le pays compte 21 millions d’habitants en 1950, 85 millions en 2011 et dépasse aujourd’hui 105 millions. Presque un million d’Égyptiens en plus tous les 6 mois. Certes le taux de fécondité a baissé mais la proportion de jeunes ne permet pas de prévoir un ralentissement. Plus de 60 % des Égyptiens ont moins de 30 ans. On prévoit une population de 160 millions en 2050. Cette croissance exponentielle de la population intervient de surcroît sur une étroite bande de terre fertile, limitée à la vallée du Nil et à son delta. Elle représente moins de 5 % de la superficie d’un pays. Ramené à la « superficie agricole utile », la densité de peuplement égyptienne approche 2 000 habitants au kilomètre carré, soit un carré de 100 mètres de côté pour 20 personnes. C’est invivable, c’est ingérable. On construisait même des logements dans les champs cultivés ! Ne pouvant produire suffisamment, l´Égypte ne connaît pas l’autonomie alimentaire, elle subit de plein fouet toute élévation des cours mondiaux ainsi que la baisse prévisible des ressources touristiques. Le marché du travail ne peut faire face à la pression du nombre. Le taux de chômage des jeunes de 15 à 24 ans est actuellement de 17 %, mais il a pu monter précédemment à 34 %. Le budget de l’éducation est loin d’être une priorité face aux dépenses militaires démesurées et aux 45 milliards de dollars alloués au chantier pharaonique d’une nouvelle capitale voulue par son dirigeant.

Ce n’est que récemment que le président al-Sissi a pris conscience de la menace que représente la bombe démographique pour la stabilité de l’Égypte, menace désormais placée sur le même plan que le défi terroriste. Les campagnes de contrôle des naissances, lancées avec l’aval des imams d’État, peinent à produire des résultats tangibles. La campagne « Deux, c’est assez », lancée en 2018 par les autorités, vise des familles bénéficiaires de programmes sociaux. Les allocations familiales ne sont désormais plus accordées au-delà du deuxième enfant. Effet contre-productif, les 10 millions d’Égyptiens les plus pauvres, délaissés par l’aide publique, continuent de miser sur une nombreuse progéniture pour assurer leur quotidien. De plus, étant donné l’inertie démographique, on ne peut attendre de résultat tangible avant plusieurs décennies.

L’Égypte est un désastre vivant qui achète des Rafale à crédit (30 appareils français de plus pour un montant de 3,95 milliards d’euros) et multiplie les pauvres en conséquence. Il n’y a pas de solution dans l’immédiat, dictature et extrémismes ne font que repousser les échéances : guerre et/ou famine. C’était le diagnostic posé par Malthus dès 1798 dans son Essai sur le principe de population : « Les obstacles à la population qui maintiennent le nombre des individus au niveau de leurs moyens de subsistance, peuvent être rangés sous deux chefs. Les uns agissent en prévenant l’accroissement de la population, et les autres en la détruisant. La somme des premiers compose ce qu’on peut appeler l’obstacle privatif ; celle des seconds, l’obstacle destructif. L’obstacle privatif, en tant qu’il est volontaire, est propre à l’espèce humaine et résulte d’une faculté qui le distingue des animaux ; à savoir, de la capacité de prévoir et d’apprécier des conséquences éloignées. Les obstacles qui s’opposent à l’accroissement indéfini des plantes et des animaux privés de raison sont tous d’une nature destructive. » (Malthus, Essai sur le principe de population – Flammarion 1992, tome 1, page 75 à 84)

Que faire ? Prendre conscience médiatiquement du poids du nombre. Malheureusement ce n’est pas le cas. Le Fonds des Nations Unies pour la population a même récemment réalisé un dossier à charge, « Le problème des discours sur la « surpopulation » (https://www.unfpa.org/fr/swp2023/too-many). L’idée générale, c’est que ces discours sont réellement néfastes : « Ils présentent la survie de l’humanité comme un problème plutôt qu’une réussite… Ils détournent l’attention des vrais enjeux urgents… Ils laissent entendre qu’il faudrait neutraliser la liberté de choix des femmes en matière de procréation. » Un point de vue engagé qui mérite d’être discuté !

