BIOSPHERE-INFO, tout savoir sur l’Écologie profonde

Pour recevoir gratuitement par Internet le mensuel BIOSPHERE-INFO,

il suffit de s’inscrire à cette adresse : biosphere@ouvaton.org

numéro de juin 2017

Nous, qui sommes responsables de la crise des conditions de vie sur Terre, nous avons aussi la capacité intellectuelle de déterminer comment vivre dans un équilibre durable et dynamique avec les autres formes de vie. Pour nous éclairer, Arne Naess avec George Sessions avait formulé à la fin des années 1970 une offre de « plate-forme de l’écologie profonde » en huit points.

I) Plate-forme de l’écologie profonde en huit points

1/8) Le bien-être et l’épanouissement des formes de vie humaines et non-humaines sur Terre ont une valeur en elle-même (intrinsèque). Ces valeurs sont indépendantes de l’utilité du monde non-humain pour les besoins humains.

2/8) La richesse et la diversité des formes de vie ont une valeur en elles-mêmes et contribuent à l’épanouissement de la vie humaine et non humaine sur Terre.

3/8) Les humains n’ont pas le droit de réduire la richesse et la diversité biologique, sauf pour satisfaire des besoins vitaux.

4/8) L’épanouissement de la vie et des cultures humaines n’est compatible qu’avec une diminution substantielle de la population humaine. L’épanouissement des formes de vie non-humaine requiert une telle diminution.

5/8) L’interférence humaine actuelle avec le monde non humain est excessive et nuisible, et la situation s’aggrave rapidement.

6/8) Les politiques doivent donc changer. Ces changements politiques affecteront les structures économiques, techniques, et idéologiques de la société à un niveau fondamental. La société changera en profondeur et rendra possible une expérience plus joyeuse de l’interdépendance de toutes choses.

7/8) Les changements idéologiques passent par l’appréciation d’une bonne qualité de vie plutôt que l’adhésion à des standards de vie toujours plus élevés. Il y aura une profonde conscience de la différence entre quantité et qualité.

8/8) Ceux qui souscrivent aux points précédents s’engagent à essayer de mettre en application directement ou indirectement les changements nécessaires.

II) Commentaires de la plate-forme par Arne Naess

1/8) Le bien-être et l’épanouissement des formes de vie humaines et non-humaines sur Terre ont une valeur en elle-même (intrinsèque). Ces valeurs sont indépendantes de l’utilité du monde non-humain pour les besoins humains.

Le terme écosphère est préférable au terme de biosphère, pour bien insister sur le fait que nous ne prenons pas seulement en compte les formes de vie au sens étroit du terme. Nous n’utilisons pas le terme de « vie » au sens technique, et nous l’employons aussi pour désigner des éléments que les biologistes considèrent comme non vivants : les rivières, les paysages, les champs, les écosystèmes, la terre vivante. Des slogans tels que « laissez vivre la rivière » illustrent bien cet usage du mot « vie », si répandu dans différentes cultures. Il n’y a que dans nos écoles occidentales que le terme « vivant « est exclusivement associé à la science de la biologie.

2/8) La richesse et la diversité des formes de vie ont une valeur en elles-mêmes et contribuent à l’épanouissement de la vie humaine et non humaine sur Terre.

Les espèces de plantes et d’animaux prétendument simples, inférieures ou primitives contribuent de façon décisive à la richesse et à la diversité de la vie. Elles ont une valeur en elles-mêmes et ne sont pas simplement des étapes dans l’avènement de formes de vie prétendument supérieures et rationnelles. Complexité et complication sont deux choses différentes. La vie urbaine peut être plus compliquée que la vie d’un écosystème sans pour autant être plus complexe. Pourquoi parler de diversité et de richesse ? Supposez que les hommes interfèrent dans un écosystème à un degré tel que mille espèces de vertébrés en soient réduites à un état de survie. Ce serait à l’évidence une situation inacceptable. Nous exigeons une abondance d’habitats interconnectés par des « corridors » écologiques. Il faut comprendre que notre impact sur la vie sur Terre peut être excessif quand bien même nous en respectons la diversité.

