Définir l’ennemi, c’est du suicide organisé

La guerre n’est que le rejet de notre commune humanité. Elle repose sur une invention socio-politique, celle d’un ennemi à abattre. Il s’agit de propager collectivement une distinction artificielle entre NOUS et EUX, les bons Russes contre les méchants Ukrainiens, les Juifs désignés par Dieu et les mécréants musulmans, les Soudanais de Mohamed Hamdan Dogolo opposés aux Soudanais d’Abdel Fattah al-Burhan , etc.

LE MONDE a organisé du 22 au 24 novembre son 36e forum philo sur le thème « Jamais sans mon ennemi ? » Vaste programme ! Mais on va surtout y parler de guerre… jamais de désarmement.

J’aurais aimé faire réfléchir les participations de forum sur ces trois conceptions de l’arme :

– Quand les Portugais ont introduit le mousquet dans le Japon du XVIe siècle, son emploi fut désavoué et il fallut attendre longtemps avant qu’il soit autorisé à remplacer les armes traditionnelles. Son efficacité en tant qu’instrument de guerre n’était pas mise en doute. Mais il ne  correspondait pas à la tradition culturelle japonaise, pour laquelle l’utilisation d’un engin permettant à un gamin de tuer un samouraï chevronné était tout à fait inadmissible.

– En 1947, l’écrivain Georges Bernanos disait l’effroi qui lui inspirait la guerre aérienne. Quand un pilote d’avion peut broyer des milliers de corps sans même apercevoir leurs silhouettes, que devient le métier de soldat ?

– Aujourd’hui la prolifération des drones transforme l’ennemi en gibier visé par un assassin invisible.

Le point de vue des écologistes contre les ennemis de la planète

Guerre à la planète, et le seul ennemi c’est nous-même

extraits : Aujourd’hui nous sommes dans une situation paradoxale. Tous les paramètres biophysiques de la biosphère sont au rouge, il est donc absolument nécessaire d’agir de toute urgence dans un contexte d’épuisement accéléré de toutes les ressources naturelles et de réchauffement climatique inéluctable. Or il n’y a plus d’ennemi clairement désigné, nous faisons la guerre à la planète et nous sommes tous complices. Les riches dilapident les ressources fossiles et les pauvres détériorent souvent le milieu proche qui les faisaient vivre quand ils ne jouent pas à imiter les riches….

Deep Green Resistance, ne nous trompons pas d’ennemi

extraits : Deep Green Resistance est un mouvement écologiste fondé par Derrick Jensen, Aric McBay et Lierre Keith, lors de la conférence Earth at Risk du 13 novembre 2011. Leurs présupposés sont repris dans deux livres qui viennent de paraître, « Écologie en résistance, stratégies pour une Terre en péril » aux éditions Libre. Loin d’ostraciser la non-violence, les auteurs estiment complémentaires les mouvements à visage découvert et les mouvement clandestins. Comme l’exprime Armand Farrachi dans sa préface du tome 2, aucun des auteurs ne propose de résoudre une « crise » (passagère) ou de passer la persillère derrière les ennemis de la terre, tous réfléchissent au moyen d’arrêter le massacre, le plus tôt, le plus radicalement possible, ce que personne ne fait ni dans la presse ni dans les diverses chambres du pouvoir….

Comment lutter contre la pub, ennemie de l’écologie

extraits : La publicité n’est que la partie émergée de la société marchande et sa croissance dévastatrice. La publicité a essentiellement pour effet de propager le consumérisme, ce qui implique le productivisme et exploitation croissante des hommes et des ressources naturelles. C’est un des mérites des actions contre l’affichage que de ne pas avoir été menées afin d’obtenir satisfaction sur des revendications précises. Les actions publicidaires de 2003-2004, arrachages et barbouillages d’affiches, ont renoué avec la tradition luddite du sabotage, consistant à nuire aux dispositifs qui nous nuisent….

9 réflexions sur “Définir l’ennemi, c’est du suicide organisé”

  1. Un commentateur : «Un ennemi est toute personne ou groupe de personnes qui constitue une menace individuelle ou collective pour une civilisation. »
    Cette définition pose plusieurs questions. D’abord de quelle civilisation s’agit-il ? Les cultures indiennes ont été les victimes des colonialistes d’Espagne, du Portugal et des Anglo-saxons. Est-ce les cultures de sociétés autochtones qui méritent d’être protégées, cela mérite discussion. S’il s’agit de la civilisation « française », on ne sait plus de quels fondamentaux il s’agit. Une devise comme « liberté, égalité, fraternité » laisse beaucoup de place à plusieurs interprétations comme l’ouverture aux immigrés (libre circulation des personnes et accueil fraternel des immigrés qui sont nos égaux). Ou bien s’agit-il de notre civilisation thermo-industrielle qui nous mène au désastre et va vers l’effondrement ? (à suivre)

    1. (suite et fin) En fait certains éléments d’une civilisation méritent d’être protégés des « ennemis » et pas d’autres. Toute civilisation est issue d’origines très diverses et constituent à l’époque moderne des appareils complexes qui possèdent souvent des aspects contradictoires. Nous sommes devenus, y compris chaque individu, multiculturels et les « ennemis » résident souvent en nous-mêmes. Mieux vaut considérer que nous sommes issus de grands philosophes grecs, romains ou arabes, des scientifiques allemands, polonais ou chinois : un melting-pot dont nous devons conserver le meilleur en éliminant toute forme de racisme. Les simplismes ne sont jamais de bon conseillers…

    2. Esprit critique

      D’autant plus que cette fameuse menace peut très bien n’être qu’imaginaire.
      Elle n’existe alors que dans la tête de certains inquiets (avec ou sans guillemets) qui ne peuvent pas comprendre ce que vous tentez de leur expliquer là.

