Croissance du PIB, décroissance des idées

Dans la campagne présidentielle, on trouve surtout des croissancistes, mais aussi les « altercroissants » de la croissance verte, et une seule avec l’étendard de la décroissance économique, Delphine Batho. Emmanuel Macron rêve tout haut d’une croissance de « 12 % ou 13 % » à horizon 2030 alors que Jean-Luc Mélenchon affirme dès 2012 « s’interdire le mot “croissance” ». Il est vrai que la croissance du PIB est globalement nocive pour l’environnement – plus on produit, plus on consomme, plus on détruit.

Lire, Une bonne nouvelle, la croissance du PIB est en panne

Elsa Conesa : Longtemps productiviste et convaincue de la nécessité de croître pour redistribuer, la gauche est devenue plus prudente, notamment depuis l’émergence des questions climatiques. Les crises écologiques ont ouvert le débat sur les externalités négatives de la croissance économique. Le leader de La France insoumise propose une « règle verte » : « Ne pas prendre à la nature plus qu’elle ne peut reconstituer ». A droite, les candidats restent en faveur d’une économie en croissance, mais même Eric Zemmour réfute « la croissance pour la croissance ». Cependant la sobriété peine à percer politiquement. Car dans l’opinion, la croissance demeure assimilée à la prospérité et au pouvoir d’achat.

Lire, 2022, le piège du pouvoir d’achat

Nos institutions sont actuellement conçues pour une perpétuation de la croissance . On éalue l’évolution du budget de l’État selon le rythme de croissance du PIB. Quand il y en a moins que prévu, la dette publique explose. Et certains peuvent même écrire que « Si la croissance était abandonnée comme objectif politique, la démocratie devrait aussi l’être ».

Lire, Hymne à toutes les décroissances

Voici les termes du débat sur lemonde.fr, mais pour nous il n’y a pas photo. Un politique ou un économiste qui croit à une croissance durable dans un monde clos est soit un fou, soit un irresponsable.

Marc Girod : Le fait de parler de croissance dans préciser de quoi est problématique, et trompeur. Il s’agit bien sûr de croissance du PIB, effet non pas de croissance de la prospérité ou du bien-être. Le PIB est une mesure de l’activité rémunérée. C’est donc une vision purement quantitative, non qualitative. Le processus est réducteur. La monnaie fonctionne comme convertisseur de qualité en quantité (mesurable et comparable). Les acteurs économiques s’engagent à rembourser des crédits à la mesure de leur système de valorisation propre. On additionne ainsi allègrement des projets antinomiques. L’activité résultante est factice, arbitraire, valorisée indirectement. Ce modèle est absurde et mortifère.

Edouard kidi : je suis plutôt croissant au beurre, avec un peu de confiture. Et surtout pas d’anxiolytiques. Matthieu Ricard, moine bouddhiste qui sème l’altruisme, la compassion et l »amour de l’autre fût inviter à donner un séminaire aux cadres d’une grande entreprise. Il parla donc de ces sujets. A la fin de son intervention, le modérateur le remercia puis dit ‘Passons maintenant aux choses sérieuses’.

LaVénalitéenMarcHe : Oui… L’autodestruction par la croissance du cynisme imbécile, c’est tellement plus sérieux. La radicalisation de la mauvaise foi croissanciste menace notre survie. Ainsi le noble Fourquet de l’IFOP pour qui « la vision traditionnelle est contestée, mais sans qu’on voie vraiment ce qu’est le récit alternatif. » Il faut un sacré culot pour affirmer, comme du temps de Thatchet/Reagan « TINA (There Is No Alternative) ». Comme si n’existait pas le nombre incalculable de livres, films, articles, reportages consacrés à ces alternatives depuis plus de 15 ans ! Sobriété, écovillages, bâtiments bioclimatiques, phyto-épuration, tiny house, économie circulaire e tutti quanti ? Connais pas ! Il est pourtant là, le « récit alternatif », avec sa cohérence et son efficacité… au lieu de moisir dans une vie grise de béton, d’ennui, TV, bagnoles, bruit, pollutions, bs jobs, violences, addictions, gadgets, malbouffe, perte de sens et de soi, inégalités et confiscation du pouvoir par les nantis. Il n’y a pire aveugle que celui qui refuse de voir.