3/8) Les humains n’ont pas le droit de réduire la richesse et la diversité biologique, sauf pour satisfaire des besoins vitaux.

Cette formule est peut-être excessive. Mais étant donné le nombre incroyable de droits que les êtres humains s’octroient, il peut être salutaire de formuler une norme sur ce que les humains n’ont pas le droit de faire. Il nous faut prendre en compte des situations dans lesquelles nous ne pouvons revendiquer aucun droit. Nous avons délibérément choisi de laisser le terme « besoin vital » dans le flou pour que chacun soit libre de l’interpréter comme il l’entend. Il faut prendre en compte les différences de climat ainsi que les différences d’organisation dans les sociétés telles qu’elles existent aujourd’hui. Il faut également prendre en considération la différence entre un moyen pour satisfaire un besoin et le moyen lui-même. Pour le baleinier, la chasse à la baleine est une moyen important d’éviter le chômage. Mais il faut pourtant de toute urgence contrôler le pêcheur et son bateau, pour éviter la surpêche et l’usage de méthodes barbares.

4/8) L’épanouissement de la vie et des cultures humaines n’est compatible qu’avec une diminution substantielle de la population humaine. L’épanouissement des formes de vie non-humaine requiert une telle diminution.

La stabilisation et la réduction de la population humaine prendre du temps. Il faut donc mettre en place des stratégies provisoires. Mais cela n’excuse en rien la complaisance dont nous faisons preuve actuellement ; nous devons prendre conscience de l’extrême gravité de la situation présente. Plus nous attendons, plus nous serons obligés de prendre des mesures drastiques. Tant que des changements profonds n’auront pas été réalisés, nous courons le risque d’assister à une diminution substantielle de la richesse et de la diversité de la vie ; le rythme d’extinction des espèces sera dix à cent fois supérieur qu’à n’importe quelle autre période de l’histoire humaine. Mais si les milliards d’êtres humains qui vivent aujourd’hui sur Terre adoptaient un comportement écologiquement responsable, la vie non humaine pourrait elle-aussi s’épanouir.

5/8) L’interférence humaine actuelle avec le monde non humain est excessive et nuisible, et la situation s’aggrave rapidement.

Dans les pays les plus riches, on ne peut pas s’attendre à ce que les gens réduisent leur impact sur le monde non humain du jour au lendemain. Réduire notre impact ne veut pas dire que nous ne pourrons plus modifier certains écosystèmes comme le font d’autres espèces. Les homme ont toujours transformé la terre et continueront probablement à le faire. Il s’agit de connaître la nature exacte et l’étendue de ces transformations. La biosphère a besoin d’immenses territoires sauvages pour que l’évolution et le spéciation des plantes et des animaux puissent s’y poursuivre. Les réserves de nature sauvage sont actuellement trop petites et trop peu nombreuses.

6/8) Les politiques doivent donc changer. Ces changements politiques affecteront les structures économiques, techniques, et idéologiques de la société à un niveau fondamental. La société changera en profondeur et rendra possible une expérience plus joyeuse de l’interdépendance de toutes choses.