  2. Esprit critique

    Définir l’ennemi… pour mieux le DIABOLISER !

    – « La diabolisation de l’ennemi, ou la déshumanisation de l’ennemi, est une technique de propagande qui promeut l’idée que l’ennemi est un agresseur menaçant et maléfique avec des objectifs destructeurs. La diabolisation est la technique de propagande la plus ancienne visant à inspirer la haine envers l’ennemi […] La stratégie de diabolisation de l’ennemi conduit inévitablement à un cercle vicieux d’atrocités, qui a été élaboré par de nombreux auteurs, dont Carl von Clausewitz. La diabolisation de l’ennemi rend la solution diplomatique impossible et conduit inévitablement à la guerre ou à la détérioration des relations. Le fait de dépeindre l’ennemi comme particulièrement pervers inspire des sentiments qui facilitent les tueries. [etc.] » ( Wikipédia : Diabolisation de l’ennemi )

    1. Diabolisation d’un côté… dédiabolisation de l’autre.
      – Politique de « dédiabolisation » : comment le RN s’est inséré dans la société française
      ( latribune.fr/ 15 Nov 2023 )

      Mais alors… c’est qui ou quoi le Diable ?
      – « A force de s’en tenir à une définition stricte, fondée sur une sorte de pureté de l’alliage, a-t-on négligé sa résurgence possible ? […] un an avant sa mort et trente-cinq ans après la parution de son essai Ni droite ni gauche, Zeev Sternhell revenait encore en 2019 sur les œillères et le déni qui entouraient toujours le mot “fascisme” dans le monde intellectuel français. »
      ( Dire « fascisme » en 2021 : abus de langage ou clairvoyance ? radiofrance.fr 28 sept 2021 )

  3. major daubuisson

    Résumons les faits : un ennemi est toute personne ou groupe de personnes qui constitue une menace individuelle ou collective pour une civilisation ou pour d’ autres personnes.

  4. Esprit critique

    Un chat est un chat ! Pour bien réfléchir il faut toujours partir des définitions.
    Ce dont il faudrait se garder, c’est de se servir de ce mot (ENNEMI) pour désigner Untel ou Ontel, et plus généralement des personnes et groupes de personnes. Comme ON le fait trop sur ce blog, avec les «afromuzz», les «gauchiasses» et j’en passe.
    Cependant ce n’est pas toujours facile. Nous essaierons alors de bien faire la différence entre le «mauvais ami» (étymologie) et «l’ennemi à abattre». Autrement dit d’un côté celui qu’il convient de corriger… dans la mesure du possible bien sûr… et de l’autre celui qu’il convient d’abattre, sans autre forme de procès. D’un côté corriger… soigner, désintoxiquer, décoloniser etc. le malade, le tordu… pour son bien et donc le bien commun. De l’autre l’abattre, le tuer, l’égorger etc. pour finalement le pendre à une grue et plus si affinités. Misère misère !
    (à suivre)

    1. Esprit critique

      En attendant, je ne vois aucun mal au fait d’avoir de l’aversion (du mépris etc.) non pas pour quelqu’un… mais pour quelque chose, nuance !
      Par exemple à être ennemi de la Bêtise, et/ou tout simplement du Mensonge.
      Le mensonge qu’il suffit alors de ne pas con fondre avec le menteur, aussi misérable soit-il. Comme celui qui ose déclarer ici (sur ce blog) : « Je ne veux le malheur de personne […] Ne m’attribuez pas des intentions malveillantes que je n’ai pas. »

    2. Quant au souhait de Biosphère, à savoir celui d’ouvrir la réflexion sur ces trois conceptions de l’arme. Ce que je vois là, c’est l’accélération de la mise à distance de la (des) victime(s) par le tueur. Cette mise à distance qu’il convient désormais d’associer à la Déconnexion, notamment du Réel. Aujourd’hui en effet, ON tue des enfants (entre autres), pour de vrai et délibérément… bien planqué derrière un écran. Et ceci depuis des dizaines, centaines voire des milliers de kilomètres. Comment ne pas voir là le summum de la couardise ?

      – Guerre au Sahel : comment sont pilotés les drones de ombat de l’armée française ?
      (tf1info.fr 14 janvier 2020 )
      – Les drones américains sont-ils le meilleur allié d’Al-Qaïda ?
      (radiofrance.fr 27 juillet 2013)

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