De l’inutilité absolue de l’espèce humaine

La réponse classique apportée à la question : « A quoi sert l’homme ? » à savoir : à rien, ou plus exactement, à rien d’autre qu’à lui-même… est la réponse la plus réaliste qui soit. Chasser Dieu pour mettre l’homme à la place était un mauvais calcul. L’idéologie des Lumières était suicidaire. Kant, théoricien de la bourgeoisie montante, a conceptualisé l’inutilité sublime de l’homme qu’il érige de surcroît en impératif catégorique : « Agis de telle sorte que tu traites l’humanité, soit dans ta personne, soit dans la personne d’autrui, toujours en même temps comme une fin, et que tu ne t’en serves jamais simplement comme un moyen. » L’homme devient donc lui-même sa propre fin, l’homme se referme sur lui-même.

L’homme n’est finalement qu’un animal comme les autres, à ceci près (qui n’est quand même pas rien) qu’au lieu de jouer le rôle qui lui est attribué au sein du processus évolutionnaire, il essaie de changer les règles pour ce qu’il croit être son profit ! Pour les transhumanistes, l’homme n’est qu’une transition et il faut le faire accéder à l’étape suivante. Là encore, une bonne volonté gluante et autocentrée conduit à une logique du pire.

A quoi sert Woody Allen, à rien, aucune utilité

Woody Allen  :« Aujourd’hui, on va sur la Lune et sur Mars, on a des ordinateurs et des robots, mais nous avons les mêmes problèmes émotionnels que les Grecs il y a cinq mille ans : la passion, la jalousie, la haine, la solitude, l’amour d’un autre et la frustration, rien de tout cela n’a changé, cela tourne en rond encore et encore, et dans cinq mille ans les gens continueront à aimer, à être jaloux et à se sentir trahis. C’est Wonder Wheel, la même grande roue qui n’amène nulle part. J’ai essayé de trouver un sens à la vie mais j’ai laissé tomber.

A quoi sert donc l’humain, à rien, aucune utilité (2018)

Dominique Lestel : A quoi sert l’homme aujourd’hui ? A rétablir une harmonie du monde, celle que l’humanisme a détruit en considérant l’humain comme une sublime inutilité, pour l’avoir élevé à une fin en soi en le plaçant au-dessus de tout. Comment permettre à l’homme de se rendre de nouveau hospitalier à cette Nature dont en fin de compte il n’est jamais sorti ? L’écologie doit assumer l’idée que l’homme et la nature sont, non pas seulement irrémédiablement liées, mais ontologiquement consubstantiels. Il s’agit moins de préserver la nature que de reprendre conscience de la texture qui lie l’homme au monde vivant dans lequel il est profondément immergé. Si l’homme ne sert vraiment à rien, il peut au moins servir à s’éliminer lui-même !

à quoi sert la vie humaine ? (2009)

Avant la naissance ou au moment de la mort, il n’y a pas en soi de définition d’une vie digne d’être vécue ; tout dépend d’une élaboration sociale. Quelle décision philosophico-politique prendre dans le cas des Alzheimer qui n’ont de la dignité humaine que l’apparence charnelle ? Quelle décision philosophico-politique prendre dans le cas des fins de vie dans des hôpitaux-prisons-mouroirs ? L’acharnement des partisans de la vie malgré tout me paraît incompréhensible. Il me paraît plus sain d’empêcher la perte de biodiversité et l’extinction des espèces plutôt que de vouloir préserver la vie des humains qui ne servent plus à rien.

Le point de vue des écologistes sans illusions

A quoi sert l’homme ? Si on pose cette question à quelqu’un, il répondra spontanément « Je n’en sais rien ». En effet, il n’y a pas de réponse nécessaire. L’homme aux multiples facettes ne trouve de sens à son existence qu’au fur et à mesure de son vécu, imprégné par sa socialisation et motivé par des réflexes ethniques. Dans un monde occidentalisé, il a même oublié le sens de l’harmonie avec la biodiversité d’une planète qu’il considère comme extérieure à lui-même. Il n’y a plus de Nature, il n’y a qu’environnement. Tant qu’il en sera ainsi, non seulement l’homme ne trouvera pas à quoi il sert vraiment, si ce n’est en produisant et consommant de la futilité pour oublier à quoi il pourrait servir. Finalement l’homme actuel ne sert qu’à lui-même, il est baigné dans l’anthropocentrisme des discours publicitaires. Il se sert, dans une nature taillable et corvéable à merci !

A quoi donc sert l’homme ? Comme les humains ne sont qu’une des mailles du tissu du vivant, ils doivent d’abord servir à protéger le vivant contre eux-mêmes, ils doivent retrouver le sens des limites. Devenir la forêt qui se protège elle-même, devenir une espèce menacée qui se protège elle-même. L’espèce homo sapiens ne vit pas hors sol : si les écosystèmes ne sont pas robustes, alors l’humanité ne le sera pas non plus.

à quoi sert l’homme ? (2007)

Des raisons d’espérer en l’espèce humaine

Biosphere-info septembre, l’espérance en mouvement (2018)

Un producteur de bois a déclaré un jour qu’en regardant un arbre, tout ce qu’il voyait était un tas d’argent sur une souche.

Parce que notre culture industrialisée a oublié le principe de réciprocité, les forêts continuent à rétrécir et les déserts à croître.

Le même fleuve de vie qui court à travers mes veines court nuit et jour à travers le monde (Rabindranath Tagore)

J’essaie de me rappeler que ce n’est pas moi, John Seed, qui essaie de protéger la forêt tropicale. Mais plutôt que je fais partie de la forêt tropicale qui se protège elle-même. Je suis la partie récemment émergée de la forêt tropicale qui a le pouvoir de se penser.

Il est facile de dénigrer une action hors contexte en pensant : « Cela ne sert pas à grand chose. » Pour se rendre compte du pouvoir d’une simple action, il faut au contraire se demander : « De quoi fait-elle partie ? »

2 réflexions sur “De l’inutilité absolue de l’espèce humaine”

  1. A quoi sert l’humain ? Question absurde, que seul l’homme est capable de se poser, juste pour dire s’il est c..
    Parce qu’ à ce moment là, à quoi sert une fleur, et une baleine ? Je doute qu’elles puissent nous le dire. Et mieux, à quoi sert notre planète, perdue dans l’immensité du cosmos ? Mis à part à faire tourner la lune, je ne vois pas. ( MICHEL C 30 JUIN 2018 À 19:36 )

  2. Le concept d’utilité ne concerne que certaines choses, les pièces d’une machine, une construction,une loi…
    Mais l’existence d’une espèce est un fait qui n’a rien à voir avec un objectif.
    C’est avec ce genre de malentendu qu’on a classé les animaux en espèces utiles ou nuisibles, cela n’a aucun sens, aucune n’est « utile » ni n’est « nuisible » elles sont là et tentent de se maintenir dans la biosphère.
    C’est par une réduction à courte vue et pour un objectif restreint qu’on a inventé le concept de nuisible (si j’ai des poules que mange le renard, je peux considérer que pour un temps et pour un espace déterminé et pour mon compte en banque le renard m’est nuisible, mais cela n’a aucun sens de manière globale (idem pour le concept d’utilité qui réduit les animaux à une fonction).
    Les mots sont comme les fonctions mathématiques, elles ont un domaine de définition qu’il faut préciser avant d’en aborder l’analyse.

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