La croissance économique telle qu’elle est aujourd’hui conçue et mise en application par les États industriels, est incompatible avec les 6 premiers points de la plate-forme de l’écologie profonde. Autonomie, décentralisation, bio-régionalisme, un slogan comme « penser globalement, agir localement » ; tous ces termes continueront à jouer un rôle important dans l’écologie des sociétés humaines. Mais si nous voulons mettre en place des changements profonds, nous devons nous engager dans une action globale qui dépasse les frontières. Lorsque des communautés locales soutiennent le prétendu développement de façon inconditionnelle, il est nécessaire qu’une autorité centrale les contraigne à adopter une politique écologique plus responsable. Il y a donc des limites à la décentralisation des décisions écologiques les plus importantes. Il devient aussi primordial de s’engager dans une action globale à travers des organisations non-gouvernementale. La plupart de ces organisations sont capables d’agir globalement tout en s’appuyant sur des contextes locaux, évitant ainsi des interventions gouvernementales malvenues. Aujourd’hui la diversité culturelle a besoin d’une technologie de pointe, c’est-à-dire des techniques qui permettent à chaque culture d’atteindre ses objectifs fondamentaux. Les technologies dites douces ou alternatives sont des étapes dans cette direction. Mais ce que l’on appelle actuellement « technologies de pointe » correspond rarement à ce nom.

7/8) Les changements idéologiques passent par l’appréciation d’une bonne qualité de vie plutôt que l’adhésion à des standards de vie toujours plus élevés. Il y aura une profonde conscience de la différence entre quantité et qualité.

Certains économistes critiquent l’expression « qualité de vie » et considèrent qu’elle est floue. Mais à l’examen, ce qu’ils tiennent pour flou est la nature non quantitative du terme. On ne peut quantifier correctement ce qui est important pour la qualité de la vie, et il n’est pas nécessaire de le faire.

8/8) Ceux qui souscrivent aux points précédents s’engagent à essayer de mettre en application directement ou indirectement les changements nécessaires.

Nous sommes libres de nous faire des opinions différentes des priorités de notre vie : que devons-nous faire en premier, et après ? Qu’est-ce qui est le plus urgent ? Qu’est-ce qui est nécessaire ? Qu’est-ce qui est souhaitable ? Les différences d’opinions n’excluent pas une coopération énergique. Formuler des principes fondamentaux qui soient partagés par la plupart des partisans de l’écologie profonde peut nous permettre de déterminer, parmi nos désaccords, lesquels nous aurions intérêt à atténuer, et lesquels à accentuer.

in Arne Naess, la réalisation de soi (éditions wildproject 2017, 314 pages pour 22 euros)

III) présentation du philosophe et écologiste Arne Naess

En 1973, le philosophe norvégien Arne Naess lança le mouvement de l’écologie profonde, la philosophie préférée des militants écologistes radicaux. Il est mort à l’âge de 96 ans le 12 janvier 2009. En Norvège, sa disparition a donné lieu à un hommage national.

Arne Naess est un philosophe atypique. Considéré par les positivistes logiques comme un des éléments les plus prometteurs du Cercle de Vienne, Arne Naess ne se ralliera jamais à leur thèse d’une réduction de la philosophie à l’analyse logique du langage, ni à l’idée que l’on puisse congédier l’ensemble des énoncés de la métaphysique au rang de non-sens. En 1938, Naess est nommé professeur de philosophie à l’université d’Oslo. Débute alors pour lui à 27 ans une carrière universitaire des plus brillantes. Arne Naess y met fin en 1969, lorsqu’il abandonne prématurément l’université : il préfère « vivre plutôt que fonctionner ».

Il s’engage dans la cause écologiste et, dès 1970, élabore son concept d’écologie profonde, en opposition à l’écologie dite « superficielle » qui se focalise uniquement sur la réduction de la pollution et la sauvegarde des ressources matérielles en vue de garantir le niveau de vie actuel des sociétés riches. A l’inverse, l’écologie profonde s’inscrit dans le long terme et place la réflexion écologique au niveau métaphysique (elle est « écosophie ») afin de transformer durablement la conception moderne du rapport de l’homme à la nature. Naess propose ainsi de substituer à l’image de l’homme-dans-son-environnement une vision relationnelle du monde qui rejette l’anthropocentrisme, et défend la thèse de l’ « égalité biosphèrique », à savoir le droit égal pour tous les êtres vivants de vivre et de s’épanouir en raison de la valeur intrinsèque de chacun.

