stagnation séculaire, croissance zéro ou décroissance ?

Les pays industrialisés seraient entrés dans une phase de « stagnation séculaire ». Aux Etats-Unis, en Europe, au Japon, la croissance fléchit en effet d’année en année, 0,5 % aujourd’hui contre 5 à 6 % pendant les Trente Glorieuses (1947-1974). Selon un article du MONDE, ce ralentissement a des moteurs structurels, comme le vieillissement de la population, le sous-investissement chronique, la hausse des inégalités et l’épuisement du progrès technique. En somme, le monde industrialisé serait donc condamné une croissance anémique. « Pas forcément ! », rétorquent les économistes détracteurs de la stagnation séculaire. « Qui est capable de prédire ce qu’auront changé, dans dix ans, la voiture autonome ou le génie génétique ?« *

C’est là le faux débat entre les religieux de la croissance bénite et les adorateurs du miraculeux progrès technique. Il est absolument renversant que les arguments utilisés par ces spécialistes ignorent absolument les contraintes bio-physiques de la planète. Comment passer sous silence l’absurdité des croissances exponentielles dans un monde fini ? Comment imaginer que des machines de plus en plus complexes et sophistiquées pourront survivre à la descente énergétique ? Comment croire encore à un taux de croissance positif dans l’avenir quand il suffisait à la belle époque de très peu de travail et de capital pour sucer les mamelles de notre mère la planète ? Comment oublier que le rapport du MIT de 1972 sur les limites de la croissance a toujours démontré sa validité grâce à ses différentes actualisations ?

Comme l’exprimait déjà Dominique Bourg dans les colonnes du MONDE , «la clé est l’EROI (Energy Return on Investment), TRE en français (taux de retour énergétique). Or, ce dernier ne cesse de chuter. Il suffisait autrefois d’investir un baril de pétrole pour en obtenir cent. Avec les sables bitumineux du Canada, en investissant un baril, on retire entre quatre et à peine plus d’un baril. Et si l’on ajoute à l’énergie nécessaire à l’extraction celle nécessaire à conduire le baril sur son lieu de consommation, en moyenne, l’énergie investie triple. Il en va de même pour les métaux. La clé est le coût énergétique de leur extraction. Lequel ne cesse de croître. Des ressources abondantes peuvent cacher des réserves limitées. Parier sur l’abondance des ressources et la croissance, sur une planète insidieusement finie, alors même que la décrue démographique n’aura pas même lieu durant le siècle, est aussi inepte que dangereux.»**

* LE MONDE économie du 21-22 février 2016, La grande division des économistes autour de la stagnation séculaire
** LE MONDE du 2 décembre 2014, Paradoxes du monde fini

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