Francois M : En France , plus de 30% du PIB est le fait de la redistribution. Décroître, ce serait renoncer à la démocratie sociale ? Dictature ou ultra-libéralisme ?

Surtout : 300 000 sans domicile fixe déjà en France. Un chiffre qui a doublé en 10 ans. Combien en 2025 ? Un quart sont d’anciens enfants placés. En 2017, 49 bébés sont nés dans la rue à Paris, puis 100 en 2018 et 146 aujourd’hui.

Michel SOURROUILLE : La « création de richesses » n’est en fait qu’une transformation de ressources naturelles. Lorsque l’approvisionnement énergétique commence à être fortement contraint, il est logique que l’emploi tertiaire souffre autant que l’emploi productif. Retraites et études longues sont « assises » sur des consommations d’énergie importantes, il n’y a beaucoup de retraités et d’étudiants que dans les pays qui consomment beaucoup d’énergie. Les bons sentiments sans kilowattheures risquent d’être difficiles à mettre en œuvre ! Une journée d’hospitalisation en service de réanimation coûte de 500 à 5000 kWh d’énergie. Même si cela peut paraître sordide, dès lors que la quantité d’énergie est limitée, il devient légitime de se demander si la collectivité doit plutôt les dépenser pour sauver mille conducteurs imprudents, vingt malades de Parkinson ou pour maintenir en vie des personnes en bout de course avec des dispositifs lourds. (dixit Jancovici en 2011)

17 réflexions sur “Croissance du PIB, décroissance des idées”

  1. « Croissance du PIB, décroissance des idées »
    Oh des idées théoriques, on peut en avoir plein, j’en ai plein à proposer pour organiser la décroissance afin d’assurer la paix entre individus… Mais personne n’acceptera d’appliquer les idées ! Qui consentira à moins de biens et services ? Voilà; je ne réponds pas à la question, mais je préfère vous laisser y répondre ! A pour répondre à la question vous avez deux voies, 1/ se mentir à soi-même ou 2/ être franc et honnête ! Si vous préférez la réponse 1/, alors vous préférez mentir pour resté dans le déni de la vérité, alors vous allez prétexter le fait qu’il faille resté optimiste pour appliquer chaque solution théorique, car à mon avis vos solutions seront aussi inapplicables que les miennes !

    1. Si vous êtes lucide en adoptant la réponse 2, alors vous avez compris que vos solutions autant que les miennes seront inapplicables pour partager les ressources en déplétion dans la bonne humeur, alors vous savez que vous devez vous écartez des grandes concentrations de populations pour assurer votre survie, en attendant que les bouches en trop se neutralisent entre elles… Et oui, c’est impossible d’organiser la décroissance pour avoir moins ! La preuve; même les milliardaires ne sont pas prêts de perdre ne serait-ce qu’un seul dollar ou euro ! Même 1 dollar ou 1 euro de perte de pouvoir d’achat, les milliardaires ne sont pas prêt d’y consentir pour sauver l’environnement !

    2. 1) « je ne réponds pas à la question, mais je préfère vous laisser y répondre ! »
      Le truc de poser la question est bien connu.
      Mais en plus tu y réponds en affirmant (!) que ce serait personne :
      – « Mais personne n’acceptera d’appliquer les idées ! »

      2) La (ta) question : « Qui consentira à moins de biens et services ? »
      Pour y répondre tu nous dis que n’avons «deux voies» : soit faire l’autruche, soit être franc et honnête. Pour répondre à ta question, en toute franchise et honnêteté, pour commencer je te rappelle que bon nombre de gens consentent (acceptent etc.) déjà à avoir moins de biens (et plus de liens), à vivre avec moins (pour vivre mieux). Des tas de jeunes et moins jeunes tournent le dos à leur vie de petits bourgeois pour aller planter des chèvres et élever des choux, et ils le font sans que personne ne les y OBLIGE ! Et si on rajoute ceux qui sont bien obligés (chômage etc.) là ça fait du monde !