En sus de l’élaboration de ces grandes thèses philosophiques qui ont donné lieu à un très grand nombre de discussions relativement scolastiques dans le cadre du développement de l’éthique environnementale sur les campus américains, Naess aura toujours prôné la nécessité d’une action militante comme une donnée essentielle de l’écologie profonde. Il se distingue notamment lors des manifestations anti-barrage de Mardöla en 1970, et d’Alta en 1980. On pourra regretter que l’écologie profonde nous soit parvenue en France sous l’effet de la caricature absurde, réduisant l’égalitarisme biosphèrique à une forme d’antihumanisme fascisant*. Il n’en a pas fallu beaucoup pour que la position, certes radicale, des écologistes profonds en faveur d’une réduction de la population humaine comme vecteur important de l’amélioration de la condition humaine et de la planète ne réveille chez certains les peurs génocidaires.

Espérons que la (re)découverte d’Arne Naess nous donne l’occasion de relire une œuvre jamais marquée par les certitudes, profondément ouverte et tolérante, humaine et pacifiste, fortement imprégnée de la pensée de Spinoza et de Gandhi – à l’heure ou l’écologie politique, engloutit dans les pratiques politiciennes, plonge de plus en plus dans l’impensé.

* Le Nouvel Ordre écologique de Luc Ferry est l’exemple le plus emblématique de cette interprétation.

Un livre récemment paru (avril 2017) fait une bonne présentation d’Arne Naess et recense certains de ses articles : Une écosophie pour la vie (introduction à l’écologie profonde) aux éditions anthropocène/Seuil

Références biographiques sur notre réseau de documentation des écologistes :

Ecologie, communauté et style de vie de Arne NAESS

Vers l’écologie profonde (Arne NAESS avec David ROTHENBERG)

10 réflexions sur “BIOSPHERE-INFO, tout savoir sur l’Écologie profonde”

  1. Mon commentaire du 15 août 2017 à 10h49 est publié dans la mauvaise page.

    Je me suis trompé(e) d’emplacement. Au temps pour moi.

  2. D’accord avec vous Séverine. Comme le disait notre regretté Cavanna : « Nous allons dans le mur, allons-y gaiement.»
    Gardons-nous donc de sombrer avec les tristes sires. Et d’ailleurs je ne comprends pas la raison qui les empêche de se saborder sur le champ, ils nous feraient ainsi un peu plus de place.
    Je ne suis absolument pas d’accord avec le lieu commun : « Plus on est de fous plus on rit.»

  3. @marcel,
    1/La stérilisation ne requiert pas forcément la mutilation.
    Il n’y a pas que la vasectomie et la ligature des trompes. La stérilisation chimique sans de quelconques douleurs ni effets secondaires indésirables serait possible si on piochait dans les portefeuilles du grand patronat assez de moyens pour la financer.
    2/Vous écrivez : « Par cette surprésence , le bipède arrogant et prédateur est un nuisible comme cette planète n’ en a jamais connu ».En effet. Et je n’ai jamais nié cela.Toujours est-il que l’évident danger de la surpopulation humaine ne remet en cause ni ne relativise quoi que ce soit que j’aie écrit.
    3/Vous écrivez : « La stérilisation à échelle mondiale produira des effets quasi ,immédiats et durables tandis que la contraception requiert un processus lent et hasardeux ».
    Si vous relisez le premier commentaire que j’aie écrit dans l’article sur le fil duquel nous sommes en train de débattre, vous découvrirez que je prône le droit à la contraception en plus et non pas à la place du droit à être rendu stérile. J’ai bien précisé que j’étais favorable à la stérilisation réellement volontaire.
    Vous répondez donc à un argument fantôme.

