Un groupe international d’experts spécialisés en droit pénal international s’est accordé sur une définition juridique internationale du crime d’écocide. Il consiste en des « actes illégaux ou arbitraires commis en sachant la réelle probabilité que ces actes causent à l’environnement des dommages graves qui soient étendus ou durables ». Cette définition doit permettre de proposer un amendement visant à modifier le statut de Rome et de criminaliser l’écocide au même titre que le génocide, les crimes contre l’humanité, les crimes de guerre et les crimes d’agression. A l’attention des Etats parties prenantes au(document qui définit les crimes internationaux sur lesquels la CPI (Cour pénale internationale a un pouvoir juridictionnel)),Il faut maintenant qu’un des 123 Etats parties au statut de Rome propose cet amendement. Cette première étape ne devrait guère poser problème puisque, depuis fin 2019, huit d’entre eux – le Vanuatu, les Maldives, la France, la Belgique, la Finlande, l’Espagne, le Canada et le Luxembourg – ont publiquement exprimé leur intérêt.
Mais punir la mise en danger délibérée de l’environnement voudrait dire incriminer… l’organisation économique actuelle elle-même qui repose sur la destruction de l’environnement. Celle-ci est inscrite dans la logique motrice du mode de production capitaliste et des couples qu’il génère : productivisme et consumérisme, extractivisme et gaspillage. Que faire quand c’est tout un modèle de développement qui peut à bon droit être qualifié de criminel. Croit-on vraiment que nul « banditisme environnemental » n’entre dans le jus d’orange que nous buvons, l’essence que nous consommons, le téléphone que nous utilisons ?
Qui est responsable, l’entreprise qui offre ses services nocifs ou le consommateur qui les achète avec grand plaisir ? Qu’est-ce que le « crime » quand le qualificatif de « criminel » peut être appliqué à des dimensions structurantes de notre existence ? Quand, responsables et non coupables, nous sommes quotidiennement à notre insu de notre plein gré exposés à des pesticides toxiques issus de nos propres achats alimentaires et un air pathogène tout droit sorti du pot d’échappement de notre véhicule personnel ?
Tel est bien le nœud du problème : celui de l’arbitrage entre ce qui est répréhensible ou non quand c’est tout un modèle de développement qui peut à bon droit être qualifié de criminel, un modèle dont nous sommes tous (plus ou moins) partie prenante.
Pour en savoir plus grâce à notre blog biosphere :
5 octobre 2011, crime écologique, crimes verts, écocide
27 janvier 2015, D’une définition de l’écocide à une application pénale
12 juin 2017, Crime d’écocide, bientôt la reconnaissance officielle
27 juin 2020, Constitutionnaliser l’écocide par référendum (en France)