      1. Parce que t’auras compris que le CONSENTEMENT, ou l’acceptation, peut-être interprété de deux façons radicalement opposées.
        D’après ce que tu nous a dit… tu ne consens pas à te laisser EMMERDER par Macron, Big Pharma et Compagnie. TU REFUSES et tu as raison !
        Si aujourd’hui tu en es toujours là, c’est que toi non plus tu ne t’es pas encore laissé CONVAINCRE (vaincre un con). Macron et Compagnie n’ont donc pas fini de nous EMMERDER. Alors (en attendant) essayons ne pas trop en rajouter avec des conneries !

      2. Ben si tu veux démontrer le contraire, et ben vas y propose et SURTOUT réussit à faire appliquer ne serait-ce qu’1% de tes propositions ! Je sens que je vais rire ! Tu vois je suis sympa, juste réussir à faire appliquer 1 % de tes propositions ! Bon courage !

      3. Quoi, je veux démontrer le contraire ? Des fois je me demande si tu comprends ce que tu lis. MES propositions ? Mais de quoi parles-tu ?

  2. et bien dansez maintenant

    La croissance du PIB ne calcule que l’augmentation du PIB par rapport à l’année précédente. Une croissance nulle n’est pas nulle car elle serait égale à celle de l’année passée et ce n’est pas rien!!!
    Nez en moins, dans ce cas de figure , du fait de la croissance de la population, une croissance archi nulle se traduirait par une baisse du PIB/habitant…

    1. Nez rouge en plus

      En attendant, moi ça fait déjà un moment que j’ai arrêté de croître. Je ne rapetisse pas encore, pour l’instant je stagne, et en effet c’est pas rien. 🙂

  3. Un buraliste qui vend des cigarettes, un publicitaire qui travaille à créer des addictions pour pousser à la consommation de tabac, un fumeur invétéré qui doit se faire soigner pour son cancer du poumon… Tout ça crée de la croissance. En revanche, un père de famille qui fait pousser dans son jardin de quoi nourrir en partie sa famille ou un informaticien qui travaille à un logiciel libre qui servira gratuitement à des millions de personnes ne produisent pas de croissance. Si l’on s’en tient au taux de croissance, il faudrait privilégier les premiers au détriment des seconds. Doit-on pousser les enfants à fumer dès le plus jeune âge ?

    La croissance ne calcule ni l’enrichissement, ni le bien être, mais un certain type de production bien particulier. En somme, le taux de croissance modélise l’expansion du capitalisme. Cela va-t-il continuer ?

    1. La clope, la bagnole, la frime, la bouffe etc. etc. parce que je le veau bien, et que c’est L’Oréal qui le dit !
      – « Pour sortir du fétichisme consacré au PIB » (Biosphère 4 oct 2021)
      – « Épousez votre femme de ménage et vous ferez baisser le PIB » (Alfred Sauvy)
      – « Brûlez Paris et vous ferez augmenter le PIB » (Les Éconoclastes, 2003)

      Dixit Les Éconoclastes, il y a déjà 20 ans aux Etats-Unis, les entreprises du secteur alimentaire dépensaient chaque année 20 milliards de dollars pour convaincre la population de manger plus ! Et chaque jour un quart des Américains allaient bouffer de la junk-food dans un fast-food. Et y dépensaient 110 milliards de dollars par an.
      Les obsédés du retour sur investissement ne trouveront peut-être rien à redire.

      1. Et en même temps (comme dit notre apôtre national de la sacro-sainte Croissance), il y a 20 ans les Ricains dépensaient 30 à 50 milliards en produits amincissants. Pour le plus grand bonheur des marchands de minceurs. Le nombre de Ricains ne pouvant plus prendre l’avion était en pleine croissance. Ce qui bien sûr n’a pas fait décroître le trafic aérien, tant pis pour le Climat. Les dépenses médicales liées à l’obésité s’élevaient alors à 50 milliards de dollars par an. etc. etc.
        On pourrait s’amuser à mesurer ce qu’il en est de tout ça aujourd’hui.
        En attendant, à côté de la question «croissance de quoi ?» il y a la question «croissance pour qui ?», autrement dit la question des inégalités.