(texte que nous a fait parvenir Michel Sourrouille)

En savoir plus sur la surpopulation

Alerte surpopulation, le combat de Démographie Responsable (2022)

Surpopulation… Mythe ou réalité ? (2023)

Un panorama des pays surpeuplés,

Surpopulation généralisée dans tous les pays

Pour lutter contre la surpopulation,

https://www.demographie-responsable.fr/

6 réflexions sur “Surpopulation, l’Égypte est mal partie”

  1. Et ben l’anthropophagie sera la régulatrice démographique en Égypte, et les crocs-crocs prendront la forme de kebabs et puis c’est tout ! ^^

  2. Du haut de ces pyramides 40 siècles et 3 millions…. non 105 millions d’égyptiens vous contemplent !
    Cette démographie galopante est la principale menace pour ce pays.

    Comment les Égyptiens pourraient-ils se nourrir si le canal de Suez, source de devises, se trouvait bloqué ou si, suite aux difficultés internationales, l’aide américaine se tarissait ? L’explosion démographique est de loin la première source de fragilité pour les peuples du monde.

    1. Admettons, et ce n’est pas difficile, que ce soit la principale menace. Rappelons que ça fait déjà longtemps que les dirigeants de nombreux pays, dont l’Egypte, l’ont compris. Ce n’est donc pas nouveau. Dans les années 1960 le taux de fécondité en Egypte avoisinait les 7 enfants par femme. Les politiques familiales l’on fait progressivement baisser pour arriver un peu en dessous de 3 vers 2008. Et ensuite ce taux est reparti à la hausse. Pourquoi ?
      Comment l’Iran, par exemple, a-t-il réussi en l’espace d’une trentaine d’années à passer de près de 7 enfants par femme à moins de 2 ? C’est de la politique, tout simplement. Après, bien sûr, ON pourra toujours dire que malgré ça l’Iran est toujours surpeuplé. Que c’est d’ailleurs pour ça que ça ne tourne toujours pas très rond non plus en Iran. ON n’en sort pas quoi.

      1. « Comment l’Iran, par exemple, a-t-il réussi en l’espace d’une trentaine d’années à passer de près de 7 enfants par femme à moins de 2 ?  »

        Ah bon c’est juste de la politique ? Donc si je suis ta logique, alors avec de la politique on pourrait baisser la natalité en Égypte et même en Afrique en dessous de 2 enfants par femme ?

  3. – « Presque un million d’Égyptiens en plus tous les 6 mois. Certes le taux de fécondité a baissé mais […] On prévoit une population de 160 millions en 2050. […] 2 000 habitants au kilomètre carré, soit un carré de 100 mètres de côté pour 20 personnes. C’est invivable, c’est ingérable [insupportable, intolérable, abominable et j’en passe !]
    Ce n’est que récemment que le président al-Sissi a pris conscience de la menace que représente la bombe démographique […] Les campagnes de contrôle des naissances, lancées avec l’aval des imams d’État, peinent à produire des résultats tangibles [plus vite chauffeur !]
    Que faire ? Prendre conscience médiatiquement du poids du nombre. Malheureusement ce n’est pas le cas [et patati et patata] »

    Voilà pour le résumé. La première partie c’est le constat, l’état des lieux. Retenons que l’Egypte est un logement trop petit pour une si grande famille. ( à suivre )

    1. (suite) La seconde est un hommage à Sissi et ses curés d’État. Eux au moins ont compris, et essaient de FAIRE. La Preuve, pour résoudre le problème du carré Sissi a trouvé une solution. Construire une nouvelle capitale en plein désert. Verte, durable et tout et tout. Trop fort ce Sissi !

      La troisième c’est la sempiternelle question : QUE FAIRE ????
      Autrement posée : Que m’est-il permis d’espérer ? En attendant…
      Question accompagnée comme elle se doit de l’éternelle ritournelle. La fumeuse prise de con science empêchée par le satané Tabou, ouh ouh !

      Est-ce que ce monde est sérieux ? Mais non pas du tout ! La Preuve, il n’y a pas de tabou.
      La Preuve, il n’y a pas que Biosphère qui en parle, du poids du Nombre.
      Ce soir 21H05 sur FRANCE 5 : C DANS L’AIR SPÉCIALE : Démographie : la bombe humaine.
      135 min. Programme adapté à tous publics.

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