  4. @invite :

    la biodiversité animale / végétale est gravement menacée par notre surprésence , il n’ est plus temps de tergiverser : que la stérilisation soit masculine (vasectomie) ou féminine (ligature des trompes) , elle requiert une chirurgie et donc une certaine mutilation .
    Par cette surprésence , le bipède arrogant et prédateur est un nuisible comme cette planète n’ en a jamais connu (pire que les métastases cancéreuses)
    Je pense que pas mal de milliardaires (dont Gates) souhaiteraient faire décroître la population mondiale pour la ramener à un chiffre de 1 milliard mais les moyens pour y arriver pourraient être bien plus cruels que ceux de dame nature (guerres massives provoquées , épidémies ravageuses ,…).
    Croyez-moi , la stérilisation de masse est un pis-aller en comparaison du projet des oligarques mondialistes et de leurs exécutants politocards .

    La stérilisation à échelle mondiale produira des effets quasi ,immédiats et durables tandis que la contraception requiert un processus lent et hasardeux voire une certaine technicité difficile à enseigner aux habitants du 1/3 monde .

  5. @Severine Fontan :
    la stérilisation est encore un moyen « doux  » pour tenter d’ enrayer le processus de destruction mais je partage totalement votre constat pessimiste .

  6. Séverine Fontan

    Marcel dit : « Bon d’accord , il se pourrait aussi que dame nature s’occupe du problème avec sa douceur légendaire et là la décroissance démographique se fera sans stérilisation ».
    C’est clairement ce qui va se passer. Le reste n’est que voeu pieu.
    Comme écrivait le regretté Cavanna à Démographie Responsable il y a quelques années : « Nous allons dans le mur, allons-y gaiement ».

  7. Bonsoir @Marcel.

    La stérilisation peut être une option intéressante, à condition qu’elle soit sans aucune mutilation physiques ni effets secondaires indésirables, qu’elle ne soit que sur la base du volontariat, et qu’elle vienne, non pas en remplacement, mais en plus du fait de faire en sorte que tout citoyen du monde ait accès à de la bonne contraception réellement efficace qui soit dépourvu d’effets secondaires indésirables.

    Or, je vois mal comment Rajiv Gandhi pouvait récolter l’argent nécessaire au fait que sans mutilations les volontaires fussent rendus stériles. Cet homme politique n’a en effet pas éradiqué le capitalisme qui au détriment des besoins de réguler proprement la démographie plaçait le frique dans les portefeuilles des grands patrons milliardaires.

    L’action de ce monsieur Gandhi a donc de forte chance de ne pas être une bonne référence. Réguler la population mondial de manière inacceptable implique forcément des mesures inédites avec lesquelles le niveau actuel des sacro-saints profits des milliardaires soit intrinsèquement incompatible.

  8. « La stabilisation et la réduction de la population humaine prendre du temps. Il faut donc mettre en place des stratégies provisoires. Mais cela n’excuse en rien la complaisance dont nous faisons preuve actuellement ; nous devons prendre conscience de l’extrême gravité de la situation présente. Plus nous attendons, plus nous serons obligés de prendre des mesures drastiques.  »

    Merci M. Naess de confirmer ici la nécessité de prendre le problème démographique
    d’ une main de fer : tout blabla gauchiste sur la contraception à rendre accessible aux familles lapinopondeuses muzz du 1/3 monde (pléonasme) présentes en Europe ou non est vain : le temps de la biodiversité est compté—–>
    Rajiv Gandhi avait tout compris dans les années 70 en stérilisant des millions d’ indiens moyennant avantages en argent ou en nature ou …
    Bon d’ accord , il se pourrait aussi que dame nature s’ occupe du problème avec sa douceur légendaire et là la décroissance démographique se fera sans stérilisation .

  9. de MILLER Roland

    Voir également l’ouvrage qui vient de paraître :
    Arne NAESS : Une écosophie pour la vie. Introduction à l’écologie profonde. Editions du Seuil, avril 2017, 351 p. Coll. Anthropocène, 22 €.

Les commentaires sont fermés.