  4. La croissance du PIB, c’est bon on sait ce que c’est. Que ce soit un peu, beaucoup, passionnément, à la folie ou pas du tout pour quelques uns, d’une manière générale on l’adore. On l’adore, on la vénère, on la pleure quand elle est molle, on se la souhaite forte et vigoureuse pour des siècles et des siècles etc. bref elle nous gave depuis des lustres.
    La décroissance des idées, le déclin de la pensée, c’est autre chose, un autre problème.
    Peut-être encore plus grave que celui de la sacro-sainte Croissance. Où sont passés les intellectuels, les philosophes, qu’est devenu le monde des idées ? Avouons déjà que même sur Biosphère c’est plutôt misérable.

    1. Esprit critique

      Jancovici serait-il une référence dans le domaine des idées ? Certainement pas.
      Serait-il La Référence en matière de Décroissance, celui qui en parlerait le mieux, comme osent prétendre certains meRdias ? Encore moins.
      Écoutons Janco nous expliquer les joules et les kilowattheures, il en parle très bien. Mais pour le reste méfions-nous. N’allons pas ânonner n’importe quoi, ni profiter de telle occasion pour propager (même inconsciemment) des idées pourries. Parce que si nous assistons à la décroissance des idées, force est de constater que certaines progressent.

      1. Si nos vies ne se résument pas à des euros, au Pognon, au PIB, n’allons pas non plus les résumer à des kilowattheures. Combien de kilowattheures pour le rire d’un enfant ? Pour un coucher de soleil, pour l’amour, l’amitié, pour la réflexion etc. Gardons-nous de tout traduire en chiffres, surtout une vie humaine, nous ne sommes quand même pas (encore) de vulgaires machines.

      2. – «2011 Changer le monde, tout un programme de Jean-Marc Jancovici»
        (Lien vers le résumé de Biosphère « 4/8) Les conséquences sociales de l’énergie»)

        Jancovici nous dit là ce que coûte, en terme d’énergie, un être humain en réanimation. Et lance l’idée (pourrie) : «il devient légitime de se demander si la collectivité [etc.]» C’était donc en 2011. Et 11 ans plus tard nous y sommes. Et Biosphère d’en rajouter. Légitime, qu’il dit ! Aujourd’hui tout et n’importe quoi est légitime. Misère misère !
        Après les malades en réanimation, les taulards. On sait aussi combien Janco aime les vieux, qu’il laisserait volontiers crever après 65 ans. Dans 5 ans on verra, ou pas, ce qu’il en dit. En attendant, tout ça est misérable ! Parce qu’avant de se demander si la collectivité se doit, ou pas, de consacrer autant de kilowattheures à sauver des vies humaines, un minimum de bon sens devrait nous dicter de réfléchir à ce qui les (nous) détruit.

  5. Nous continuons d’émettre bien trop de carbone pour préserver nos enfants de la guerre et du chaos. Avec la crise arrive le chômage, et, derrière le chômage, la tentation totalitaire. La dépendance de l’Europe aux énergies fossiles est à terme une dépendance mortelle pour la démocratie. Chez nous, les chocs pétroliers futurs amèneront peut-être un clone de Marine le Pen au pouvoir…
    En termes géopolitiques, l’évolution a toutes les chances de se traduire par le retour à un monde fragmenté et conflictuel, où une multitude de totalitarismes locaux se disputent des ressources en diminution globale. Ce qui nous attend est une réédition de craquements comme nous en avons connu avec une intensité croissante depuis 1974, chaque choc étant plus terrible que le précédent, jusqu’au moment où la pénurie de ressources fera voler en éclats la civilisation actuelle.

    1. Eviter le pire !

      Nous voyons clairement aujourd’hui qui sont ceux qui ont déclaré la «guerre» au CO2, qui prétendent vouloir «sauver» la Planète et le Climat et patati et patata.
      De toutes façons Demain ne sera ni rose ni vert, c’est sûr. Acceptons que tout a un début et une fin, même les étoiles, alors pensez donc pour une civilisation. Notre civilisation est comme nous, elle à bout de souffle, elle ne tient plus qu’avec des rustines. En attendant, pas question pour autant d’accepter tout et n’importe quoi ! Je nous propose de tout faire pour éviter le Pire.

Les commentaires sont fermés.